106 Matching Annotations
  1. Nov 2025
    1. Synthèse de la Conférence : Les Chiffres Mesurent-ils l’Essentiel ?

      Résumé

      Cette conférence inaugurale du cycle "Mesurer la valeur de notre monde" explore la tension croissante entre la quantification omniprésente de la société et la perception d'une perte de valeur.

      Les intervenants, issus des mathématiques, de la sondologie, de la comptabilité et de la philosophie, convergent vers une conclusion centrale :

      les chiffres, en eux-mêmes, ne mesurent pas l'essentiel.

      Leur véritable signification et leur pertinence dépendent entièrement des modèles, des conventions et des hypothèses qui les sous-tendent.

      Loin d'être objectifs ou neutres, ces cadres de référence sont le fruit de choix conceptuels, sociaux et souvent politiques, qui méritent un examen critique approfondi.

      Les principaux points à retenir sont les suivants :

      La primauté du modèle : Pour le mathématicien Cédric Villani, l'erreur la plus grave ne réside pas dans le calcul, mais dans le modèle de représentation du monde.

      Les chiffres ne sont que le produit final d'un raisonnement, de formules et d'hypothèses qui constituent le véritable cœur de l'analyse.

      Le contexte est clé :

      Le sondeur Jean-Daniel Lévy insiste sur le fait qu'un chiffre d'opinion isolé est dénué de sens.

      La compréhension émerge de l'analyse des tendances ("un film plutôt qu'une photo"), de la segmentation des données et, crucialement, de l'articulation entre les mesures quantitatives et les études qualitatives qui révèlent les logiques profondes des individus.

      La comptabilité comme outil d'action : L'expert-comptable Alexandre Rambaud déconstruit l'idée d'une comptabilité comme miroir objectif de la réalité.

      Il propose une vision instrumentale, notamment en comptabilité écologique, où les chiffres ne visent pas à "valoriser" la nature, mais à quantifier les moyens nécessaires à sa préservation pour guider l'action.

      La libération de la domination :

      La philosophe Valérie Charolles appelle à se "libérer de la domination des chiffres" en prenant conscience de leur nature construite.

      Elle met en lumière "l'innétrisme" (l'illettrisme numérique) qui nous rend vulnérables aux inférences trompeuses et plaide pour une réappropriation citoyenne des conventions (comptables, statistiques, électorales) qui façonnent notre monde.

      1. Introduction : La Quantification du Monde

      La conférence s'ouvre sur le constat d'une "quantification du monde" généralisée.

      Bettina Laville, présidente de l'IEA de Paris, souligne le paradoxe contemporain : alors que tout est mesuré – des sondages d'opinion quotidiens au reporting extra-financier des entreprises, jusqu'aux indicateurs de bonheur – une impression de "perte de valeur" prédomine.

      Ce sentiment naît de la crainte que le chiffre, en envahissant tous les domaines, n'efface "la valeur au sens de ce qui justement ne se compte pas".

      Ce cycle de cinq conférences a pour ambition d'explorer ce phénomène à travers plusieurs thématiques :

      1. Introduction générale (cette séance)

      2. La mesure de la nature

      3. La mesure des villes

      4. La mesure de l'égalité

      5. La mesure de la valeur elle-même (bonheur, etc.)

      2. La Primauté du Modèle sur le Chiffre : La Perspective du Mathématicien

      Cédric Villani, professeur de mathématiques et médaillé Fields, recadre d'emblée le débat en affirmant que l'essence des mathématiques réside dans le raisonnement et non dans le calcul.

      Le Raisonnement avant le Calcul

      Contrairement à l'image populaire du mathématicien comme "bon calculateur", la discipline, depuis la Grèce antique, se concentre sur "le raisonnement qui mène au calcul, pas dans le résultat lui-même".

      À l'ère des ordinateurs, de nombreux mathématiciens excellent dans l'échafaudage de concepts et de relations logiques, même s'ils sont "des brêles en calcul".

      Ce qui importe, ce sont les formules, les hypothèses et l'architecture intellectuelle sous-jacente.

      Leçons de l'Histoire des Sciences

      Cédric Villani illustre sa thèse par deux exemples historiques majeurs où l'erreur ne provenait pas du calcul mais du modèle :

      Cas d'Étude

      Le Modèle Sous-jacent

      L'Erreur et sa Nature

      Conclusion

      La Définition du Mètre (Révolution Française)

      Le mètre est défini comme la 40 millionième partie du tour de la Terre. Un projet scientifico-politique universaliste.

      Une erreur de mesure de 0,2 millimètre, vécue comme une "honte" par ses auteurs (Delambre et Méchain).

      L'erreur était minuscule, mais elle a tourmenté Méchain toute sa vie.

      L'erreur était dans la précision de la mesure, mais le modèle conceptuel était révolutionnaire et a fondé le système d'unités universel.

      Le Calcul de l'Âge de la Terre (19e siècle)

      Un modèle de refroidissement d'une Terre supposée solide, basé sur les travaux de Fourier.

      Une erreur monstrueuse. Le calcul de Lord Kelvin aboutissait à 24 millions d'années, alors que l'âge réel est de 4,5 milliards d'années.

      L'erreur venait entièrement du modèle de départ.

      La Terre possède un intérieur liquide générant de la convection, ce qui change radicalement les calculs.

      Il cite à ce propos Thomas Huxley : "La mathématique peut se comparer à un moulin d'une facture exquise [...] cependant ce que l'on en tire dépend de ce que l'on y a mis [...] des pages de formule ne fourniront pas un résultat fiable à partir de données imprécises."

      Les Hypothèses Politiques derrière les Chiffres

      Les chiffres utilisés dans le débat public ne sont jamais neutres ; ils reposent sur des hypothèses et des choix, souvent politiques.

      L'objectif de 2 tonnes de carbone par an et par individu : Ce chiffre repose sur une hypothèse politique forte, celle d'une répartition "également à travers tous les citoyens de l'humanité" du droit à émettre du carbone.

      Le calcul de Jean-Marc Jancovici sur les vols en avion : L'idée que chaque personne ne devrait prendre l'avion que quatre ou cinq fois dans sa vie est le résultat d'un calcul basé sur des hypothèses scientifiques et politiques, notamment sur la répartition de cet effort.

      Le rapport Meadows (Club de Rome, 1972) : Ce célèbre modèle du monde reliait cinq grands compartiments (démographie, pollution, industrie, etc.) via 140 équations.

      Ses auteurs reconnaissaient eux-mêmes l'impossibilité de modéliser des facteurs essentiels comme "la volonté politique d'agir" ou "le sentiment de justice".

      Ce qu'il Reste à Mesurer

      Interrogé sur ce qu'il regretterait de ne pas voir mesuré, Cédric Villani évoque le concept de "viscosité" de la société : "tout ce qui dans une société empêche d'agir".

      Cela inclut les rapports de pouvoir établis, les lourdeurs administratives, les procédures dilatoires, etc.

      Mesurer cette force d'inertie qui dissipe l'énergie du changement serait, selon lui, un indicateur fascinant.

      3. L'Opinion en Chiffres : Entre Mesure et Compréhension

      Jean-Daniel Lévy, directeur de l'institut Harris Interactive, apporte la perspective du sondeur, en soulignant la complexité cachée derrière les chiffres d'opinion.

      L'Immense Partie Immergée des Sondages

      Il révèle que les sondages publiés dans les médias représentent moins de 0,1 % de l'activité de son institut.

      L'essentiel du travail (99,9 %) est confidentiel et concerne le marketing, l'évaluation de produits ou les études pour des acteurs publics et privés.

      Nous sommes donc "sans le savoir entourés de formules mathématiques qui sont appelées à régir notre vie".

      Dépasser le Chiffre Unique

      Un chiffre de sondage ne doit jamais être considéré comme une "vérité absolue". Pour lui donner du sens, deux approches sont indispensables :

      1. Faire un film, pas une photographie : Il est crucial de poser la même question à intervalles réguliers pour observer les dynamiques et les évolutions d'opinion, par exemple sur une réforme comme celle des retraites.

      2. Analyser le détail des résultats : La véritable information se trouve dans la segmentation des données (selon le genre, l'âge, la catégorie sociale, la proximité politique, etc.), qui permet de comprendre les fractures et les logiques spécifiques à chaque groupe.

      L'Articulation Essentielle du Quantitatif et du Qualitatif

      Les chiffres mesurent, mais ne permettent pas toujours de comprendre.

      Pour saisir les logiques profondes, il faut recourir à des méthodes qualitatives (groupes de discussion, entretiens).

      Exemple de la réforme des retraites : Les études qualitatives ont révélé que pour beaucoup de Français, le débat ne portait pas sur les retraites elles-mêmes, mais sur le sens et la pénibilité du travail.

      Exemple des valeurs fondamentales : Les enquêtes qualitatives montrent que les grandes éruptions sociales en France se structurent souvent autour de deux notions fondatrices non-explicites : l'égalité (héritage de 1789) et la solidarité/service public (héritage de 1945).

      Les Chiffres Invisibles et la Subjectivité de la Mesure

      Les signaux faibles de 2017 : L'analyse des chiffres électoraux de 2017 aurait dû tempérer l'idée d'une adhésion massive au projet d'Emmanuel Macron.

      Deux données clés ont été sous-estimées : la baisse de la participation entre les deux tours (un fait inédit hors 1969) et le record absolu de 4 millions de votes blancs ou nuls, signifiant que 12 % des votants présents au second tour refusaient le choix proposé.

      La formulation des questions : Le résultat d'un sondage dépend étroitement de la manière dont la question est posée.

      Les cotes de confiance d'Emmanuel Macron peuvent ainsi varier de 29 % à 45 % selon l'institut, car les questions diffèrent subtilement ("faites-vous confiance pour...", "avoir de bonnes idées", "conduire le pays", etc.).

