NOTE DE SYNTHÈSE POUR L'AUDITION DES RESPONSABLES DU CONSEIL D’ORIENTATION DES POLITIQUES DE JEUNESSE (COG)
Date : [Date de l'audition - non spécifiée dans la source, utiliser la date d'aujourd'hui si nécessaire] Objet : Présentation des travaux, priorités et recommandations du COG en matière de politiques de jeunesse, d'insertion et d'éducation populaire.
Introduction
Cette note de synthèse présente les points clés soulevés lors de l'audition des responsables du Conseil d’orientation des politiques de jeunesse (COG).
Le COG, commission administrative indépendante consultative placée auprès du Premier ministre, a pour mission de coordonner et évaluer les politiques publiques relatives à la jeunesse, à l'insertion des jeunes et à l'éducation populaire.
Créé en 2016 et renouvelé en 2021, il vise à être un lieu de dialogue essentiel face à un sentiment de non-écoute exprimé par une partie significative de la jeunesse (notamment manifesté par un taux d'abstention élevé chez les 18-24 ans).
1. Mission et Fonctionnement du COG
- Le COG est composé de 108 membres bénévoles, répartis en huit collèges représentatifs de la diversité des acteurs des politiques de jeunesse (État, collectivités, jeunes et leurs organisations, associations, acteurs de l'insertion, partenaires sociaux).
- Ses travaux s'organisent en deux commissions : Insertion des Jeunes et Éducation Populaire.
- Le COG travaille sur des approches thématiques ou par dispositif (Contrat d'engagement jeune, accès au logement, réforme de l'assurance chômage, Service Civique, SNU, etc.).
- Les travaux du COG visent à formuler des recommandations pour améliorer les politiques en faveur des jeunes, même si ses recommandations ne sont pas toujours suivies par les responsables politiques, comme l'a souligné l'intervenant initial.
2. Enjeu Prioritaire du COG : Pérennisation et Moyens
- L'enjeu majeur pour le COG est son inscription dans la durée, nécessitant :
- Une inscription dans la loi.
- La pérennisation de ses moyens, actuellement limités (deux ETP au Secrétariat Général, budget de fonctionnement rattaché aux crédits "Jeunesse et Vie Associative").
3. Regard Général sur les Politiques de Jeunesse Récentes
- Constat d'une "politique de dispositifs" : Les politiques en faveur des jeunes sont souvent abordées via une succession de dispositifs variés (SNU, CEJ, obligation de formation, vacances apprenantes, Un jeune une solution, etc.), qui peuvent se cumuler.
- Manque de coordination interministérielle : C'est un point "prégnant" et regrettable. Le Comité Interministériel à la Jeunesse (CIJ) n'a pas été réuni depuis 2015, malgré les appels récurrents du COG et d'autres organisations. La coordination interministérielle est jugée "un prérequis essentiel pour avoir des politiques de jeunesse davantage intégrées".
- Déficit de concertation avec les collectivités territoriales et acteurs de terrain : Malgré la loi Égalité Citoyenneté de 2017 prévoyant un "chef de file" régional pour organiser l'action commune des collectivités en matière de jeunesse, sa mise en place est "assez inégale" et ne remporte pas un "franc succès". Le COG note un déficit de concertation entre l'État et les collectivités, mais aussi entre les différents niveaux de collectivités et les acteurs associatifs/organisations de jeunesse.
- Les jeunes "pas systématiquement, voire quasiment très rarement associés" aux politiques qui les concernent : Ceci contredit l'esprit de l'article 54 de la loi Égalité Citoyenneté qui prévoyait un "processus de dialogue structuré entre les jeunes, les représentants de la société civile et les pouvoirs publics" pour l'élaboration, la mise en œuvre, le suivi et l'évaluation des politiques de jeunesse. Le "dialogue structuré" est une méthode essentielle visant à améliorer les politiques publiques en incitant le dialogue entre les jeunes citoyens, la société civile et les pouvoirs publics.
