- Mar 2022
-
scolaire.loupbrun.ca scolaire.loupbrun.ca
-
Je voudrais savoir quelque chose sur ce type.
Mais pas à propos de cette femme qui chante, qui demeure pourtant sans nom et sans considération de la part du personnage.
-
Elle a l’air d’une grosse petite fille
C'est drôle [ce n'est pas le bon mot, certes] parce que Simone de Beauvoir évoquait cette pression mise sur les femmes afin de rester l'air jeune et de conserver un corps mince --d'occuper le moins d'espace possible, en fait. Et Sartres, à travers ce personnage de Roquentin, ne cesse de replacer le corps d'Anny dans l'équation, comme un reproche.
-
les mouvements n’existent jamais tout à fait, ce sont des passages, des intermédiaires entre deux existences,
De l'être vers le non-être et vice-versa. (problème du mouvement en philosophie)
-
L’existence n’est pas quelque chose qui se laisse penser de loin : il faut que ça vous envahisse brusquement, que ça s’arrête sur vous, que ça pèse lourd sur votre cœur comme une grosse bête immobile — ou alors il n’y a plus rien du tout.
Comme la pensée peut envahir ("je pense, donc je suis.") lorsqu'elle est doute, raisonnement, etc. (donc que l'on pense activement, et qu'ainsi, on ne peut nier, tout du moins, notre propre existence).
-
Mais aussi un cercle n’existe pas.
Cela fait penser à Platon : un cercle, ou toute autre figure géométrique, n'existe pas dans la réalité physique, corporelle ; il s'agit toujours d'une forme (Idée). Dans la réalité, les cercles sont imparfaits, ils ne sont jamais que des copies des Idées. (Mais, bien sûr, Sartre ne parle d'essence ou d'Idée, ou peu importe.)
-
C’est bien de les avoir mis là, tous ensemble, dit la dame attendrie
Ainsi, on peut raconter une histoire.
-
ils ont tout gardé. Le passé, c’est un luxe de propriétaire.
Le passé doit être matériel. Il n'est pas suffisant d'en faire des souvenirs, car ceux-ci sont davantage des histoires.
-
Mais il est mort : il reste de lui un Traité de Stratégie et des Réflexions sur la Vertu.
Il ne demeure, en somme, que des mots.
-
- Feb 2022
-
scolaire.loupbrun.ca scolaire.loupbrun.caLa Nausée26
-
personne ne la prendra pour une dame ; elle est trahie par l’éclat cynique de ses yeux, par son air raisonnable et averti. Les vraies dames ne savent pas le prix des choses
Évidemment. Merci pour le sexisme de cette "explication".
-
Quand j’aurai fini mon instruction (je compte encore six ans pour cela)
Mais cela pourra-t-il jamais se terminer ? Tant de livres pourraient être imprimés au cours de ces six prochaines années et ensuite... Fini-t-on d'apprendre parce que l'on sait tout ?
-
les saintes idées, les bonnes idées qu’elles tiennent de leurs pères, elles n’ont plus la responsabilité de les défendre ; un homme de bronze s’en est fait le gardien.
Donc, ce sont toujours les hommes qui se trouvent à la source des idées et qui leur octroient de l'importance ?...
-
Négresse
Et cette personne n'a-t-elle pas de nom, ne mérite-t-elle pas qu'on la nomme de son nom, qui lui confère une sorte d'individualité, plutôt que de ne prononcer qu'un terme raciste (en soi)?
-
écrit Mme de Charrières,
Mais, ici, cette cohérence n'est qu'apparente puisqu'elle est, d'abord, relatée par autrui ; c'est à partir des yeux et de la conscience d'autrui que le narrateur peut comprendre ce "personnage".
-
Je ne vois pas du tout M. de Rollebon dans ce rôle mélodramatique.
Les évènements doivent être cohérents.
-
personnages de roman auraient l’air plus vrais,
Parce qu'ils auraient cette cohérence ? Parce que le récit de leur vie serait, lui aussi, cohérent (parce que les choses s'enchaîneraient comme des nécessités) ?
-
qu’est-ce que je cherche ?
Le point de vue que l'on adopte est important en phénoménologie. Par exemple, les objets sont dits transcendants chez Husserl dans la mesure où ils dépassent la perspective que nous en avons.
-
Ce qui manque dans tous ces témoignages, c’est la fermeté, la consistance. Ils ne se contredisent pas, non, mais ils ne s’accordent pas non plus ; ils n’ont pas l’air de concerner la même personne.
Ceci pourrait-il être dû à cet écart, dont parle Husserl, entre les apparences et la réalité --écart dont il faut prendre conscience, mais qui n'est pas un obstacle à la connaissance des choses mondaines.
-
il épouse Mme de Roquelaure, fort belle et qui a dix-huit ans. M. de Rollebon en a soixante-dix
Rien de pertinent, mais... ark!
-
ils sont utiles, rien de plus.
l'être-à-portée-de-la-main chez Heidegger n'est PAS à voir dans cette optique de moyens et de fins --pourtant, le narrateur semble définir l'outil ainsi. En fait, l'outil est bien plus qu'utile, selon Heidegger, on l'utilise pour quelque chose, en vue de, donc c'est toujours en lien avec les possibilités existentielles du Dasein.
-
Je ne suis plus libre, je ne peux plus faire ce que je veux.
Mais être libre, est-ce l'équivalent de faire ce que l'on veut ?... Peut-être croit-on vouloir quelque chose sans que ceci ne relève d'une réelle liberté --l'impression d'être libre parce que l'on veut et qu'on le peut.
-
surtout les papiers. Il m’est agréable de les prendre, de fermer ma main sur eux
Des papiers sur lesquels on peut écrire des mots ou dessiner, des papiers qui racontent une histoire, des papiers qui rendent les mots matériels, qui les font devenir des choses du monde --monde humain, monde tel qu'il est perçu, puis exprimé, par la conscience humaine.
-
j’en ai été profondément impressionné : j’ai pensé que je n’étais plus libre. A la bibliothèque j’ai cherché sans y parvenir à me défaire de cette idée.
Une idée importante, chez Sartre, qu'est la liberté. C'est cette idée --qui ouvre la possibilité qu'on ne soit pas libre, en fait-- qui fait peur au narrateur ?
-
Je sais tout cela, mais je sais qu’il y a autre chose. Presque rien.