      En conclusion, les chiffres sont une "condition nécessaire mais non suffisante". Ils fournissent des repères, mais se fier exclusivement à eux sans analyse contextuelle et qualitative mène à des "erreurs remarquables".

      4. La Comptabilité comme Outil d'Action

      Alexandre Rambaud, titulaire de la chaire de comptabilité écologique, propose de voir la comptabilité non pas comme une technique de calcul, mais comme un système de représentation et de gouvernance.

      Les Quatre Fonctions de la Comptabilité

      Le chiffre n'est que la dernière étape du processus comptable, qui repose sur trois fonctions fondamentales préalables :

      1. Prendre en compte : Décider de ce qui est important, définir les objets à suivre et les classer dans des catégories.

      C'est un acte de représentation et de modélisation.

      2. Être comptable de ses actes : Lier les actions à des responsabilités (redevabilité) et en garder la trace.

      3. Rendre des comptes : Établir des rapports et des codes pour permettre la discussion et la prise de décision au sein d'une gouvernance.

      4. Compter : Utiliser des instruments chiffrés pour rendre la complexité d'une organisation assimilable et gérable.

      Mesure Instrumentale contre "Juste Valeur"

      La comptabilité est traversée par une opposition fondamentale :

      Le Measurement (la mesure) : Une approche instrumentale où les chiffres (quantitatifs et qualitatifs) sont des ordres de grandeur définis par des conventions internes pour piloter une organisation.

      La Valuation (la valorisation) : L'idée que le marché peut révéler une "juste valeur" objective d'un actif, y compris des ressources naturelles.

      Cette approche vise une sorte de transparence, une représentation absolue du monde en chiffres.

      La Proposition de la Comptabilité Écologique

      La chaire de comptabilité écologique se positionne fermement du côté du measurement.

      Elle rejette la tentation de "chiffrer un écosystème", ce qui n'aurait aucun sens.

      Son projet est d'utiliser les chiffres pour accompagner et outiller l'action de préservation :

      Au lieu de "valoriser" un écosystème, elle cherche à calculer les coûts nécessaires pour le préserver ou le restaurer.

      Au lieu de chercher une "juste valeur" de la nature, elle se demande combien il faudrait payer un agriculteur pour qu'il puisse à la fois vivre décemment et garantir le bon état écologique de ses sols.

      L'objectif n'est pas de mesurer l'essentiel dans l'absolu, mais de "mesurer ce qui est essentiel pour permettre de protéger ce que l'on a à protéger".

      5. Se Libérer de la Domination des Chiffres

      La philosophe Valérie Charolles conclut en appelant à une prise de distance critique face à l'hégémonie des chiffres.

      Le Défi de l' "Innétrisme" et les Inférences Trompeuses

      Nous sommes souvent mal armés pour interpréter les chiffres, ce qui conduit à des "inférences trompeuses".

      La communication est asymétrique entre les experts qui produisent les chiffres et le public qui les reçoit.

      Exemple de la croissance : Annoncer un taux de croissance de 6,8 % en Éthiopie contre 1,7 % en France est trompeur.

      Rapporté par habitant, le gain de richesse est 15 fois supérieur en France (705 $) qu'en Éthiopie (50 $).

      Présentation des données : Dire que la France a une croissance de 1,7 % est factuellement équivalent à dire que son PIB "est sur une tendance de doublement en 43 ans".

      La seconde formulation change radicalement la perception de la situation.

      Chiffres et Nombres : une Distinction Cruciale

      Il faut distinguer :

      Les nombres : Des entités théoriques abstraites, opérant par raisonnement pur (domaine des mathématiques).

      Les chiffres : Des grandeurs mesurées ou des quantités calculées qui visent à rendre compte du réel.

      Ils ne peuvent exister sans un ensemble de conventions (définitions, étalons de mesure, modèles).

      L'Analyse Critique des Conventions : Là où Tout se Joue

      La véritable analyse doit porter sur les normes, modèles et conventions qui servent à produire les chiffres, car "c'est là que tout se joue".

      Ces conventions peuvent être datées, limitées ou biaisées.

      La comptabilité d'entreprise : Son cadre, hérité de la Renaissance, traite le travail comme une charge et non comme une valeur, et privilégie une perspective de liquidation à court terme.

      Les modèles financiers : Ils sous-estiment systématiquement la probabilité des événements extrêmes (crises, krachs), comme l'a montré Benoît Mandelbrot.

      Les systèmes électoraux : La manière de compter les voix (proportionnelle, majoritaire) détermine la composition des parlements et donc les politiques menées.

      Le problème n'est donc pas de rejeter les chiffres, mais de "se libérer de leur domination".

      Cela implique de comprendre que nous avons un pouvoir sur eux, car ce sont des représentations politiques et sociales qui décident des lois électorales, des normes comptables ou des modes de calcul du PIB.

      La voie à suivre est de renforcer la culture statistique citoyenne et de soumettre les cadres de référence à un débat démocratique constant.

    1. Synthèse : Le Côté Sombre de la Morale

      Résumé

      Cette synthèse examine les thèses présentées par Jean Decety sur ce qu'il nomme "le côté sombre de la morale".

      L'argument central est que si la morale est un pilier de la coopération sociale, elle possède une facette destructrice.

      Lorsque des croyances se transforment en convictions morales absolues, elles deviennent un puissant moteur de dogmatisme, d'intolérance et de violence.

      Ces convictions, caractérisées par un sentiment d'objectivité, un consensus social perçu et une stabilité temporelle, transcendent les idéologies politiques et les causes spécifiques.

      L'objectif de la recherche de Decety est de développer un modèle théorique unifié, en s'appuyant sur la psychologie, les neurosciences, l'anthropologie et la théorie de l'évolution, pour expliquer les mécanismes psychologiques universels qui sous-tendent ce phénomène.

      Le processus clé est la "moralisation", qui convertit des préférences sociales en valeurs sacrées, engageant le système de récompense du cerveau.

      Ce processus est souvent associé à une faible sensibilité métacognitive, où les individus les plus extrêmes sont paradoxalement les moins informés sur le sujet, mais les plus convaincus de leur savoir.

      En moralisant une question, on la rend imperméable à l'analyse coûts-bénéfices et à tout compromis, ce qui conduit à une polarisation accrue et entrave le dialogue démocratique.

      1. La Double Nature de la Morale

      La morale est généralement perçue comme un produit de la co-évolution gènes-culture, spécifique à Homo sapiens, qui apporte des bénéfices clairs à la vie sociale.

      Le Côté Positif : La morale est un mécanisme essentiel qui :

      ◦ Régule les échanges interpersonnels.   

      ◦ Facilite la coexistence et la coopération.   

      ◦ Minimise ou canalise l'agression.   

      ◦ Équilibre les conflits entre les intérêts individuels et collectifs.   

      ◦ Motive les actions collectives pour le bien commun, comme le mouvement pour le droit de vote des femmes ou les droits civiques.

      Le Côté Sombre : C'est l'aspect qui intéresse principalement Jean Decety.

      La morale, lorsqu'elle est poussée à l'extrême sous forme de convictions inébranlables, peut :

      ◦ Alimenter le dogmatisme et l'intolérance.  

      ◦ Motiver la violence et des actions collectives extrêmes.   

      ◦ Justifier le vigilantisme, où des individus s'arrogent le droit de rendre la justice eux-mêmes.

      2. La Conviction Morale : Définition et Conséquences

      La conviction morale est le concept central de l'analyse.

      Elle est définie comme une croyance forte et absolue qu'une chose est intrinsèquement bonne ou mauvaise, morale ou immorale.

      Caractéristiques

      Une conviction morale est perçue par celui qui la détient comme :

      Absolue : Elle ne tolère aucune variation ou exception, quel que soit le contexte.

      Objective : Elle est considérée comme une vérité fondamentale de la réalité, applicable à tous, partout et à tout moment.

      Conséquences Négatives

      Lorsqu'une forte conviction morale est associée à la perception d'un large consensus au sein de sa communauté, elle peut conduire à :

      L'intolérance : Un refus d'accepter des points de vue divergents.

      Le dogmatisme : Un état d'esprit inflexible et un refus de l'analyse critique.

      La violence : L'histoire et l'actualité montrent que la violence est souvent utilisée pour maintenir un ordre moral perçu.

      Les auteurs de génocides, de guerres ou de tortures pensent fréquemment que leurs actions sont légitimes.

      Exemples Concrets Citées

      Plusieurs cas illustrent comment des individus aux idéologies très différentes partagent des mécanismes psychologiques similaires fondés sur la conviction morale :

      Cas

      Description

      Motivation Morale sous-jacente

      Émeutes au Nigeria (2002)

      Plus de 220 personnes tuées suite à la publication d'un article de journal jugé offensant envers le prophète Mahomet.

      Défense de l'honneur religieux.

      Lorna Green (Wyoming, USA)

      Condamnée pour avoir incendié une clinique pratiquant l'avortement.

      La vie est sacrée et l'avortement est un meurtre.

      Activistes climatiques

      Utilisation de "tactiques de choc" et de protestations violentes, comme celles contre un projet d'aéroport.

      Urgence de lutter contre le réchauffement climatique.

      Kathleen Stock (Angleterre)

      Professeure de philosophie harcelée et contrainte à la démission par des activistes transgenres.

      Conviction que l'affirmation selon laquelle le sexe est une réalité biologique est une attaque inacceptable.

      Terrorisme

      Les individus commettant des actes terroristes sont souvent fortement convaincus de la justesse de leur cause (divine ou politique).

      Accomplissement d'un devoir moral supérieur.

      3. L'Architecture Fonctionnelle de la Conviction Morale

      Decety propose un modèle fonctionnel pour expliquer la formation et les effets des convictions morales, basé sur l'interaction de plusieurs composantes.