- Travaux post-COVID : En réaction à la crise sanitaire, le COG a produit un rapport intitulé "Les grands défis des années à venir pour les jeunesses", formulant plus de 181 recommandations dans huit domaines prioritaires (culture, loisir, emploi, engagement, participation, éducation, logement, mobilité géographique, santé). Ce rapport témoigne d'un effort global d'analyse et de propositions.
4. Focus sur l'Éducation Populaire
- Fragilité économique du secteur : Le COG met en exergue la "fragilité économique du secteur de l'éducation populaire", à qui l'on demande un "investissement très fort" tout en créant des "logiques concurrentielles" (mentionnées à propos du Service Civique ou du SNU).
- Rapports clés :"Comment mieux coopérer l’éducation populaire et l’école pour former des jeunes citoyens actifs" (2020) : Ce rapport souligne que la formation citoyenne ne peut reposer uniquement sur l'éducation formelle ou l'éducation populaire, mais nécessite une "marge de progression pour construire une formation qui associe ces deux champs". Il préconise de "penser la formation citoyenne de manière plus globale en valorisant les apports de l'éducation populaire".
- "Relancer et généraliser les projets éducatifs territoriaux" : Ce rapport appuie l'idée que les Projets Éducatifs Territoriaux (PEDT) sont un outil pertinent pour une "politique éducative transversale" impliquant tous les acteurs (écoles, associations, élus, parents).
- Facteurs de fragilisation :Généralisation des marchés publics : Entraîne une "mise en concurrence entre des associations elles-mêmes", une potentielle "perte de qualité des actions" due à la primauté du critère financier, et une "perte de sens"/fragilisation du secteur associatif local à long terme.
- Recours croissant aux appels à projet : Bien que soutenant l'innovation, ils sont "rarement accompagnés d'un travail évaluatif scientifique et robuste" et interviennent souvent avec une "baisse du soutien au fonctionnement des associations par des subventions pluriannuelles", conduisant à des "moyens RH en diminution" alors que les attentes envers le secteur associatif augmentent.
- Leviers pour relancer l'éducation populaire et sa mission émancipatrice :Reconnaître et valoriser la "juste place" et la "plus-value" de l'éducation populaire.
- Développer la "continuité éducative" entre le champ scolaire et l'éducation populaire, avec un cadre juridique sécurisant pour les acteurs associatifs et une valorisation de l'engagement des jeunes.
- Permettre l'expression de "différentes pédagogies" et mobiliser les acteurs pour créer une "communauté éducative".
- Développer les "pédagogies actives" et les "méthodes participatives".
- Construire l'éducation à la citoyenneté en se basant sur les "réalités et les ressources du territoire".
- Développer la "capacité d'agir et de s'engager des jeunes", en valorisant leurs compétences.
- Question de la définition de l'éducation populaire : L'absence d'une définition claire est un frein ; une reconnaissance législative pourrait passer par une définition.
- Crise des vocations d'animateurs :Le rapport "Quels animateurs pour nos jeunesses" (2024) identifie deux types d'animateurs (occasionnels/BAFA et professionnels/diplôme professionnel) et note l'utilisation abusive du BAFA comme seul diplôme pour des postes pérennes.
- Préconisations :Bien différencier les rôles.
- Lutter contre l'utilisation abusive du BAFA.
- Mieux valoriser la "fonction éducative des animateurs" notamment par rapport à l'enseignement scolaire.
- Revoir la rémunération des animateurs professionnels.
- Lutter contre le travail partiel contraint.
- Réfléchir au bien-fondé du Contrat d'Engagement Éducatif (CEE), "réglementation dérogatoire au droit du travail".
5. Focus sur l'Insertion des Jeunes et l'Accès à l'Autonomie
- Travaux sur la Garantie Jeune et le Contrat d'Engagement Jeune (CEJ) : Le COG note les avancées mais insiste sur les besoins des "jeunes les plus éloignés", un "public particulièrement fragile" à "sécuriser".
- Recommandations pour le CEJ :Supprimer le délai de carence de 6 mois entre deux contrats.