Husserl rejète les noumènes (kantiens) derrière les phénomènes : pour lui, les phénomènes ne sont pas un voile sur la "chose en soi". Il n'y a pas cette idée d'une essence cachée des choses ; néanmoins, il faut prendre conscience de cet écart entre réalité et apparences.
-
j’appréhende
L'appréhension est un élément important, pour Husserl, lorsque l'on fait l'expérience du monde, tout en évoluant dans celui-ci. On appréhende, par exemple, qu'il y a d'autres faces à une maison que celle qui est visible pour nous à cet instant.
-
Puis il s’est disloqué, il n’est resté que la lanterne, la palissade et le ciel
La perception immédiate n'est plus, il ne reste que le souvenir ; mais c'est comme s'il n'y avait aucune continuité. Une fois que la perception de la chose n'est plus et qu'il n'e demeure qu'un souvenir, ce qui relie les choses entre elles s'effrite en nous. C'est pourquoi, dans une perspective husserlienne, la perception (de par son immédiateté) est la forme d'expérience du monde qui demeure supérieure --elle rend possible la connaissance des choses du monde.
-
quand cet homme est seul, il s’endort
Exister, c'est exister aux yeux d'autrui ? Si personne ne nous voit, alors qu'y a-t-il à faire d'autre que de prendre une pause --comme dans un hors-temps ?
-
éteignent les lumières et il glisse dans l’inconscience
Ainsi, la lumière permet la perception (visuelle), soit l'intuition immédiate (selon Husserl), donc elle permet une expérience (perceptuelle) du monde et, ultimement, la connaissance de ce monde tel qu'il se donne à la conscience humaine.
-
idée volumineuse et fade.
Une idée qui prend une forme matérielle, une chose parmi les autres choses du monde -- mais celle-ci est nébuleuse.
-
petites métamorphoses s’accumulent en moi sans que j’y prenne garde et puis, un beau jour, il se produit une véritable révolution. C’est ce qui a donné à ma vie cet aspect heurté, incohérent.
Philosophie (ou esthétique) de la littérature: il n'y a pas récit de soi, l'expérience de soi n'est pas diachronique (c'est-à-dire qu'il ne tend pas à voir sa vie en termes narratifs, à y voir [insérer ?] une cohérence).
-
Peut-être bien, après tout, que c’était une petite crise de folie. Il n’y en a plus trace.
La folie ne laisse aucune trace parce qu'elle relève d'un choix éthique ; celui de se tenir dans un espèce de sommeil, dans des fabulations, dans des chimères et rêveries. Mais choisir la recherche de la vérité --même en phénoménologie, sans doute-- est ce qui exclu la possibilité de la folie. Être fou, c'est choisir de s'écarter de cette recherche de la vérité. (Voir Michel Foucault. Histoire de la folie à l'âge classique, Éditions Gallimard, 1972, p. 187.)
-
qu’y a-t-il à craindre d’un monde si régulier
Régularité : la phénoménologie de Husserl n'est pas un psychologisme ou une approche internaliste qui coupe la conscience du monde et de ses choses. En décrivant les choses telles qu'elles arrivent à la conscience, la phénoménologie vise les invariants structuraux. Il y a des phénomènes mondains réguliers qui se présentent à la conscience.
-
je ne peux plus rien écrire de net sur ces histoires
Dans la phénoménologie, il s'agit de décrire les choses telles qu'elles se donnent à notre conscience, c'est-à-dire sans les déformer par des conceptions préalables ou par le ressouvenir.
-
Et il y a eu aussi cette suite de coïncidences, de quiproquos, que je ne m’explique pas
Phénoménologie : il ne s'agit pas d'expliquer, mais de décrire.
-
c’est idiot, il n’y a rien à en dire
Il n'y a pas de "noumènes" (Kant) derrière les phénomènes, derrière les choses elles-mêmes.
-
-
scolaire.loupbrun.ca scolaire.loupbrun.ca
-
J’avais perdu la sécurité de l’enfance ; en échange je n’avais rien gagné.
[Réflexion personnelle] C'est drôle, car si on compare son rapport à l'enfance (même au moment où elle écrivait cela) à celui de Réjean Ducharme, par exemple, on constate une différence majeure. Simone de Beauvoir tente de rapprocher l'enfance de l'âge adulte en donnant une parole et un ton "mature" à son personnage, même lorsque l'on est dans l'enfance. Contrairement, Réjean Ducharme fait ce rapprochement en donnant à ses personnages adultes des airs d'enfants --comme si l'enfance (en tant que période d'une vie) passait, mais que l'enfant ne disparaissait jamais, il est toujours là, perdu dans la vie "adulte" des convenances.
-
J’appris à faire mes devoirs, à étudier mes leçons dans le brouhaha des voix. Mais il m’était pénible de ne jamais pouvoir m’isoler. Nous enviions, ardemment, ma sœur et moi, les petites filles qui ont une chambre à elles ; la nôtre n’était qu’un dortoir.
Une fois encore, on dirait que Simone de Beauvoir fait référence à l'essai de Virginia Woolf qui parle, à la fin, de l'importance pour les femmes --autrices ou écrivaines plus précisément-- d'avoir une pièce pour elles.
-
on nous appela désormais : « les deux inséparables. »
Qui inspirera un autre livre de Simone de Beauvoir (Les inséparables)
-
hors série.
Manière de parler qui objectifie les femmes, ainsi qu'elle-même.
-
« Celle-ci n’est pas pareille aux autres. »
Un sexisme internalisé, qui tend à refuser d'être comme "les autres filles/femmes" afin de s'élever au-dessus d'elles (ou de ce qui est, socialement certes, considéré comme typiquement féminin).
-
Soudain je m’immobilisai : j’étais en train de vivre le premier chapitre d’un livre dont j’étais l’héroïne
Vivre sa propre vie (ou seulement des moments) comme "à côté", pas entièrement là, une moitié de soi qui se voit vivre.
-
mais je partageais son horreur de la couture et du ménage
Mais, de toue façon, y a-t-il beaucoup de femmes qui aiment le ménage???
-
Claudine à l’école
De Colette, écrivaine sans doute dérangeante pour l'époque.
-
Ce que je comprenais le moins, c’est que la connaissance conduisît au désespoir.
Comme le mythe de la boîte de Pandore, ainsi que celui de la Genèse (Adam et Ève évincés du paradis sur Terre). Le désir de connaître peut devenir, du moins, un péché.