      Composantes Clés

      1. Objectivité : La croyance que ses propres valeurs sont des vérités objectives et universellement applicables.

      2. Consensus Social : La perception que les membres de sa communauté ou de sa coalition partagent les mêmes croyances, ce qui renforce la conviction.

      3. Stabilité Temporelle : Plus une croyance est perçue comme ayant une base morale, plus elle reste stable dans le temps.

      Le Mécanisme Central : La Conversion des Préférences en Valeurs

      Le moteur de la conviction morale est sa capacité à transformer des préférences sociales en valeurs sacrées.

      Préférence : "Je choisis de ne pas manger de viande issue de l'élevage industriel." (Problème personnel)

      Valeur Moralisée : "Personne ne devrait manger de viande issue de l'élevage industriel car c'est immoral." (Problème moral universel)

      Les valeurs agissent comme des forces de motivation puissantes qui fixent des objectifs, guident les décisions et suscitent l'action.

      Le Substrat Neurobiologique

      • Les valeurs, y compris les valeurs morales, sont traitées par le système de récompense et de valuation du cerveau.

      Il n'existe pas de circuit cérébral spécifique à la morale ; celle-ci utilise les mêmes mécanismes que ceux qui attribuent une valeur à la nourriture ou à un partenaire.

      • La spécificité humaine réside dans la capacité unique de notre espèce à attribuer une valeur à des objets abstraits et arbitraires, comme des idéologies, des symboles (drapeau), une religion ou une cause politique.

      4. Mécanismes Psychologiques : Métacognition et Dogmatisme

      Les convictions morales fortes sont souvent associées à une faible capacité de réflexion critique.

      Métacognition : La capacité de réfléchir à ses propres processus de pensée.

      La sensibilité métacognitive mesure la corrélation entre la confiance d'une personne en sa réponse et la justesse réelle de cette réponse.

      Faible Sensibilité Métacognitive : Les recherches montrent que les individus dogmatiques et moralement convaincus ont souvent une faible sensibilité métacognitive.

      Il y a un décalage entre leur niveau de confiance (très élevé) et leurs connaissances réelles (souvent faibles).

      L'Exemple des OGM : Une étude menée aux États-Unis, en Allemagne et en France a montré que les opposants les plus extrêmes aux OGM étaient ceux qui avaient le moins de connaissances en biologie, mais qui pensaient en savoir le plus.

      C'est une illustration du principe : "Moins ils en savent, plus ils pensent savoir".

      5. Les Défis de la "Moralisation" et l'Analyse Coûts-Bénéfices

      Une fois qu'une question est "moralisée", elle devient extrêmement difficile à débattre rationnellement.

      Échec de l'Analyse Coûts-Bénéfices : Les convictions morales, en devenant des valeurs sacrées, empêchent toute forme de compromis ou d'analyse pragmatique des coûts et des bénéfices.

      Par exemple, pour un militant anti-avortement absolu, aucun argument contextuel (viol, âge de la mère, malformation du fœtus) ne peut justifier une exception.

      Polarisation et Démocratie : La moralisation excessive des débats publics conduit à une polarisation extrême, rendant le dialogue constructif et la recherche de compromis – essentiels à la vie en société – presque impossibles.

      Approche Proposée : Decety suggère que, même pour des sujets moralisés, encourager une analyse coûts-bénéfices est une voie pour progresser en tant que société, plutôt que de rester figé dans des positions irréconciliables.

      6. Points Clés de la Discussion (Q&A)

      Distinction entre Morale et Éthique : Pour les besoins de sa recherche sur les mécanismes psychologiques, Decety ne fait pas de distinction fondamentale.

      Il ne s'intéresse pas à ce que les gens devraient faire (éthique prescriptive), mais aux mécanismes qui transforment une préférence en une croyance absolue.

      Signification du terme "Absolu" : Une valeur est absolue lorsqu'elle est insensible au contexte, aux preuves factuelles ou aux circonstances atténuantes.

      L'exemple de l'avortement montre que même face à des scénarios extrêmes, la position morale reste inchangée.

      Perspective sur le Terrorisme : Decety est en accord avec l'idée que les terroristes sont hautement convaincus moralement.

      Cependant, il conteste le terme de "lavage de cerveau" (brainwashed), arguant que leurs actions sont souvent rationnelles au sein de leur propre système de valeurs, de leur histoire et des normes de leur groupe.

    1. L'Illusion du Contrôle à l'Ère de l'Intelligence Artificielle : Synthèse de la Présentation de Helga Nowotny

      Résumé

      Cette note de synthèse analyse les thèmes centraux de la présentation de Helga Nowotny sur l'intelligence artificielle (IA), axée sur le concept de "l'illusion du contrôle".

      L'émergence spectaculaire de l'IA générative, illustrée par ChatGPT, a non seulement surpris les experts par ses performances, mais a également exacerbé une anxiété sociétale profonde liée à la perte de contrôle.

      Ce sentiment est alimenté par les craintes concernant l'automatisation de l'emploi, la désinformation via les "deepfakes", la persistance des biais algorithmiques et la fragmentation de la réalité commune.

      Un point central de l'analyse est la tendance humaine à l'anthropomorphisme, qui consiste à attribuer des intentions à l'IA, un phénomène qui peut avoir des conséquences tragiques.

      La notion de contrôle technologique elle-même est en pleine évolution : après s'être étendue de la simple fonctionnalité de la machine à la sécurité des travailleurs, puis à la protection de l'environnement, elle doit maintenant intégrer l'impact de l'IA sur les capacités cognitives et émotionnelles humaines.

      La présentation met en lumière une concentration économique et de pouvoir sans précédent entre les mains de quelques entreprises technologiques, qui financent 90% de la recherche et du développement en IA, orientant ainsi sa trajectoire au détriment de la recherche publique et fondamentale.

      Face à un monde de plus en plus complexe et potentiellement incompréhensible que nous créons nous-mêmes, la conclusion insiste sur la nécessité d'adopter le scepticisme, une vertu scientifique essentielle, comme antidote aux illusions et pour naviguer de manière éclairée dans cette nouvelle ère.

      --------------------------------------------------------------------------------

      1. L'Avènement de l'IA Générative et la Fin de la Hype

      L'intervention de Helga Nowotny s'inscrit dans le prolongement de son livre de 2021, In AI We Trust, et se concentre sur l'illusion du contrôle face aux développements récents de l'IA.

      L'Expérience ChatGPT : Le lancement de ChatGPT fin 2022 est qualifié d'« expérience déchaînée sans le consentement de personne ».

      Son principal avantage a été de mettre un grand nombre de personnes en contact direct avec une technologie numérique avancée.

      Une Performance Surprenante : La performance de l'IA générative a surpris même les experts, bien qu'ils s'attendaient à son arrivée.

      Plus qu'une Simple Hype : Nowotny soutient que l'engouement actuel pour l'IA n'est pas passager pour deux raisons principales :

      1. Investissements Massifs : Des investissements colossaux sont engagés, créant un pari sur le principe du "trop gros pour faire faillite" (too big to fail).   

      2. Adoption Scientifique : L'IA est déjà en train de transformer la science.

      Des outils comme AlphaFold de DeepMind sont devenus des instruments fantastiques pour les biologistes, et des applications similaires émergent en science des matériaux, en découverte de médicaments, et dans d'autres domaines.

      2. Inquiétudes Sociétales et la Peur Fondamentale de la Perte de Contrôle

      Un malaise généralisé persiste face à l'IA, reposant sur plusieurs craintes interconnectées.

      Automatisation et Emploi : Au-delà de la question de la destruction et de la création d'emplois, le véritable enjeu, selon Nowotny, est notre capacité à inventer de nouvelles tâches à réaliser en collaboration avec l'IA.

      Menaces sur la Démocratie : Les "deepfakes" et les campagnes de désinformation délibérée posent un risque majeur pour les démocraties libérales, créant une situation où personne ne semble avoir le contrôle, sauf ceux qui lancent ces campagnes.

      Biais Algorithmiques : Les biais présents dans les données d'entraînement sont perpétués et amplifiés par les algorithmes.

      Lorsque les gens commencent à croire aux prédictions de ces algorithmes, les biais s'ancrent profondément dans la société.

      Fragmentation Sociale : La personnalisation extrême risque de nous enfermer dans des "réalités personnalisées", nous faisant perdre le terrain commun nécessaire au débat et à la cohésion sociale.

      Tendance à l'Anthropomorphisme : Nous avons une tendance naturelle à attribuer des intentions humaines aux machines.

      La "Posture Intentionnelle" : Le philosophe Daniel Dennett a longuement écrit sur ce qu'il appelle la "posture intentionnelle".   

      Croyances Dangereuses : Cette tendance culmine dans des affirmations choquantes comme « L'IA me connaît mieux que je ne me connais moi-même », transférant un pouvoir quasi métaphysique à la machine.  

      Cas Extrême : Un cas tragique en Belgique a vu une personne souffrant de problèmes mentaux être encouragée au suicide par une application thérapeutique non réglementée, illustrant les dangers extrêmes de cette confusion.

      3. L'Évolution du Concept de Contrôle Technologique

      Le concept de "contrôle" d'une technologie a évolué au fil de l'histoire et fait face aujourd'hui à un défi sans précédent avec l'IA.

      1. Contrôle Opérationnel : Initialement, le contrôle signifiait s'assurer que la technologie fonctionne correctement (maintenance, réparations).

      2. Contrôle de la Sécurité Humaine : Avec l'industrialisation, le contrôle s'est étendu à la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs opérant les machines.

      3. Contrôle Sociétal et Environnemental : L'État-providence a ajouté des législations et des assurances.

      Plus récemment (ces 20-25 dernières années), le contrôle a été étendu pour limiter les dommages environnementaux causés par la technologie.