- Supprimer la limitation de durée (actuellement 12 à 18 mois) pour que l'accompagnement devienne un "véritable droit" permettant aux jeunes vulnérables d'accéder à l'autonomie.
- Augmenter le montant de l'allocation (actuellement 552,29 €) jugé insuffisant pour "vivre décemment" (seuil de pauvreté à 1396 €). L'objectif est de "sortir du dispositif pour aller vers le droit inconditionnel" pour subvenir aux besoins fondamentaux (se nourrir, se loger, se vêtir, se soigner).
- Principe de "droit universel" vs "cumul de dispositifs" : Le COG estime que le cumul de dispositifs n'est pas toujours pertinent et que l'ouverture de droits universels est un "avantage conséquent" pour les jeunes.
- Revenu Minimum Garanti Inconditionnel : Le COG a formulé de manière "répétée" cette recommandation. Plusieurs scénarios ont été étudiés (Revenu Universel d'Autonomie pour les 18-25 ans, Revenu Universel d'Émancipation sur critères de ressources, Revenu Universel d'Insertion pour les 18-25 ans). L'objectif est d'inscrire le jeune comme un "citoyen à part entière et pas juste un citoyen en devenir".
- Insertion des jeunes décrocheurs : Le COG a rendu un avis sur l'obligation de formation avec 35 recommandations, insistant sur l'articulation entre les différents acteurs et politiques, et sur la nécessité de surmonter les problèmes de repérage et la "course aux chiffres".
- Jeunes sortant de l'Aide Sociale à l'Enfance (ASE) : Ce public fragile (plus de 35000 majeurs concernés) rencontre des difficultés majeures d'accès aux études, au logement, aux soins. Le rapport "Laissez-nous rêver" (48 propositions concrètes) vise à améliorer leur prise en charge effective suite à la loi de 2022.
6. Engagement des Jeunes
- Il n'y a pas de "crise de l'engagement", mais une "évolution des formes d'engagement" (pétitions, manifestations, associations, vote, etc.). Il y a un enjeu à "reconnaître la diversité de ces formes d'engagement" et à le "valoriser".
- Service National Universel (SNU) : Le COG a émis cinq avis sur ce dispositif. Si les objectifs initiaux (transmettre les valeurs républicaines, société de l'engagement, cohésion nationale) sont partagés, les modalités de mise en œuvre suscitent des débats. Le COG a proposé des pistes d'amélioration dès 2017.
- Points d'alerte soulevés par le COG : Pilotage, rôle des services de l'État, gouvernance, association des acteurs de terrain, articulation avec les autres outils d'engagement (risque de "logique concurrentielle" avec le Service Civique), relation avec le BAFA, moyens humains et financiers du déploiement (inquiétude sur les locaux, charge de travail), mixité sociale (sous-représentation des jeunes de filières professionnelles/alternance, sur-représentation des jeunes de parents issus de corps en uniforme).
- Un dispositif dont la définition est floue : Le SNU est souvent défini par la négative ("ni la colo, ni l'école, ni militaire"), rendant sa perception difficile pour les jeunes interrogés ("trop militaire, pas assez militaire").
- Recommandation du COG (dernier avis) : Proposé parmi d'autres scénarios, l'"exonération de SNU les jeunes déjà engagés" pour reconnaître la validité des autres formes d'engagement.
- Reconnaissance de l'engagement : Pouvoir encourager la participation citoyenne et l'engagement des jeunes "quelle que soit sa forme", car cet engagement n'est "pas forcément valorisé et reconnu".
7. Santé Mentale
- La crise du COVID-19 a mis en exergue une "précarité qui était existante", notamment en matière de santé mentale. Les jeunes vont "aussi mal qu'il y a 10 ans", mais la prise de conscience et la mise en lumière du problème sont plus récentes.
- La commission de l'insertion travaille actuellement sur la santé mentale des jeunes dans le parcours d'insertion sociale et professionnelle.