-
elle avait fait tant de mauvaises lectures qu’elle avait perdu la foi et pris la vie en horreur. Il essaya de lui rendre l’espoir, mais elle était trop gravement contaminée : à peu de temps de là, il apprit son suicide
Ce passage ressemble au récit écourté de Madame Bovary.
-
si elle transgressait ces règles, elle avait mauvais genre. L’inconvenance ne se confondait pas tout à fait avec le péché mais suscitait des blâmes plus sévères que le ridicule
C'est dire que rien n'est à prendre à la légère quant à son apparence physique lorsqu'on est une femme.
-
J’avais une chambre à moi
Écho à Virginia Woolf ?
-
comment préférerait-on rien à tout ?
Cela ressemble au pari de Pascal.
-
je me persuadai de plus en plus qu’il n’y avait pas place dans le monde profane pour la vie surnaturelle. Et pourtant, c’était celle-ci qui comptait : elle seule.
Deux "mondes" qui entre en conflit.
-
je me demandais dans quelle mesure elle concernait Dieu. La plupart des fautes pour lesquelles ma mère nous réprimandait, ma sœur et moi, c’étaient des maladresses ou des étourderies.
Ah, mais (saint-)Augustin le disait : la justice divine n'est pas la justice humaine, les êtres humains ne peuvent la comprendre réellement!
-
Car Dieu prenait toujours mon parti
Le Dieu personnel dont parle Nietzsche : il s'intéresse, ici, à l'existence de Simone --de plus, il est le seul à la voir au-delà de son image terrestre.
-
néant
Comme si on créait à partir de rien (néant).
-
Quand je dormais, le monde disparaissait ; il [Page 92]avait besoin de moi pour être vu, connu, compris
Résonances à la phénoménologie : le monde existe ainsi pour nous (humains) parce qu'il nous apparait (à notre conscience) comme tel à travers ses phénomènes.
-
asservir la laine ou le coton à la rigueur d’un [Page 91]modèle et d’un canevas
Encore cette idée de la servitude.
-
mais je ne leur demandais rien de plus que de sanctionner publiquement mon existence
Mais c'est toujours l'existence par le regard et l'approbation d'autrui.
-
D’ordinaire, il méprisait les filles et j’appréciai d’autant plus son amitié. « Simone est une enfant précoce », avait-il déclaré.
Le sexisme (voire misogynie) de ce garçon et qui est internalisé par elle-même.
-
Une jumelle eût ôté à mon existence ce qui en faisait tout le prix : sa glorieuse singularité.
Mais aussi la possibilité de hiérarchiser les existences : sa soeur est sa "vassale", elle lui est soumise et d'ailleurs, Simone y prend plaisir. De là, en mon sens, vient une part du sens qu'elle donne à sa vie, sa vie en comparaison à celle des autres.
-
Ainsi, au présent et dans l’avenir, je me flattais de régner, seule, sur ma propre vie.
C'est un refus, du féminisme de cette époque notamment, de voir que l'on dépend tous et toutes les uns des autres. C'est l'illusion de l'indépendance absolue. Comme si la vie n'était bien vécue qu'en tant qu'être humain entièrement indépendant --mais cela est critiqué, notamment, dans les théories de l'éthique du care et de l'écoféminisme.
-
mais à mes yeux le monde ne contenait rien de plus précieux.
Cette évasion de la réalité, ou du moins, la possibilité de ne pas s'y coller (permise par la littérature).
-
L’affreuse mort de Bob contredisait toutes les règles ; n’importe quoi pouvait arriver.
Pas de nécessité, la contingence dans le monde et dans l'enchaînement des évènements --bref, Sartre...
-
modestie de notre condition
Modeste par rapport aux gens plus riches.
-
Alors que la plupart des enfants de mon entourage recevaient La Semaine de Suzette, j’étais abonnée à L’Étoile noëliste, que maman jugeait d’un niveau moral plus élevé.
Niveau moral qui se rattache, aussi, au statut social, soit la bourgeoisie, qui est le leur. Les "classes (sociales) plus élevées" sont moralement supérieures, donc plus vertueuses, comme par nature (essence).
-
j’avais bien des raisons de me féliciter de mon sort.
La vertu.
-
Ce que j’appréciais le plus dans nos rapports, c’est que j’avais sur elle une prise réelle.
Idéalisation de l'Autorité dans les rapports humains ; idéalisation des rôles et occupations typiquement masculins --plutôt que de remettre, réellement, leur valeur en question.
-
vie intellectuelle — incarnée par mon père — et ma vie spirituelle — dirigée par ma mère — étaient deux domaines radicalement hétérogènes
Contraste avec la théologie de Thomas d'Aquin, par exemple. De plus, dichotomie entre le rôle de son père et celui sa mère.
-
Je ne la considérais pas comme une sainte, parce qu’elle m’était trop familière et parce qu’elle s’emportait trop aisément
Une poupée de porcelaine serait, sans doute, une meilleure sainte en ce sens qu'elle demeure muette --autant en paroles qu'en pensées.
-
elle ne m’avertit même pas des surprises qui m’attendaient au seuil de la puberté.
Ce dont parle Simone de Beauvoir dans Le deuxième sexe (tome II, je crois).
-
ma mère, plus jeune que lui de huit ans, la reconnaissait de bon cœur : c’était lui qui l’avait initiée à la vie et aux livres. « La femme est ce que son mari la fait, c’est à lui de la former », disait-il souvent.
Et c'est pour mieux la "former" qu'elle doit être si jeune ?
-
il exigeait des épouses la fidélité, des jeunes filles l’innocence, mais consentait aux hommes de grandes libertés, ce qui l’amenait à considérer avec indulgence les femmes qu’on dit légères
Les hommes peuvent exiger que le monde, en l'occurrence, la "nature" soit à leurs pieds ; que le monde ne soit là que pour servir leurs desseins, besoins et désirs.
-
il avait cessé de se contraindre.
Mort de sa mère = mort de la "nécessité" qui le contraignait.
-
Les premiers temps, j’avais composé mon personnage
Encore cette notion de "personnage", fabrication de la personne que l'on est pour les autres, vivre pour être vu.e et admiré.e
-
Ces pieuses complicités resserrèrent mon intimité avec maman ; elle prit nettement dans ma vie la première place
S'adonner à la spiritualité ainsi qu'à la religion quelque peu aveuglément, c'est le rôle des femmes (croire plutôt que comprendre) [préjugés et constructions sociales à propos des femmes, bien sûr].