      4. **Le Nouveau Défi - Le Contrôle Cognitif et Émotionnel :

      ** Le défi actuel est d'étendre ce contrôle à l'impact que l'IA a sur nos capacités cognitives et émotionnelles.

      Cela est particulièrement visible avec les algorithmes prédictifs qui, en extrapolant le passé, façonnent nos choix et nous font oublier que le futur reste incertain.

      4. Concentration du Pouvoir et Dynamiques Géopolitiques

      Derrière les avancées de l'IA se cache une énorme concentration de pouvoir économique qui influence sa trajectoire et sa régulation.

      Déséquilibre du Financement :

      ◦ Dans les pays de l'OCDE, la R&D générale est financée à environ deux tiers par le secteur privé et un tiers par le secteur public.  

      ◦ Pour l'IA, le rapport est de 90 % de financement privé contre seulement 10 % de financement public.

      Conséquences du Déséquilibre :

      ◦ Les universités sont désavantagées, manquant d'accès à la puissance de calcul et aux données détenues par les grandes entreprises.  

      ◦ Les entreprises n'ont aucune obligation de rendre publics leurs algorithmes ou leurs données.   

      ◦ La direction de la recherche est dictée par des objectifs de profit, bien que les entreprises affirment travailler pour le bien de l'humanité.

      Il est nécessaire de financer davantage la recherche publique pour explorer des voies alternatives.

      Paysage de la Régulation :

      Union Européenne : À l'avant-garde avec un ensemble de législations, dont l'AI Act.  

      États-Unis : Réticents à réguler par crainte d'étouffer l'innovation, et sous l'influence du lobbying de la Big Tech.  

      Chine : L'autre acteur majeur de cette configuration géopolitique.

      5. Questions Philosophiques et Épistémologiques

      L'IA nous confronte à des questions profondes sur notre rapport au monde et à la connaissance.

      Comprendre ce que nous créons : Citant Giambattista Vico ("Nous ne comprenons que ce que nous faisons"), Nowotny se demande si nous ne nous dirigeons pas vers un monde créé par l'homme que nous ne comprenons plus.

      L'IA permet de créer des "jumeaux numériques" et des systèmes complexes dont les propriétés émergentes sont impossibles à prédire.

      De Nouvelles Formes de Raisonnement : L'exemple d'un mathématicien dont le problème a été résolu par une IA d'une manière différente de celle d'un humain soulève des questions fondamentales :

      notre cerveau fonctionne-t-il différemment, ou l'IA révèle-t-elle de nouvelles facettes de la mathématique, elle-même une "technologie culturelle" ?

      Co-évolution avec des "Autres Numériques" : Faisant une analogie spéculative avec les travaux de l'anthropologue Marshall Sahlins sur le "cosmos immanent" (un monde où les humains partageaient leur existence avec des esprits et des dieux), Nowotny suggère que nous pourrions être au début d'une trajectoire co-évolutive où nous devrons apprendre à vivre avec des "autres numériques".

      6. Le Scepticisme Scientifique comme Antidote

      Face à ces illusions et à ces complexités, la démarche scientifique offre une méthode pour ne pas se tromper soi-même.

      La Leçon de Feynman : Citant le physicien Richard Feynman, "La science est ce que nous avons appris sur la manière de ne pas nous tromper nous-mêmes."

      Une Vertu pour la Société : Le scepticisme est une vertu scientifique qui doit être diffusée dans toute la société et auprès des politiciens.

      Il est crucial d'éviter le déterminisme technologique, qui est le revers de l'illusion du contrôle.

      Le sentiment d'impuissance mène à la peur, à la passivité et au repli, ce qui constitue le pire scénario possible.

      7. Thèmes Abordés dans la Session de Questions-Réponses

      IA et Sciences Sociales : L'IA offre une opportunité de lier la recherche qualitative (la "connaissance épaisse" de Clifford Geertz) et quantitative en analysant de vastes corpus de données qualitatives.

      De plus, comme pour le transistor qui a permis l'émergence de la radio portable, des usages sociaux imprévus de l'IA apparaîtront.

      Les "Objectifs" de l'IA : Une IA n'a que les objectifs qui lui sont inscrits par ses créateurs.

      La vraie question est : "Quels sont les objectifs des personnes qui développent, possèdent et investissent dans l'IA ?"

      Armes Autonomes : Le développement se dirige rapidement vers des armes autonomes.

      Atteindre un accord international de non-prolifération, similaire à celui sur les armes nucléaires, sera très difficile car les composants de l'IA sont beaucoup plus complexes à tracer que les substances nucléaires.

      Langage, Traduction et Culture : L'IA facilite énormément la traduction instantanée.

      Cela pourrait entraîner la fermeture de départements universitaires de traduction et décourager l'apprentissage des langues.

      Un marché ségrégué pourrait émerger pour les livres : une production de masse par l'IA et un marché de "luxe" pour les auteurs humains.

      Communiquer sur l'IA : Il faut aller au-delà de la simple "littératie numérique" pour développer une véritable conscience du fait que l'IA est une technologie créée et dirigée par des humains. Ceci est essentiel pour éviter la peur et la passivité face à un prétendu déterminisme technologique.

    1. Dossier d'Information : Les Dynamiques de la Négociation de Paix selon Alberto Fergusson

      Synthèse

      Ce document de synthèse analyse les réflexions et les expériences d'Alberto Fergusson, un acteur clé du processus de paix colombien, qui allie une expertise en médecine, psychiatrie et psychanalyse à une pratique intensive des négociations.

      Ses observations, issues de plus d'une décennie d'implication, notamment dans les pourparlers avec l'ELN, révèlent les dynamiques psychologiques et sociales complexes qui sous-tendent les processus de paix.

      Les points à retenir sont les suivants :

      Le Paradoxe de l'Accord (Individu vs. Groupe) :

      L'observation la plus frappante de Fergusson est qu'un accord est quasi systématiquement possible lors de discussions individuelles et privées avec les membres de la partie adverse, y compris les dirigeants.

      Cependant, cet accord devient impossible à atteindre une fois que les discussions retournent à la table de négociation formelle, avec ses dynamiques de groupe et ses impératifs de représentation.

      L'Importance Capitale des Canaux Parallèles ("Back Channels") : Contrairement à l'idée reçue, la majorité des décisions cruciales ne sont pas prises lors des sessions officielles, mais dans le cadre de discussions informelles et de réunions secrètes.

      La maîtrise de ces canaux parallèles est un art qui requiert l'identification des bons interlocuteurs et la gestion précise du format et de la durée des échanges.

      L'Application de la Psychopathologie à la Négociation : Fergusson tire ses principaux outils d'analyse de son travail avec des sans-abri atteints de maladies mentales graves.

      Il postule que les mécanismes de défense et les perturbations émotionnelles observées dans la "folie" éclairent les comportements, parfois irrationnels, des acteurs dans des situations de haute tension comme les négociations de paix.

      La Question Fondamentale sur l'Impact Réel des Négociations : Fergusson s'interroge de manière critique sur la capacité des négociations à modifier durablement les processus sociaux.

      Il se demande si les accords de paix réussis sont le fruit d'une habileté de négociation ou s'ils ne font que formaliser une évolution déjà inéluctable des dynamiques sociales, soulevant le risque de parvenir à des accords "artificiels" et prématurés.

      Contexte et Objectifs du Chercheur

      Alberto Fergusson, fort d'une formation en médecine, psychiatrie et psychanalyse, a consacré une part importante de sa carrière à des activités psychosociales.

      Son travail initial auprès de sans-abri atteints de schizophrénie en Colombie lui a permis de développer un modèle, l'"auto-analyse accompagnée", pour comprendre et accompagner les personnes souffrant de troubles émotionnels sévères.

      Depuis près de vingt ans, il applique les connaissances acquises dans ce domaine au processus de paix colombien.

      Il a été directement impliqué dans les pourparlers, notamment en tant que membre de la délégation gouvernementale du président Santos lors des discussions avec l'ELN en Équateur et à Cuba.

      Il a également été membre de la Commission de la Vérité en Colombie.

      Actuellement professeur à l'Université du Rosaire, il consacre un mois à l'IEA de Paris (en mode virtuel) pour organiser, synthétiser et repenser une décennie d'expériences.

      Ce travail de réflexion est crucial car il s'apprête à réintégrer le processus de paix colombien avec une perspective académique, visant à analyser la situation d'un point de vue plus large et moins partisan.

      Thèmes Centraux et Observations Clés

      De la "Folie" à la "Normalité" : Une Approche Inversée

      Fergusson qualifie son approche de "confession" : il reconnaît que l'essentiel de sa compréhension des processus de négociation provient de son expérience avec des personnes atteintes de maladies mentales graves.

      Sa présentation est intitulée "La normalité à la lumière de la folie" (Normality in the light of Madness), signifiant que les mécanismes psychologiques extrêmes observés chez ses patients offrent une grille de lecture pertinente pour les dynamiques apparemment "normales" des négociations politiques.

      Le Paradoxe de l'Accord : Individu contre Groupe

      L'observation la plus puissante et la plus récurrente de Fergusson est la dichotomie radicale entre les interactions individuelles et les dynamiques de groupe.

      En tête-à-tête : Fergusson affirme que, sans exception, lors de conversations approfondies et individuelles avec n'importe quel membre de la partie adverse (y compris les plus hauts dirigeants de l'ELN), il a toujours été possible de parvenir à un consensus.

      Il déclare : "nous aurions toujours pu signer l'accord individuellement, en tête-à-tête."

      À la table de négociation : Dès que la discussion est portée à la table formelle, où les dynamiques de groupe, les hiérarchies (nécessité d'obtenir l'approbation du leader suprême, comme "Gabino" pour l'ELN) et les pressions de représentation entrent en jeu, l'accord devient compliqué, voire impossible.