- La précarité étudiante aggrave la détresse psychologique (mal-logement, saut de repas, recours aux distributions alimentaires).
- La question de l'accès au suivi psychologique et psychiatrique est cruciale, notamment en pédopsychiatrie où les délais d'attente sont longs.
- Les dispositifs comme MonPsy ou Fil Santé Jeunes existent mais leur efficacité face aux obstacles (coût, tabou, accès) doit être améliorée.
8. Autres Thématiques Abordées
- Précarité étudiante : Le coût de la rentrée, le logement, l'alimentation, la nécessité de travailler pour subvenir aux besoins (souvent au détriment des études) sont des points alarmants. Le COG a recommandé la mise en place d'un revenu minimum garanti inconditionnel pour permettre aux étudiants de se concentrer sur leurs études.
- Sport : Le sport est un vecteur de valeurs et de construction pour les jeunes. La baisse du nombre de licenciés sportifs scolaires (USEP) est préoccupante. Le Pass'Sport est une aide, mais son montant (50€ pour un coût moyen de licence/équipement à 150€) et son périmètre (inclure les associations sportives scolaires) sont à revoir. L'importance de la pratique physique et du bien-être au contact de la nature a également été soulignée, en complément des pratiques sportives plus compétitives.
- Jeunes ruraux : Ils représentent un quart des 18-24 ans, sont attachés à leur territoire mais font plus d'études courtes et professionnelles, entrant plus tôt sur le marché du travail. Ils rencontrent des difficultés d'accès à la mobilité et aux services. Les inégalités hommes-femmes y sont plus marquées. La coordination des politiques publiques est plus compliquée et la confiance dans les institutions plus basse. La proposition de donner une compétence jeunesse aux intercommunalités est une piste de réflexion.
- Enfants placés : Ce public particulièrement vulnérable (400 000 enfants concernés) est "plus que d'autres enfants Les enfants de la République". Ils sont sur-représentés parmi les décrocheurs, souffrent de problèmes de santé physique et mentale. Le COG a réalisé des travaux pour améliorer leur prise en charge, invitant à consulter son rapport "Laissez-nous rêver". Il est jugé "criminel" de généraliser le SNU (coût estimé à 5 milliards d'euros) alors que la protection de l'enfance (10 milliards d'euros) manque de moyens.
- Transversalité des politiques jeunesse : Le constat d'un ministère de la Jeunesse affaibli, doublé d'autres portefeuilles et d'un ministre qui souhaite rester maire, interroge sur la capacité à mener une politique transversale réellement puissante. L'idée d'un "ministère de la Jeunesse" avec un secrétaire d'État à l'éducation nationale a été évoquée de manière provocatrice pour souligner l'importance de la transversalité.
- Prévention et suivi des jeunes en difficulté : La prévention est clé face à la vulnérabilité. Renforcer les messages de prévention à l'école, améliorer le suivi psychologique et psychiatrique, mieux faire fonctionner les petites équipes en contact avec les jeunes repérés sont essentiels. L'effectivité des Conseils Locaux de Sécurité et de Prévention de la Délinquance (CLSPD) est questionnée.
- Initiatives territoriales innovantes : Le COG suit ces initiatives (exemple du certificat universitaire pour les chargés d'information jeunesse à Lille) et pourrait accompagner leur extension si elles sont jugées pertinentes.
Conclusion
L'audition a mis en évidence la richesse des travaux du COG et la pertinence de ses analyses face aux défis multiples auxquels la jeunesse française est confrontée. Les appels à une meilleure coordination interministérielle, à un dialogue structuré avec les jeunes et les acteurs de terrain, à une reconnaissance et un soutien renforcés de l'éducation populaire, à l'évolution du modèle du CEJ vers un droit inconditionnel, et à la mise en place d'un revenu minimum garanti inconditionnel sont autant de pistes majeures soulevées par le COG.
La question de la pérennisation des moyens du COG apparaît comme un préalable essentiel pour lui permettre de poursuivre et d'amplifier ses missions d'expertise et d'évaluation au service des politiques de jeunesse.