-
des petits réfugiés et je voulus contribuer à adoucir leurs malheurs.
Attitude hautaine face aux difficultés que traversent certains : c'est de se positionner, comme pour ce qui est de la pitié chez Nietzsche, comme supérieur à ceux et celles que l'on juge être vulnérables. (Voir certaines autrices et philosophes féministes à propos de l'éthique du care notamment)
-
elle sentait le parfum, ses lèvres étaient fardées, elle portait aux doigts de grosses bagues, et pour comble, elle s’appelait Mme Malin.
Les parures (féminines surtout) sont comme un masque derrière lequel on peut caché sa malice?
-
« l’Allemande ». Enfin le Mal s’était incarné.
Puisqu'il le faut, on trouve un bouc émissaire.
-
portant robe et tablier blanc, un bonnet sur la tête, écarquillant ses yeux bleus, il me fit rire aux larmes dans le rôle d’une cuisinière idiote qui s’appelait Rosalie.
Les hommes peuvent s'évader de leurs rôles d'hommes en imitant les femmes (toujours idiotes, perfides, insipides, si sentimentales, etc.).
-
Depuis que j’allais en classe, mon père s’intéressait à mes succès, à mes progrès et il comptait davantage dans ma vie.
Bien entendu, car la connaissance, la culture, la vie intellectuelle, etc. ont plus de "pertinence" que les "choses de femmes/filles".
-
J’avais quelques jouets qui m’amusaient : un petit nombre seulement me captivèrent.
Personne qui a tant de choses matérielles et qui a accès à tant de diversité dans son exploration du monde qu'elle ne s'en émerveille même plus --voire, cela l'ennuie.
-
mais j’eus l’impression d’apprendre les règles d’un jeu, non d’acquérir une connaissance.
Et cela dépend de ce que l'on entend par "connaissance" puisqu'on pourrait faire valoir que la connaissance n'est pas certitude absolue, mais plutôt système cohérent (avec des règles logiques).
-
Ce qui me stupéfia, ce fut d’avoir cru si solidement une chose qui n’était pas vraie, c’est qu’il pût y avoir des certitudes fausses.
Les fondations du monde commencent à être moins solides : si des choses, élevées au rang de "certitudes" peuvent ne pas être vraies, alors tout peut être (potentiellement, bien sûr) questionné.
-
volonté divine tranquillisait ma curiosité : en gros, elle expliquait tout.
La religion (catholique, du moins) devient un réseau de "connaissances" en soi. Elle apporte toutes les réponses à toutes les questions, même les plus existentielles.
-
On me raconta d’abord que les parents achetaient leurs enfants ; ce monde était si vaste et rempli de tant de merveilles inconnues qu’il pouvait bien s’y trouver un entrepôt de bébés.
(Le capitalisme poussé à son comble.) Mais, ceci rend compte du réseau de connaissances qui est insuffisant et qui ne peut, donc, pas remettre beaucoup "d'informations" en question.
-
Ce que je voyais de mes yeux, ce que j’éprouvais pour de bon, devait rentrer tant bien que mal dans ces cadres ; les mythes et les clichés prévalaient sur la vérité
La vérité (et même la réalité) doit s'insérer dans les constructions arbitraires, parfois calculées, de l'imaginaire collectif et religieux.
-
C’est alors que l’univers chavira. Impossible que papa et maman fussent ennemis, que Louise fût leur ennemie ; quand l’impossible s’accomplit, le ciel se mélange à l’enfer, les ténèbres se confondent avec la lumière.
Les masques tombent et le gouffre qui séparait le Bien et le Mal n'est plus qu'une mince ligne, qui s'efface peu à peu.
-
n’évoquaient jamais pour moi l’image d’une chair souffrante.
Ils ne souffrent pas puisqu'ils sont mauvais (et méritent ce qui leur arrive, par manque de vertu).
-
ces personnages secondaires fussent moins irréprochables que les divinités suprêmes : Louise et mes parents détenaient le monopole de l’infaillibilité.
Comme dans une histoire (littérature), il y a des personnages, certains qui sont bons peu importe ; se voir tel un personnage, faire le récit de sa vie (et dans le cas de ce livre, littéralement).
-
Mais ces accidents se réparaient vite et n’ébranlaient pas mon credo : les joies et les peines des hommes correspondent à leurs mérites.
Un peu comme le personnage de Candide, qui, malgré tout, croit que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles.
-
leurs consciences. Celles-ci jouaient parfois le rôle d’un aimable miroir ; elles avaient aussi le pouvoir de me jeter des sorts ; elles me changeaient en bête, en chose.
Corps-objet qui n'a pas d'agentivité. Mais pourquoi ce rapprochement entre "bête" et "chose" ? (Les animaux non-humains sont-ils des "choses", des machines à la Descartes ? [Non!!]).
-
Mon ciel était étoilé d’une myriade d’yeux bienveillants.
Vivre pour et par le regard des autres.
-
Je continuais à grandir et je me savais condamnée à l’exil : je cherchai du secours dans mon image.
On peut voir cette idée développée davantage par Simone de Beauvoir dans Le deuxième sexe (tome I ou II, je ne sais plus).
-
matrone
(quand même très sexiste)
-
monstre ballonné. Je contemplais avec une sage appétence les images illustrant le régime prescrit par le docteur : une tasse de chocolat, un œuf à la coque, une côtelette dorée. Charlotte retrouvait ses dimensions normales
La triste culture des diètes qui retentit dès l'enfance --avec des termes comme "monstre".
-
il me changerait en une autre qui dirait moi et ne serait plus moi. J’ai pressenti tous les sevrages, les reniements, les abandons et la succession de mes morts
Le passage de l'enfance à l'adolescence et les changements physiques que cela impose, mais aussi, c'est le monde qui s'impose à soi. On n'en est, soudainement, plus "à l'abris". On doit, de plus, abandonner l'enfance, car on n'est plus un enfant ; il y a peut-être une petite partie de ce qu'on est qui s'effrite et meurt peu à peu.
-
belle comme une image
(Image) Inerte, presque sans vie, sans agentivité, qui ne sert qu'à être vue et admirée.