      Ce paradoxe constitue le cœur de son questionnement actuel : pourquoi ce qui est mutuellement acceptable en privé devient-il inacceptable en public ?

      L'Irrationalité Apparente : Agir Contre Ses Propres Intérêts

      Une autre observation centrale est que, dans le cadre des négociations, les individus et les groupes adoptent fréquemment des positions qui vont manifestement à l'encontre de leurs propres intérêts, ou du moins partiellement.

      Fergusson cherche à dépasser la simple explication des "facteurs émotionnels et psychologiques" pour analyser en détail les mécanismes qui conduisent à ces décisions contre-productives.

      Le Rôle Crucial des Canaux de Négociation Parallèles ("Back Channels")

      Fergusson affirme sans équivoque que la plupart des décisions importantes ne sont pas prises à la table officielle de négociation.

      Lieu de décision réel : Les véritables avancées se produisent lors de réunions informelles, en marge des sessions officielles.

      L'art du "Back Channel" : Le succès de ces canaux parallèles dépend d'une stratégie fine :

      1. Identifier l'interlocuteur clé : Il faut savoir repérer la personne de l'autre camp avec qui un accord de principe peut être trouvé.   

      2. Rassembler les décideurs : Dans un exemple réussi, Fergusson et son homologue de l'ELN, après s'être mis d'accord, ont organisé une réunion privée entre leurs deux dirigeants respectifs pour leur présenter leur solution commune.

      Ce fut le moment où les négociations ont le plus progressé.  

      3. Maîtriser la durée : La longueur d'une réunion est un facteur critique. Fergusson note que si des êtres humains continuent de parler après avoir trouvé un accord, ils finiront par trouver un désaccord.

      Savoir quand s'arrêter est essentiel.

      La Question Fondamentale : Négociation et Évolution Sociale

      La principale question de recherche de Fergusson, qu'il explore durant sa résidence, est la suivante :

      "Jusqu'à quel point peut-on changer les processus sociaux par le biais des négociations ?"

      Il illustre ce dilemme avec une analogie : celle d'une personne qui, toute la nuit, pousse de toutes ses forces pour faire venir le soleil et qui, à 6 heures du matin, lorsque le soleil se lève, s'écrie : "J'ai réussi !".

      Négociateur : Agent du changement ou simple facilitateur ?

      Les négociateurs sont-ils les artisans d'un accord, ou leur intervention se contente-t-elle de faciliter ou d'accélérer une trajectoire que les dynamiques sociales et les conflits auraient de toute façon suivie ?

      Le risque des "lois sociales naturelles" : Il se demande si les négociateurs, en tentant de forcer un accord, ne vont pas à l'encontre des "lois sociales naturelles", créant ainsi des arrangements artificiels et prématurés.

      Le critère du succès : Pour Fergusson, un accord réussi n'est pas celui qui tient six mois ou deux ans.

      Sa question porte sur les accords de paix durables et leur véritable origine : l'habileté des négociateurs ou l'évolution inéluctable de la société.

      Perspectives Issues de la Discussion

      Les échanges avec les autres chercheurs ont enrichi et précisé plusieurs points :

      Légitimer le Changement de Position sans "Perdre la Face" :

      ◦ Un participant a suggéré que le rôle du négociateur est de créer un cadre où les parties peuvent légitimement changer de position sans "perdre la face".  

      ◦ Cette idée est illustrée par une expérience de dégustation de vin : des dégustateurs ont radicalement changé leur évaluation d'un vin après avoir vu l'étiquette, mais n'ont jamais admis avoir changé d'avis.

      Ils ont prétendu que c'était le vin qui avait "changé" (il s'était "ouvert").  

      Leçon pour le négociateur : Il ne s'agit pas de convaincre l'autre partie de changer d'avis, mais de présenter la situation différemment (par exemple, en invoquant de "nouveaux événements" ou de "nouveaux aspects") afin que l'adoption d'une nouvelle position apparaisse comme une réponse logique à un contexte modifié, et non comme une capitulation.

      L'Équilibre entre Secret et Public :

      ◦ Même les processus de paix qui semblent secrets, comme celui avec les FARC, sont en réalité un mélange complexe d'échanges publics et de canaux parallèles.  

      ◦ Fergusson confirme que l'accord final avec les FARC a été le résultat d'une "chaîne de canaux parallèles", souvent au grand dam des dirigeants qui n'apprécient pas ces manœuvres.

    1. Mesurer les Inégalités : Synthèse et Perspectives du Débat

      Résumé Exécutif

      Ce document de synthèse analyse les thèmes centraux d'un débat d'experts sur la mesure des inégalités et son lien avec leur réduction.

      Trois perspectives complémentaires émergent :

      1. Les indicateurs comme conventions socio-politiques:

      Florence Jany-Catrice, économiste, soutient que toute mesure des inégalités est le fruit de conventions socio-politiques et non une vérité objective.

      Les indicateurs sont des instruments à double face, servant à la fois la connaissance et la gouvernance.

      Elle critique les mesures standards comme le rapport interdécile (D9/D1) qui masquent les réalités aux extrêmes de la distribution et occulte des inégalités fondamentales comme le partage capital/travail.

      Mesurer n'entraîne pas automatiquement une réduction, car il existe une chaîne complexe entre savoir et agir.

      2. La communication et l'action citoyenne :

      Cécile Duflot, directrice d'Oxfam France, présente l'approche de son organisation, qui consiste à utiliser des données robustes (notamment de Crédit Suisse/UBS) pour produire des "killer facts" :

      des comparaisons choc conçues pour rendre visible l'ampleur de la concentration extrême des richesses.

      L'objectif est de mobiliser l'opinion publique et de plaider pour une régulation politique, en arguant que les niveaux actuels d'inégalité de patrimoine créent des fractures sociales, privent l'action publique de ressources et posent un problème démocratique fondamental.

      3. L'expérience vécue comme révélateur : Nicolas Duvoux, sociologue, propose de dépasser le décalage entre la stabilité relative des indicateurs officiels et la forte tension sociale ressentie.

      En s'appuyant sur l'analogie de la "température ressentie", il affirme que la mesure de la perception subjective des inégalités n'est pas une alternative à la mesure objective, mais un moyen de l'affiner.

      Cette approche révèle le rôle central du patrimoine dans le sentiment de sécurité et la capacité à se projeter dans l'avenir.

      Elle met en lumière des fractures que les indicateurs monétaires traditionnels ne captent pas, de la précarité des classes populaires à la capacité des ultra-riches de façonner l'avenir collectif via la philanthropie.

      En conclusion, le débat converge sur l'idée que si mesurer les inégalités ne suffit pas à les réduire, mesurer autrement — en critiquant les conventions, en rendant visibles les extrêmes et en intégrant l'expérience vécue — est le premier pas indispensable pour poser un diagnostic partagé et engager une action politique et sociale efficace.

      --------------------------------------------------------------------------------

      Thème 1 : Les Indicateurs comme Conventions Socio-Politiques (Florence Jany-Catrice)

      L'économiste Florence Jany-Catrice pose le cadre conceptuel du débat en affirmant que la quantification des faits sociaux, et en particulier des inégalités, est une opération complexe qui repose sur des conventions.

      Reprenant les travaux d'Alain Desrosières, elle insiste sur le duo "convenir et mesurer", soulignant que derrière chaque chiffre se cache une part de normativité et une théorie de la justice, consciente ou non.

      La Double Face des Indicateurs : Connaissance et Gouvernance

      Les indicateurs d'inégalité ne sont pas de simples outils de connaissance neutres. Ils possèdent une double nature :

      Instruments de connaissance : Ils permettent de se représenter l'état de la société.

      Instruments de gouvernance : Ils servent de marqueurs pour évaluer l'efficacité des politiques publiques de redistribution et reflètent l'état des rapports de force sociaux.

      Cependant, le lien entre l'observation d'un phénomène et sa prise en charge politique n'est ni linéaire ni automatique.

      Comme le démontre l'exemple de la commission Stiglitz-Sen-Fitousi (2008), dont la recommandation d'adjoindre au PIB un indicateur de répartition des richesses a été largement ignorée, "on peut très bien savoir mais ne pas vouloir".

      L'impact d'un diagnostic dépend de la capacité des acteurs sociaux (experts, chercheurs, ONG) à le rendre suffisamment partagé et à défendre des visions politiques alternatives.

      Les Limites des Mesures Conventionnelles

      Florence Jany-Catrice met en évidence les faiblesses et les angles morts des indicateurs les plus couramment utilisés.

      Indicateur / Concept

      Description et Critique

      Rapport Capital/Travail

      Considéré comme la "première inégalité" du capitalisme, il mesure le partage de la valeur ajoutée entre la rémunération du travail (salaires) et celle du capital (dividendes, intérêts).

      Cet indicateur, bien qu'existant, est de moins en moins visible dans le débat public, illustrant un glissement des intérêts et des expertises.

      Rapport Interdécile (D9/D1)

      Rapport entre le revenu des 10 % les plus riches et celui des 10 % les plus pauvres.

      Bien qu'il semble stable en France (autour de 3,5), cet indicateur est critiqué car il exclut volontairement les "valeurs aberrantes", c'est-à-dire les très hauts et très bas revenus. Il masque ainsi l'aggravation des inégalités aux "queues de la distribution".

      Pauvreté Monétaire Relative

      En France, elle est définie par le seuil de 60 % du revenu médian. F. Jany-Catrice souligne qu'il s'agit avant tout d'un indicateur d'inégalité de répartition, et non de pauvreté absolue.

      Vers des Indicateurs Alternatifs et le "Statactivisme"

      Face aux limites des outils officiels, des initiatives de la société civile émergent pour proposer d'autres manières de compter.

      Le BIP 40 (Baromètre des Inégalités et de la Pauvreté) :

      Créé dans les années 2000 par le Réseau d'alerte sur les inégalités, cet indicateur composite et multidimensionnel (revenu, travail, éducation, santé, logement, justice) montrait une "explosion" des inégalités entre 1980 et 1995, à rebours de l'indicateur officiel de l'INSEE qui indiquait une régression de la pauvreté.

      L'objectif n'était pas d'opposer un "vrai" chiffre à un "faux", mais de démontrer que "selon les lunettes que l'on chausse, on peut raconter des histoires" très différentes sur l'état de la société.

      Le "Statactivisme" : Ce néologisme désigne les stratégies statistiques utilisées par des acteurs sociaux pour critiquer une autorité et s'en émanciper.

      Il s'agit d'une réappropriation du "pouvoir émancipateur" des statistiques pour fournir des données sur les angles morts de la production publique (ex: les plus riches) ou des visions alternatives.

      Thème 2 : Le Rôle d'Oxfam dans le Débat Public (Cécile Duflot)

      Cécile Duflot explique comment Oxfam, une organisation historiquement dédiée à la lutte contre la pauvreté, s'est concentrée sur les causes de celle-ci, arrivant "assez rapidement sur la question des inégalités".

      L'approche d'Oxfam est décrite comme éminemment politique et militante, visant à mobiliser le pouvoir citoyen.

      Méthodologie et Stratégie de Communication

      Le rapport annuel d'Oxfam, publié symboliquement pendant le Forum de Davos, repose sur une méthodologie précise et une stratégie de communication percutante.

      Source des données : Le rapport s'appuie principalement sur les données du Crédit Suisse (aujourd'hui UBS) et de Forbes, utilisant la "méthode la plus robuste pour calculer le patrimoine", la même que celle utilisée par des institutions comme la Haute autorité pour la transparence de la vie publique.

      Les "Killer Facts" : La stratégie d'Oxfam consiste à traduire des données brutes en comparaisons frappantes et intuitivement compréhensibles, car les ordres de grandeur comme le milliard d'euros sont "nébuleux" pour le grand public.

      ◦ Exemple cité : "Les 8 premiers milliardaires du monde possédaient ce que possède la moitié des plus pauvres".   

      Illustration de l'effet de moyenne : L'entrée de Carlos Tavares (PDG de Stellantis) dans une pièce de 99 smicards ferait passer le revenu moyen de 16 000 € à environ 400 000 €, masquant le fait que 99 % des personnes sont toujours au SMIC.

      Même le ratio D9/D1 (écart de 1 à 229 dans ce cas) reste trompeur, car il y a "plus d'écart au sein des 10 % les plus riches [...] que entre les 10 % les plus pauvres et les 10 % les plus riches".

      Au-delà du Revenu : La Concentration du Patrimoine et ses Conséquences

      Oxfam se concentre sur les inégalités de patrimoine, considérées comme plus fondamentales que celles de revenu.

      L'injustice perçue : La majorité des grandes fortunes sont héritées. En France, "plus de 70 % de la fortune des milliardaires est une fortune héritée".

      C. Duflot cite un milliardaire danois parlant de "gagner à la loterie du sperme".

      Conséquences des inégalités extrêmes :

      1. Fracturation sociale : Elles sont vécues comme injustes et fragilisent la cohésion sociale.  

      2. Privation de ressources publiques : La concentration du patrimoine chez les ultra-riches, qui bénéficient de taux d'imposition effectifs plus faibles, réduit la base taxable.   

      3. Problème démocratique : L'accumulation extrême de richesse se traduit par l'achat du pouvoir.

      C. Duflot cite un interlocuteur : "Le premier milliard, on peut le dépenser. [...] À partir du 2e milliard, [...] on achète le pouvoir", notamment via l'achat de médias et la pression sur les dirigeants politiques.

      Une Démarche Militante pour la Régulation

      La finalité du travail d'Oxfam n'est pas de "ne pas aimer les riches", mais de plaider pour une plus grande régulation, arguant que les sociétés plus égalitaires sont en meilleure santé globale (travaux de Wilkinson) et plus stables.

      Le rapport d'Oxfam de septembre 2017, qui analysait le premier budget du gouvernement Macron (baisse des APL, suppression de l'ISF), est présenté comme ayant anticipé la colère sociale qui a mené au mouvement des "gilets jaunes", car "les gens [...] comprennent très bien le message politique".

      Thème 3 : L'Objectivité Supérieure du Subjectif (Nicolas Duvoux)

      Le sociologue Nicolas Duvoux part d'une énigme : le contraste entre la relative stabilité des indicateurs macroéconomiques d'inégalité en France et le niveau très élevé de "tension, de colère, d'insatisfaction".

      Son travail vise à réconcilier la mesure objective et l'expérience vécue sans renoncer à la scientificité.

      La "Température Ressentie" des Inégalités

      Nicolas Duvoux propose de ne pas opposer l'objectif et le subjectif, mais d'utiliser la subjectivité comme une clé d'entrée pour "raffiner, mieux comprendre, mieux saisir l'objectivité des rapports sociaux".

      Analogie : Tout comme la température ressentie affine la température ambiante en y ajoutant des facteurs comme le vent ou l'humidité, la mesure du statut social subjectif donne une information plus fine que le statut objectif, car elle intègre la synthèse cognitive que fait l'individu de sa propre situation.

      Récusation du "subjectivisme" : Il insiste sur le fait que sa démarche n'isole pas le point de vue subjectif, mais l'intègre à l'analyse des structures objectives (ressources économiques, patrimoine) pour obtenir une vision plus riche. L'objectif est de "contextualiser la subjectivité".

      Le Patrimoine comme Clé de Lecture de la Sécurité Sociale

      La mesure subjective fait systématiquement ressortir le poids du patrimoine comme facteur déterminant de la sécurité ou de l'insécurité sociale.

      La pauvreté ressentie : Elle touche des groupes qui ne sont pas nécessairement pauvres au sens monétaire (petits indépendants, retraités locataires).

      Elle révèle une "impossibilité de rendre soutenable une situation" où les revenus stagnent face à des charges qui augmentent (ex: loyers).

      La pauvreté est alors vécue comme un "enfermement" et un manque de liberté dans l'affectation de ses ressources.

      L'avenir confisqué : L'inégalité est redéfinie comme une "inégalité de temps vécu", c'est-à-dire une différence dans la "capacité à se projeter" dans l'avenir.

      Cette capacité est directement indexée sur la dotation en ressources, et particulièrement en patrimoine.

      La philanthropie des ultra-riches : À l'autre extrême du spectre social, le don philanthropique est analysé non pas comme un simple acte de générosité, mais comme un levier permettant aux plus fortunés d'assurer la transmission dynastique de leur patrimoine et d'exercer un contrôle sur les choix collectifs, se saisissant ainsi de "l'avenir collectif".

      Changer la Représentation de la Hiérarchie Sociale

      Cette approche conduit à une vision de la société structurée par des "franchissements de paliers de sécurité" plutôt que par une échelle linéaire et monétaire.

      Elle réintroduit de la discontinuité entre les groupes sociaux et permet de donner une représentation statistique à des phénomènes comme la mobilisation des "gilets jaunes", en validant la difficulté exprimée par de larges pans de la population.

    1. Document d'information : Analyse des mécanismes de sortie de conflit

      Résumé analytique

      Ce document synthétise les perspectives d'experts sur les mécanismes de résolution des conflits et de construction de la paix, basées sur des recherches en sciences comportementales et des expériences de médiation sur le terrain.

      L'analyse part du constat d'une "spirale tragique" du conflit, où l'agression et la représaille s'auto-alimentent, nourries par des biais psychologiques comme la déshumanisation de l'ennemi.

      Les points à retenir sont les suivants :

      1. L'inversion de la spirale : Le cycle destructeur peut être inversé pour devenir un "cercle vertueux".

      La clé de cette transformation est l'humanisation de l'autre, qui consiste à le percevoir comme un acteur avec qui collaborer, une partie ayant des intérêts légitimes ou un semblable.

      2. Le rôle central des victimes : De manière contre-intuitive, les études, notamment en Colombie, montrent que les victimes de conflits violents sont souvent plus prosociales, plus enclines à la coopération et à la réconciliation que les non-victimes.

      Cette attitude s'explique par une forte aversion à la perte — ayant tant perdu, elles sont déterminées à empêcher la violence de se répéter — et une capacité à reconnaître la souffrance partagée.

      3. Transformer la violence, pas éliminer le conflit : Les experts s'accordent à dire que l'objectif n'est pas d'éliminer le conflit, qui est inhérent aux sociétés humaines, mais de le transformer d'une forme violente à une forme non-violente et constructive, gérée par des moyens politiques et institutionnels.

      4. Recommandations stratégiques : Pour favoriser la paix, les recommandations clés incluent une communication qui reconnaît la souffrance de toutes les parties, l'utilisation du cadre de l'aversion à la perte pour motiver l'action collective, la promotion du contact direct entre les groupes pour humaniser l'autre, et le fait de s'attaquer aux causes profondes des conflits (ex: inégalités).

      5. Le changement climatique comme analogie : Le défi climatique est présenté comme un exemple de conflit global non-violent qui exige une "collaboration radicale".

      La solution ne réside pas dans la création de nouveaux mouvements, mais dans la capacité à capter et à renforcer les énergies positives et les initiatives déjà existantes au sein de la société.

      --------------------------------------------------------------------------------

      1. La "Spirale Tragique" du Conflit

      L'analyse des conflits commence par le concept de "spirale tragique", un mécanisme d'escalade auto-entretenu. Ce cycle destructeur se déroule selon les étapes suivantes :

      Stress initial : Des tensions ou des difficultés génèrent un stress collectif.

      Attribution et accusation : En raison du "biais fondamental d'attribution", les humains ont tendance à attribuer la cause des problèmes à des personnes plutôt qu'à des situations. Cela mène à l'identification et à l'accusation d'un ennemi.