-
elle n’existait — du moins je le croyais — que pour veiller sur ma sœur et sur moi
Voir l'existence d'autrui par rapport à soi-même.
-
Je regardais, je palpais, j’apprenais le monde, à l’abri.
Être à l'abri du monde lui-même, de ses attentes, de ses jugements, de ses regards indiscrets --tout cela parce qu'on ne le voit pas lorsqu'on est enfant.
-
titrait simplement « auteur », sans égard au sexe de l’auteure de l’ouvrage
Aucunement surprenant ! Merci pour le mot "autrice" plutôt que "auteure", d'ailleurs.
-
- Jan 2022
-
remacle.org remacle.org
-
Définition de la comédie
Nous sommes dans la description de ce qu'est la comédie.
-
Ceux qui étaient plus graves imitaient les belles actions et celles des gens d'un beau caractère; ceux qui étaient plus vulgaires, les actions des hommes inférieurs,
Comme Socrate (platonicien) : c'est ainsi que cela doit être.
-
il arrive que cette contemplation nous instruit et nous fait raisonner sur la nature de chaque chose,
Ici, Aristote se distingue de Platon/Socrate puisqu'il défend que la littérature (et les arts vivants, comme le théâtre) peut être un outil à l'apprentissage et à la réflexion, voire à la réflexion d'ordre philosophique. Il propose, en somme, de voir la poésie en tant que domaine d'apprentissage qui procure de lui-même du plaisir.
-
Cela tient à ce que le fait d'apprendre est tout ce qu'il y a de plus agréable non seulement pour les philosophes, mais encore tout autant pour les autres hommes
Il y a, alors, une notion de plaisir à ajouter au fait d'apprendre. Cela ressemble à l'épicurisme (morale basée sur la notion de plaisir) en ce sens que l'on devrait vouloir apprendre (notamment) parce qu'apprendre procure du plaisir -- i.e. il est moralement bien d'apprendre.
-
nature humaine dès l'enfance; et ce qui fait différer l'homme d'avec les autres animaux, c'est qu'il en est le plus enclin à l'imitation
Mais cela est-il, réellement, inhérent exclusivement à la nature humaine que d'apprendre en imitant ? (Non) Cependant, Aristote nous dit qu'il y a ce trait propre à l'être humain (c'est dans sa nature) qui permet de faire une différenciation entre êtres humains et animaux non-humains. Ainsi, l'apprentissage par l'imitation n'est pas suffisant pour expliquer la naissance de la tragédie [pour reprendre Nietzsche].
-
causes naturelles, qui semblent, absolument parlant, donner naissance à la poésie.
Deux causes que l'on retrouve dans la nature humaine qui auront permis à la poésie d'être.
-
quel est le rôle de chacune d'elles et comment on doit constituer les fables (01) pour que la poésie soit bonne
Il y a différentes sortes de poésies : c'est-à-dire, selon Aristote, qu'elles se différencient selon leur rôle. C'est, ensuite, à partir de cela (le rôle de chacune) que l'on peut les évaluer. "Bonne" = de bon goût ? ou ; "Bonne" = bien/bonté ?
-
poésie consiste dans l'imitation
À l'instar de Platon/Socrate, Aristote considère la poésie comme étant de l'imitation.
-
-
remacle.org remacle.org
-
la raison nous en faisait un devoir.
Donc, il ne s'agit pas d'une opinion, selon Socrate, mais bel et bien d'un devoir : un devoir moral, à la manière kantienne (éthique déontologique).
-
La poésie imitative produit en nous le même effet pour l’amour, la colère, et toutes les passions de l’âme, agréables ou pénibles, dont nous avons reconnu que nous sommes sans cesse obsédés
Et il faudrait combattre ces passions parce qu'elles nous troublent, nous empêchant de nous adonner à des choses du domaine de la raison. Il faut se détourner de ces passions, comme il faut se détourner, le plus possible, des plaisirs sensibles. D'ailleurs, ces passions sont "addictives" parce qu'elles entretiennent une étroite relation avec les sens et le corps.
-
je veux dire d’être fermes [605e] et tranquilles, persuadés que ce parti convient à un homme, et qu’il faut laisser aux femmes ces mêmes plaintes que nous venons d’applaudir.
Chacun a sa place dans la cité, de par sa nature, et cela ne doit être bousculé : les femmes, en l'occurrence, sont les seules qui peuvent s'adonner à de telles passions puisqu'elles sont inférieures, par nature, aux hommes. (Un autre exemple de la misogynie dans la Grèce antique).
-
nous ressentons alors un plaisir secret auquel nous nous laissons aller insensiblement, et qu’à la compassion pour le héros
Nous délaissons la raison au profit de la passion, du plaisir des apparences et des sentiments tragiques.
-
nous n’avons rien dit encore de la plus grave accusation qu’il y aurait à porter contre elle. N’est-ce pas en effet quelque chose de bien fâcheux, de voir qu’à l’exception d’un très petit nombre, elle est capable de corrompre les gens sages ?
Sa capacité à corrompre les gens sages est d'autant plus dangereuse : la raison ne suffit pas. C'est pourquoi même l'enseignement de la philosophie, par exemple, ne pourra être satisfaisante tant qu'il y aura de tels poètes dans la cité.
-
car c’est l’image du désordre que le poète imitateur introduit dans le gouvernement intérieur de chaque homme, par l’excessive complaisance qu’il a pour cette partie insensée de notre âme
C'est que le poète encourage cette partie de l'âme ignorante à ne "connaître" que le faux, l'artifice, les passions, etc. Ensuite, il n'engage pas la raison à vérifier ces opinions fausses.
-
Par conséquent ce qui juge en nous sans égard à la mesure, est différent de ce qui juge conformément à la mesure.
Socrate distingue l'opinion fondée sur les apparences et la connaissance, qui se fonde sur la raison, qui prend ses distances avec les apparences en les questionnant d'abord.
-
Mais la partie de l’âme qui s’en rapporte à la mesure et au calcul, est ce qu’il y a de plus excellent dans l’âme.
Donc, la connaissance est supérieure à l'opinion (fondée sur les apparences) et, puisque c'est une certaine partie de l'âme qui permet la connaissance, celle-ci doit être supérieure.
-
et pourtant tel que des gens qui n’y entendent pas plus que lui, et qui ne regardent qu’à la couleur et au dessin, croiront voir un cordonnier véritable.