      Déshumanisation et agression : L'autre groupe est déshumanisé, ce qui lève les inhibitions et permet l'agression et la violence. Ces actes permettent de libérer la tension accumulée.

      Destruction et représailles : La violence entraîne la destruction, ce qui génère davantage de stress et de souffrance, alimentant un désir de représailles de la part de l'autre camp.

      Auto-alimentation : Chaque partie, se percevant comme répondant à une agression initiale, perpétue un cycle sans fin de violence et de souffrance croissante, renforçant la dichotomie "nous contre eux".

      Ce modèle, alimenté par des propensions humaines universelles, explique comment les conflits s'enracinent et s'intensifient.

      2. Inverser la Spirale : L'Humanisation comme Moteur du Changement

      La même dynamique de boucle de rétroaction qui alimente la violence peut être inversée pour créer un "cercle vertueux" où "le mieux mène au mieux". La clé de cette inversion réside dans le processus d'humanisation.

      Selon Adam Kahane, l'humanisation consiste à choisir de voir les autres non pas comme des objets ou des non-humains, mais à travers des perspectives constructives :

      Perspective technocratique : Voir l'autre comme un co-acteur dans la résolution d'un problème commun.

      Perspective politique : Voir l'autre comme une partie ayant des intérêts légitimes dans le cadre d'une négociation.

      Perspective relationnelle : Voir l'autre comme un semblable ou un parent, reconnaissant une humanité partagée.

      Ce changement de perspective est souvent déclenché par une prise de conscience pragmatique : la reconnaissance qu'aucune partie ne peut l'emporter unilatéralement et que la collaboration, même avec des adversaires, est indispensable pour assurer son propre avenir.

      3. Le Rôle Contre-Intuitif des Victimes dans la Réconciliation

      Un des constats les plus frappants issus des recherches menées en Colombie est le rôle moteur des victimes dans les processus de paix. Contrairement à l'idée reçue, les personnes ayant directement souffert de la violence sont souvent plus enclines à la coopération et à la réconciliation que celles qui n'ont pas été directement affectées.

      Les Mécanismes Comportementaux sous-jacents

      Les recherches d'Enrique Fatas et Lina Restrepo mettent en lumière plusieurs explications comportementales à ce phénomène :

      Aversion à la perte : Conformément à la théorie des perspectives, les pertes sont ressenties plus intensément que les gains équivalents. Les victimes ont subi des pertes immenses (famille, biens, sécurité) et sont donc extrêmement motivées à éviter que cette souffrance ne se répète, ce qui les rend plus ouvertes à la concession pour garantir la paix.

      Prosocialité accrue : Il est documenté à travers l'Afrique, l'Asie et l'Amérique latine que l'exposition à un conflit violent augmente la prosocialité des victimes envers les membres de leur propre groupe (in-group) mais aussi envers d'autres groupes vulnérables qu'elles perçoivent comme similaires. Si les ex-combattants sont perçus comme un autre groupe vulnérable plutôt que comme des ennemis déshumanisés, cette prosocialité peut s'étendre à eux.

      "Victimisation inclusive" : Dans des contextes comme la Colombie, où le conflit a été long et irrégulier, la victimisation est si répandue qu'elle transcende les clivages. Il n'y a pas un "nous" et un "eux" clairement définis, ce qui favorise une identification partagée et réduit la pensée conflictuelle.

      La Reconnaissance de la Souffrance Partagée

      Adam Kahane corrobore cette observation en soulignant que les participants qui avaient le plus souffert dans les ateliers de paix en Colombie étaient les plus déterminés à trouver une solution non-violente. La reconnaissance de la souffrance partagée avec l'adversaire permet de le voir comme un être humain. Citant Carl Rogers, il affirme que "ce qui est le plus personnel est le plus universel".

      Distinction entre Attitudes et Comportements

      Une étude de Lina Restrepo sur le financement participatif pour des entrepreneurs (victimes vs. ex-combattants) a révélé une nuance importante.

      Comportement : Les participants ont donné des sommes d'argent similaires aux deux groupes, ne montrant aucune différence comportementale.

      Attitudes : Cependant, les attitudes exprimées (peur, anxiété) envers les ex-combattants restaient négatives.

      Cette dissociation montre que même les personnes non directement affectées sont capables de surmonter leurs préjugés et leurs peurs pour s'engager dans des actions coopératives lorsqu'une solution pacifique est en jeu.

      4. Recommandations Stratégiques pour la Construction de la Paix

      Les experts proposent une série de recommandations pour sortir des conflits violents et faire prévaloir la paix.

      Recommandation

      Description

      Expert(s)

      Communication efficace

      Communiquer sur les politiques de réconciliation de manière à légitimer l'aide aux victimes et aux ex-combattants, en reconnaissant explicitement la souffrance de l'autre pour éviter le "renversement du stigmate" (une réaction négative de la part de ceux qui ne bénéficient pas des politiques).

      Enrique Fatas

      Gestion de la mémoire

      Ne pas utiliser la mémoire du conflit de manière partisane, car cela perpétue le conflit et peut nuire aux compétences cognitives et aux perspectives économiques des victimes, même des années plus tard.

      Enrique Fatas

      Cadre de l'aversion à la perte

      Communiquer non pas sur les gains de la paix, mais sur ce que la société a à perdre si le conflit violent persiste. Ce cadre est plus puissant pour motiver l'action.

      Lina Restrepo

      Empathie et perspective

      Intégrer activement le point de vue des victimes dans le discours public pour que les non-victimes développent une plus grande empathie envers une solution pacifique.

      Lina Restrepo

      Hypothèse du contact

      Faciliter le contact direct entre les membres des groupes opposés. Apprendre à connaître l'autre en tant que personne (avec une famille, une histoire) est un puissant antidote à la déshumanisation.

      Lina Restrepo

      S'attaquer aux causes profondes

      S'assurer que les raisons sous-jacentes qui ont déclenché le conflit en premier lieu (inégalités, manque de confiance dans les institutions) sont résolues pour éviter une résurgence de la violence.

      Lina Restrepo

      Canaliser les énergies existantes

      Au lieu d'essayer de "pousser les gens à agir", il est plus efficace d'identifier, de soutenir et d'aider à coordonner les énergies, les mouvements sociaux et les initiatives positives qui existent déjà au sein de la société.

      Adam Kahane

      Transformer le conflit

      Accepter que le but n'est pas d'éliminer le conflit mais de le transformer en un processus non-violent. Le conflit est inévitable ; la violence ne l'est pas.

      Adam Kahane, Enrique Fatas

      5. Le Changement Climatique : Une Analogie pour la "Collaboration Radicale"

      Le changement climatique est utilisé comme une analogie puissante pour les conflits complexes du 21e siècle.

      • C'est un problème non-unilatéral et non-local : aucune nation ou groupe ne peut le résoudre seul.

      • Il représente un "conflit sans violence" où des intérêts divergents (agriculteurs, industries, gouvernements) s'affrontent.

      • Il est caractérisé par une urgence temporelle ("ticking clock") qui rend l'inaction catastrophique.

      Face à ce défi, Adam Kahane préconise une "collaboration radicale" qui intègre la vitesse, l'ampleur et la justice. Cependant, un risque majeur, souligné par Lina Restrepo, est la normalisation : à force d'entendre parler de la crise, les populations s'y habituent et l'urgence perçue diminue, ce qui paralyse l'action.

      Conclusion : De l'Espoir à l'Action

      La discussion se conclut sur une note pragmatique et pleine d'espoir.

      La clé pour résoudre les conflits les plus complexes, qu'il s'agisse de guerres civiles ou de crises globales comme le changement climatique, ne réside pas dans la création de solutions ex nihilo.

      Elle réside plutôt dans notre capacité à "capter les énergies qui circulent déjà".

      Des mouvements positifs, des leaders et des initiatives existent toujours.

      Le véritable défi est de les identifier, de les unir et de les amplifier pour transformer les dynamiques de conflit en collaboration constructive.

    1. Justice Pénale et Transitionnelle : Sortir des Violences Collectives

      Résumé Exécutif

      Ce document de synthèse analyse les mécanismes juridiques et politiques conçus pour répondre aux violences de masse, en s'appuyant sur l'expertise de Sandrine Lefranc et Sharon Weill.

      Il met en lumière l'inadéquation du droit pénal traditionnel, conçu pour la criminalité individuelle, face à des crimes d'État ou de grande ampleur.

      En réponse, la justice transitionnelle a émergé comme une alternative politique privilégiant la vérité, la réparation et la réconciliation à la sanction pénale.

      Cependant, cette approche, bien que vertueuse, impose souvent aux victimes un langage de la souffrance au détriment de la colère politique.

      Parallèlement, la justice pénale s'est renouvelée à travers des mécanismes internationaux (Cour Pénale Internationale), nationaux (compétence universelle) et hybrides (tribunal pour Hissène Habré), chacun présentant ses propres limites en termes de politisation, de légitimité et d'efficacité.

      Le modèle colombien post-accord de paix de 2016 représente une nouvelle voie holistique, intégrant la responsabilité pénale à des projets de réparation en collaboration avec les victimes.

      Enfin, le procès des attentats du 13 novembre 2015 en France illustre une "hybridation" inédite où un cadre pénal classique a incorporé des éléments de justice transitionnelle, offrant une place centrale à la parole des victimes tout en révélant les tensions inhérentes à cette démarche et la quête, par les victimes elles-mêmes, d'une justice plus restaurative.

      --------------------------------------------------------------------------------

      1. L'Impuissance du Droit Pénal Traditionnel Face à la Violence de Masse

      Le droit pénal classique se trouve fondamentalement dépassé et "réduit au mutisme" lorsqu'il est confronté à la violence de masse.