Mais cela ne plaide-t-il pas en faveur d'une éducation à la philosophie dès un jeune âge, et ce pour tous (et toutes) ? Ainsi, l'on serait capable de voir la différence.
-
si Homère eût été réellement en état d’instruire les hommes et de les rendre meilleurs, comme ayant une parfaite connaissance des choses au lieu de savoir seulement les imiter
L'éducation sert à rendre meilleur, un récit ne peut être considéré comme éducatif s'il ne vise pas cet objectif. Et ce qui rend meilleur, selon Socrate, est la connaissance, ou du moins, la recherche, du vrai. Homère ne peut donc pas être considéré comme un poète capable d'instruire quiconque -- de plus, il ne connaît pas les choses dont il parle.
-
Est-elle l’imitation de l’apparence ou de la réalité ?
Ce qui est de l'ordre des apparences est trompeur.
-
Le seul nom qu’on puisse raisonnablement lui donner, est celui d’imitateur de la chose
Les arts imitent les reproductions : jamais, donc, les arts ne sont complètement indépendants du monde sensible. Certains arts, cependant, ne reproduisent pas fidèlement le monde sensible tel qu'il est.
-
et voulant être réellement auteur du vrai lit, et non de tel lit en particulier,
L'Idée du lit est le lit en général, par son essence ; mais tous les lits reproduits à partir de cette Idée générale sont des lits en particulier. Sans les Idées, toutefois, il n'y aurait pas de lit particulier, de bien, de beauté, etc. C'est pourquoi les Idées participent au monde sensible, c'est-à-dire qu'elles lui permettent d'exister.
-
Prends un miroir, présente-le de tous côtés: [596e] en moins de rien tu feras le soleil, et tous les astres du ciel, la terre, toi-même, les autres animaux, les plantes, les ouvrages de l’art, et tout ce que nous avons dit.
Les arts imitatifs ne font pas qu'imiter les Idées (comme le fait l'artisan de lit ou de table), ils imitent les choses qui sont déjà des imitations des Idées. -- C'est tout comme le miroir qui reproduit ce qui est le fruit de la reproduction.
-
Mais tous ces meubles sont compris sous deux idées seulement
Les Idées participent au monde sensible ; mais l'Idée n'est jamais d'ordre sensible, elle lui est nettement inférieure.
-
on doit plus d’égards à la vérité
La vérité est plus importante que l'art de la poésie -- surtout lorsque l'art peut tromper ses adeptes, c'est-à-dire lorsqu'il peut faire passer une choses fausse pour vraie.
-
ce genre de poésie est un poison pour l’esprit de ceux qui l’écoutent, lorsqu’ils n’ont pas l’antidote, qui consiste à savoir apprécier ce genre tel qu’il est.
Il faut savoir qu'il s'agit d'une sorte d'art imitatif, sinon on peut s'y attacher jusqu'à penser qu'il s'agit de la réalité et de la vérité.
-
-
-
faiseur de fables plus austère et moins agréable, mais plus utile, dont le ton imiterait le langage de la vertu
La littérature doit être utile (en montrant la vertu), il s'agit du tout premier critère qu'elle se doit de respecter dans cette cité. Le plaisir esthétique n'importe que peu.
-
si le poète ne se cachait jamais, tout son poème ne serait qu'un récit simple, [393d] sans imitation.
Certains poètes se cachent, se soustraient au regard du lecteur, en imitant les personnages de leurs récits.
-
plus il sera vicieux, plus il sera porté à tout imiter. Il ne croira rien au dessous de lui.
On doit concéder qu'il y a un ordre "naturel" que chacun.e doit respecter.
-
si le poète ne se cachait jamais, tout son poème ne serait qu'un récit simple, [393d] sans imitation.
Certains poètes se cachent, se soustraient au regard du lecteur, en imitant les personnages de leurs récits.
-
graves erreurs, lorsqu'ils disent que généralement les hommes injustes sont heureux, et les justes malheureux : que l'injustice est utile, tant qu'elle demeure cachée
Socrate dénonce la dévalorisation de la justice par les poètes, qui disent qu'elle n'a pas de valeur en soi et que l'injustice la surpasse en valeur (personnelle/individuelle). Ils font l'éloge, donc, du gain personnel.
-
Nous soutiendrons que tous ces faits sont faux
Cela est-il une défense de la Vérité ou bien de la croyance -- et ces deux choses sont-elles profondément différentes ? Socrate remet en question les poètes, leurs récits ainsi que leur place dans la cité ; mais il ne remet jamais en question l'idée qu'il a des dieux selon la mythologie.
-
remède utile, il est évident que c'est aux médecins à l'employer, et non pas à tout le monde indifféremment.
Le mensonge ne peut être utiliser que par une élite qui saura en user "correctement". Le mensonge n'est donc pas un mal absolu, il peut être employé pour faire un bien -- seulement faut-il savoir l'employer.
-
aux femmes ordinaires, et aux hommes lâches,
Les femmes, de par leur nature, pleurent et gémissent ; les hommes sont lâches s'ils le font.
-
le sage ne regardera point la mort comme un mal pour un autre sage qui est son ami.
Le sage ne craint pas la mort -- sans toutefois la désirer, il ne la redoute pas.
-
plus ils sont pleins de poésie, plus ils sont dangereux
La littérature est est dangereuse, d'autant plus si elle procure du plaisir esthétique : position qui sera défendue par d'autres philosophes lorsqu'il sera question, plus précisément, du théâtre tragique (par exemple).
-
Nous effacerons par conséquent tous les passages de ce genre
Socrate considère que l'apprentissage se fait par imitation (d'une attitude ou comportement que ce soit dans un récit ou dans la vrai vie), mais aussi qu'il vaut mieux censurer plutôt qu'expliquer.
-
les prier de faire l'éloge de l'autre monde
C'est l'attitude adoptée par Socrate dans le Phédon, il ne craint pas la mort et incite ses "disciples" à en faire de même. Selon ce passage, ce qui confère du courage, c'est de ne pas craindre une conséquence, quelle qu'elle soit, et de faire ce que l'on fait parce que l'on sait que c'est bien.
-
-
-
maîtres chargés de l'éducation de la jeunesse, si nous voulons que nos guerriers deviennent des hommes religieux et semblables aux dieux, autant que la faiblesse humaine peut le permettre
La littérature est un outil au service de l'éducation, selon Socrate ; elle devrait permettre aux lecteur.trice.s de s'élever vers les dieux, moralement parlant.
-
personne ne consent volontairement à ce que la partie la plus importante de lui-même soit trompée
Ce n'est jamais par volonté que l'on ment ou fait le mal ; c'est lorsque l'on est ignorant que l'on fait agit ainsi. De ceci, il s'ensuit que les dieux sont soit ignorants, soit qu'ils ne mentent pas puisqu'ils sont parfaits selon leur nature.
-
nécessité
Nécessité logique, suivant le raisonnement ci-haut.
-
L'âme n'est-elle pas aussi d'autant moins troublée et altérée par les accidents extérieurs qu'elle est plus courageuse et plus sage ?
Il faut entraîner l'âme à se détacher du corps et à faire de la philosophie afin qu'elle ne se laisse pas "corrompre" par les choses sensibles. La philosophie permet de prémunir contre l'attrait des choses du monde sensible. (Voir 381b aussi)
-
pareils discours sous le voile de la fiction, soit en vers soit en prose, parce qu'ils sont impies, dangereux et absurdes.
Ces discours sont des représentations frauduleuses, qui s'éloignent de ce que sont les dieux tout en prétendant en rendre compte. De plus, c'est en ce sens que la fiction est un voile : elle cache (partiellement) la vérité, ne laissant entrevoir que sa silhouette brumeuse. La fiction voile ou brouille la ligne entre le vrai et le faux (selon Socrate).
-
il doit dire que Dieu n'a rien fait que de juste et de bon, et que le châtiment a tourné à l'avantage des coupables.
Ce qui est injuste et ce qui est mal sont deux catégories qui doivent être punies. On ne devrait pas tirer avantage de l'injustice ou de la malfaisance -- contrairement à ce que les récits fictifs transmettent.
-
Il nous convient de savoir d'après quel modèle les poètes doivent composer leurs fables et de leur défendre de s'en écarter, mais ce n'est point à nous d'être poètes.
Il faut imposer un modèle de ce qui est acceptable. Tous les discours ne s'équivalent pas, comme tous les points de vue ne sont pas équivalents : il y en a qui sont meilleurs que d'autres.
-
On ne doit donc pas admettre sur l'autorité d'Homère, ou de tout [379d] autre poète, une erreur, au sujet des dieux, aussi absurde que celle-ci : .... Sur le seuil du palais de Jupiter (24) Sont placés deux tonneaux remplis l'un de biens, l'autre de maux. Ni que celui pour qui Jupiter puise dans l'un et dans l'autre, Éprouve tantôt du mal et tantôt du bien (25); Mais que celui pour lequel il ne puise que du mauvais côté, La faim dévorante le poursuit sur la terre féconde (26). Et ailleurs : Jupiter est le distributeur des biens et des maux (27).
Puisqu'on admet que ce qui est bon est bienfaisant, celui-ci ne peut être cause du mal. Pourtant, les poètes disent que les dieux peuvent être cause du mal tout en étant cause du bien. Ceci est un mensonge grave, selon Socrate, puisqu'il enseigne que même ces êtres sont bienfaisants et malfaisants.
-
et qu'en tirant la plus cruelle vengeance des mauvais traitements qu'il aura reçus de son père, il ne fait qu'une chose dont les premiers et les plus grands des dieux lui ont donné l'exemple.
Non seulement le mensonge en soi est-il (moralement) blâmable ; mais ce qui encore pire, selon Socrate, c'est que l'on enseigne à des enfants que les dieux son vengeurs, par exemple. C'est-à-dire qu'on apprend aux enfants que même les dieux ne peuvent résister à se venger, à maltraiter, à faire la guerre, à mentir, etc. -- comment, alors, nous, humains, pourrait-on y résister ?
-
les enfants écoutent toutes sortes de fables imaginées par le premier venu, et que leur esprit prenne des opinions la plupart du temps contraires à celles dont nous reconnaîtrons qu'ils ont besoin dans l'âge mûr
Il s'agit d'une corruption de l'esprit des enfants : ce qui est enseigné ne leur permettra pas de devenir de bons agents moraux. Ces enfants grandissent en ayant des opinions fausses.
-
les premiers discours qu'on tient aux enfants sont des fables! Elles ont du vrai, mais en général le mensonge y domine.
Principalement, ici, Socrate dénonce les mensonges qui se trouvent dans les contes pour enfants. Il y a, donc, un danger moral à enseigner ces contes puisqu'ils font passer pour vrai ce qui est faux (le mensonge).
-
A quel rang, reprit-il, parmi ces biens placeras-tu la justice? [358a] Au premier, selon moi, parmi les biens qu'on x doit aimer pour eux-mêmes et pour leurs conséquences, si l'on aspire au bonheur.
On doit aimer la justice pour elle-même (ainsi que pour ses conséquences), elle est nécessaire au bonheur selon Socrate. Ce qui va à contre-courant, car beaucoup diraient que la justice est désirable lorsqu'elle est la voie permettant d'arriver à telle issue. La justice en soi, selon ceux-ci, ne rend pas heureux.
-
-
fr.wikisource.org fr.wikisource.org
-
que Simonidès est un mauvais poète
Dans la République de Platon, Socrate accuse les poètes, dont Simonide fait partie, de ne pas bien représenter les dieux. Selon lui, il s'ensuit que l'on devrait les expulser de la cité -- ils sont mauvais pour l'éducation morale des enfants et des adultes.
-
c’est vieux jeu de prendre la lyre et de chanter à table, comme une femme qui moud de l’orge
Que ce soit quelque chose de "vieux jeu" et qu'on puisse comparer cela à une "activité de femme", c'est un prétexte pour le battre. On en a contre ce qui est vieux (valeurs, personnes, etc.) et ce qui est dit féminin.
-
Je le démontrerai et je te vaincrai par mon discours.
Limites de la philosophie (et de la rhétorique) -- tout remettre en question n'est pas forcément souhaitable. Y a-t-il des choses que l'on ne puisse remettre en question ? Sinon, devrait-il y en avoir ?
-
Dans la palestre, les enfants s’asseyaient les jambes allongées, de manière à ne faire voir aux voisins rien d’indécent. Aussitôt qu’ils s’étaient remis debout, ils essuyaient la place, et veillaient à ne laisser aux amants aucune empreinte de leur sexe. Pas un enfant ne se frottait d’huile au-dessous du nombril ; et le milieu de leur corps florissait de rosée et de duvet comme les fruits
Une place importe est accordée au corps, à la sensualité ainsi qu'au soin de l'apparence de celui-ci.
-
fort dans l’art de parler.
La force n'est plus physique (anciennes valeurs guerrières), mais dans les choses "inutiles".
-
Je lui accorde la parole ; puis, quand il aura parlé, je décocherai sur lui des expressions et des pensées nouvelles.
Cela ne vient-il pas du procédé de Socrate -- poser des questions "simples", laisser parler les autres, puis présentez son raisonnement ? Socrate est donc, comme nous l'avons déjà compris, représenté par ce raisonnement injuste.
-
vieux Kronos
Valeurs anciennes/traditionnelles provenant d'une époque de guerre.
-
toi le corrupteur des jeunes gens.
Accusation contre Socrate.
-
Ô souverain Zeus, quelle chose à n’en pas finir que les nuits ! Le jour ne viendra donc pas ?
Zeus = dieu du ciel et de la foudre ; thème de la brillance (soleil et électricité). Strepsiadès demande à Zeus de faire venir le jour, soit de ne plus être dans la pénombre de la nuit (sens littéral) ; la nuit représente la guerre et les dettes à rembourser (sens figuré), peut-on penser.
-
Voilà, voilà le mal qui me tue ; même en dormant, il rêve chevaux.
Son fils parvient à dormir, malgré ses pensées/préoccupations lui venant de l'état d'éveil, alors que Strepsiadès est empêché de dormir précisément à cause de ses préoccupations.
-
Mais il n’écoutait pas mes discours, et sa passion pour le cheval a coulé mon avoir.
Sa passion lui vient donc directement de sa mère ; le vice du fils trouve sa source chez la mère (misogynie grecque + statut social de la mère, qui est aristocrate)
-
Mais je veux d’abord l’éveiller.
Au sens littéral et figuré.
-
charlatans
Des gens qui profitent de la crédulité des autres (ce que l'on aura reproché à Socrate "corruption de la jeunesse").
-
une haute pensée
On peut penser aussi qu'il s'agit, notamment, d'une manière de dire que Socrate (et ses disciples) n'était qu'un "pelleteur de nuages", c'est-à-dire qu'il ne faisait pas oeuvre utile. Et "haute" en tant que hautaine.
-
pour riposter à l’autre raisonnement
Donc, Socrate ne fait pas de la philosophie, mais de la rhétorique ; il fait de longs discours, demande aux autres de raisonner et s'oppose à ces raisonnements.
-
Non, par Zeus ! mais je me figurais que c’était du brouillard, de la rosée, de la fumée.
Donc, ce qui empêche de bien voir, de voir clairement, de voir au loin, etc.
-
Elles sont tout ce qu’elles veulent
Elles se transforment selon ce qu'elles voient : autrement dit, elles représentent les discours des sophistes qui changent selon l'interlocuteur.
-
C’est qu’elles seules sont déesses ; tout le reste n’est que bagatelle.
Les dieux de la mythologie grecque ne sont pas les "vrais" dieux : Socrate est représenté comme celui qui ne croit pas aux dieux de la Cité (l'une des accusations contre lui).
-
Voyons, où as-tu jamais vu pleuvoir sans Nuées ?
La pluie ne provient pas des dieux (de la mythologie grecque), Socrate va contre le sens commun (et les croyances communes, donc).
-
Lorsqu’elles sont pleines d’eau, et contraintes à se mouvoir
Non seulement cela va à l'encontre du sens commun (de l'époque, bien sûr), mais c'est aussi peu près de la Vérité. Il s'agit d'une représentation de la philosophie et de Socrate qui remet en question les choses acceptées pour les remplacer par des explications tout aussi farfelues. La Vérité n'est donc pas forcément l'objectif à atteindre ; elle n'a rien d'absolu non plus, car elle est davantage relative.
-
mais tu sembles avoir raison.
"Sembler" : Socrate convainc par ses arguments, même si la position qu'il défend est invraisemblable (pour l'interlocuteur).
-
retourner la justice de mon côté
C'est-à-dire de manipuler le juste (contrairement à ce qu'enseignait le Socrate de Platon), de faire la justice pour soi, de voir la justice comme une chose individuelle ?
-
je consens à être aux yeux des hommes insolent, beau diseur, effronté, impudent, vil coquin, colleur de mensonges, hâbleur, rompu aux procès, table de lois, cliquette, renard, tarière, souple, dissimulé, visqueux, fanfaron, gibier à étrivières, ordure, retors, hargneux, lécheur d’écuelles.
Ce que l'on disait des sophistes (et des philosophes).
-
mais je veux t’adresser quelques questions
C'est ainsi que procédait Socrate (dépeint par Platon), en effet. Et c'est la critique de la philosophie faite ici : tout remettre en question, poser des questions.
-
Non ; mais il est prescrit d’entrer nu.
De se défaire de ses croyances, de ne pas y être accroché ?
-
antre de Trophonios
Où il y aurait un Oracle (qui offrirait des réponses).
-
Dionysos
Dieu de la démesure (entre autres choses), démesure qui est mal vue à cette époque puisque cela va à l'encontre de la mesure (métaphysique) du monde, de l'univers et de tout ce qui y est contenu.
-
tu es assez petit garçon pour avoir en tête ces vieilleries
Valeurs "traditionnelles" vs valeurs nouvelles (incarnées par la philosophie et la rhétorique).
-
ces hommes habiles et pleins de sens, dont pas un, par économie, ne se fait jamais raser, ni ne se parfume, ni ne va aux bains pour se laver
Ils ne prennent pas soin de leur corps, car ils préconisent le soin de l'esprit (ou de l'âme) -- entretenir l'esprit plutôt que le corps (dans ce cas-ci).
-
« Si tu y restais pendu », quelle mauvaise manière de parler, et les lèvres largement ouvertes !
Ce qui importe, ce n'est pas le contenu de ce qui est dit, mais la manière de le dire, la manière de parler (donc, la forme). Pour convaincre, il n'y a pas besoin de dire vrai, mais de bien défendre la position prise.
-
Comment donc, si la justice existe, Zeus n’a-t-il pas péri pour avoir enchaîné son père ?
Questionnement de tout, même de ce qui relève des mythes.
-