      Sandrine Lefranc souligne que ce système est structuré pour juger des crimes individuels et non des dynamiques collectives impliquant des milliers de victimes et d'auteurs, ces derniers appartenant souvent à l'appareil d'État.

      Problème d'échelle : Le droit pénal est débordé par le grand nombre de victimes et d'auteurs, ainsi que par des pratiques répressives inventives pour lesquelles il n'a pas de catégories juridiques (par exemple, les "disparitions" en Amérique latine, difficiles à qualifier en assassinats sans corps).

      Conflit d'intérêts : Lorsque l'ennemi à juger est l'État lui-même et ses agents, le système judiciaire national, dont les magistrats ont souvent été nommés par l'ancien régime, est paralysé.

      L'État est peu enclin à se considérer comme criminel.

      Principe d'individualisation : Le droit pénal se concentre sur la responsabilité individuelle, ce qui est inadapté pour traiter des dynamiques collectives et des crimes systémiques.

      Face à cette impuissance, la sanction est souvent "rangée au placard" au profit de lois d'amnistie, ouvrant la voie à la recherche d'autres formes de justice.

      2. La Justice Transitionnelle : Une Alternative Politique

      En réponse aux limites du droit pénal, la "justice transitionnelle" a été développée non pas comme un droit, mais comme une "justice politique". Il s'agit d'un compromis politique visant à permettre une transition vers la paix ou la démocratie.

      Piliers Fondamentaux :

      Vérité : Établir un récit partageable des événements.  

      Réparation : Offrir des compensations aux victimes.  

      Réconciliation : Pacifier le conflit social.

      Mécanismes emblématiques : L'institution la plus connue est la Commission de Vérité et de Réconciliation, comme celle mise en place en Afrique du Sud.

      Ces commissions visent à construire une histoire nouvelle et audible par tous, où ceux qui étaient qualifiés de "terroristes" peuvent être reconnus comme "victimes".

      Limites et Contraintes :

      Une justice de l'impuissance : Elle naît de l'incapacité à poursuivre pénalement et ne raconte souvent qu'une partie de l'histoire.

      En Afrique du Sud, elle a mis en lumière les souffrances individuelles mais a peu abordé les injustices structurelles de l'apartheid.  

      Cadrage de la parole des victimes : Ces institutions, pour éviter de raviver le conflit, encadrent fortement l'expression des victimes.

      On leur impose un "langage très doux et chaleureux", les encourageant à pleurer plutôt qu'à exprimer leur colère, leurs revendications politiques ou matérielles.

      Les victimes sont amenées à parler en tant que mères ou veuves plutôt qu'en tant que militantes, utilisant un langage de la souffrance traumatique plutôt que celui de la politique.

      3. Le Renouvellement des Mécanismes de Justice Pénale

      Parallèlement à la justice transitionnelle, les mécanismes de droit pénal ont évolué pour tenter de juger les crimes de masse. Sharon Weill distingue trois grandes catégories de tribunaux.

      Type de Mécanisme

      Exemples Clés

      Caractéristiques et Limites

      Justice Internationale

      Cour Pénale Internationale (CPI) à La Haye.

      Objectif : Mettre fin à l'impunité ("no safe heaven").<br>Juridiction : Limitée aux 123 États signataires (ou aux crimes commis sur leur territoire).<br>

      Limites : Production de cas très limitée, forte influence des agendas politiques des États (ex: mandat d'arrêt rapide contre Poutine, inaction sur les crimes contre les migrants), complexité due à la diversité des cultures juridiques.

      Justice Nationale

      • Procès Papon (France)<br>• Procès Eichmann (Israël)<br>• Procès rwandais (France)<br>• Tribunaux militaires (Guantanamo, Israël)

      Types :<br>

      1. Juger ses propres citoyens : Souvent trop peu nombreux et trop tardifs.<br>

      2. Juridiction universelle : Un pays juge des crimes commis à l'étranger sans lien direct. Pose des problèmes de légitimité et de perception (un jury français jugeant des faits au Libéria).<br>

      3. Juger son ennemi : Remet en question l'indépendance et l'impartialité des cours.

      Justice Hybride (Mixte)

      Procès de Hissène Habré (ex-dictateur du Tchad) au Sénégal.

      Modèle : Combine des éléments nationaux et internationaux pour "prendre le meilleur des deux mondes".<br>

      Avantages : Juridiction spécialement créée, financement international, juges nationaux et internationaux, et surtout, une localisation plus proche des victimes (Sénégal plutôt que La Haye), favorisant leur participation.

      4. Vers des Modèles Holistiques : L'Exemple Colombien

      Le processus de paix colombien de 2016 illustre une nouvelle approche qui tente de réintégrer la justice pénale dans une démarche plus holistique et restaurative.

      Fonctionnement : Une cour spéciale a été créée. Les accusés qui reconnaissent leur responsabilité, contribuent à la vérité et dialoguent avec les victimes peuvent éviter la prison.

      Sanctions alternatives : Au lieu de l'incarcération, les accusés s'engagent dans des "projets de réparation" conçus avec les victimes (reconstruire des écoles, créer des monuments).

      Approche "Macro" : La justice ne se concentre pas uniquement sur des cas individuels mais sur des "macro-cas", analysant des dynamiques de violence sur un territoire ou d'un type particulier (ex: les enlèvements).

      Principes clés : Participation massive des victimes, responsabilisation des auteurs et réparation collective.

      5. Étude de Cas : Le Procès des Attentats du 13 Novembre 2015 (V13)

      Le procès V13 en France est un exemple fascinant d' "hybridation", où un système de droit pénal classique et sévère a intégré des pratiques issues de la justice transitionnelle.

      5.1 Une Place Inédite pour les Victimes

      Dans un cadre judiciaire très solennel (Cour d'assises spéciale sans jury), le procès a consacré deux mois entiers aux témoignages des victimes.

      Plus de 2400 parties civiles ont pu s'exprimer, une démarche exceptionnelle dans un procès pénal français.

      Cet espace a permis de prendre la mesure de la souffrance et de reconnaître le statut des victimes, transformant un procès pénal en une scène de reconnaissance collective.

      5.2 La Parole des Victimes : Entre Reconnaissance et Contrainte

      Comme dans les commissions de vérité, la parole des victimes a été majoritairement celle du traumatisme.

      Le langage médical ("hypervigilance", "peur panique") et l'expression de la souffrance ont dominé.

      Limites de la reconnaissance : Toutes les victimes n'ont pas eu la même place.

      Les habitants de la rue du Corbillon, touchés par l'assaut policier du 18 novembre, ont longtemps été considérés comme victimes d'une opération policière et non du terrorisme, les reléguant à un statut secondaire.

      Canalisation de la colère : Les victimes en colère, notamment contre les défaillances de l'État (prévention, gestion des corps), ont vu leur discours tenu en lisière.

      Demande de compréhension : Certaines victimes, particulièrement des intellectuels, ont exprimé leur besoin de comprendre au-delà du crime individuel.

      Elles ont réclamé une analyse des "dynamiques collectives" ayant mené des jeunes hommes à commettre ces actes, soulignant le manque d'une partie du "scénario".

      5.3 Le Rôle Inattendu des Accusés et la Quête d'une Justice Restaurative

      Malgré l'absence d'incitation à coopérer (contrairement au modèle colombien), plusieurs accusés ont choisi de parler.

      Salah Abdeslam, silencieux pendant six ans, a parlé pendant trois heures dès le premier jour. Des échanges spontanés, parfois tendus, ont eu lieu entre accusés et victimes.

      Une scène finale troublante a marqué les esprits : à l'issue du procès, de nombreuses victimes se sont approchées des trois accusés sous contrôle judiciaire sur les marches du palais de justice pour leur parler.

      Cet acte spontané illustre une quête, par les victimes elles-mêmes, d'une forme de justice restaurative allant au-delà de la sanction pénale. Cela démontre que pour elles, la sanction seule ne suffit pas.

      6. Conclusion : Vers un Nouveau Paradigme Juridique ?

      Les expériences de la justice transitionnelle et des procès comme le V13 bousculent profondément le droit pénal traditionnel, qui produit une "vérité judiciaire" et non une vérité sociale ou historique.

      On observe une évolution d'un droit purement répressif vers un droit plus restauratif.

      Influence des critiques : Des approches critiques, notamment féministes, remettent en question les finalités du droit pénal.

      Convergence des luttes : Sandrine Lefranc établit un parallèle entre la réponse aux violences politiques de masse et celle aux violences sexuelles, une autre forme de violence de masse.

      Dans les deux cas, le droit pénal est jugé insuffisant et des alternatives (comme la justice restaurative) sont explorées pour permettre aux victimes de trouver autre chose que la seule sanction.

      Rôle des sciences sociales : Ces nouveaux espaces judiciaires ou para-judiciaires offrent une place inédite aux sciences sociales pour contribuer à la compréhension des événements collectifs.

    1. Synthèse : Comprendre le Logiciel de l'Esprit

      Résumé Exécutif

      Cette note de synthèse analyse les thèmes centraux de la présentation du professeur Uichol Kim, qui remet en question les paradigmes occidentaux dominants sur l'esprit humain et le succès.

      L'argument principal est que le "logiciel" occidental de l'esprit, fondé sur des hypothèses d'individualisme, de compétition ("la survie du plus apte") et de déterminisme biologique, est fondamentalement erroné.

      Le professeur Kim propose une vision alternative où la coopération, les relations et la co-création sont les véritables moteurs de l'évolution et du bien-être humains.

      Il soutient que l'évolution humaine a été rendue possible non par la compétition, mais par des innovations sociales et technologiques comme la maîtrise du feu et le langage, qui ont favorisé la collaboration.

      L'esprit humain n'est pas un système biologique fermé et prédéterminé, mais un système ouvert et socialement construit, façonné par les expériences et les relations interpersonnelles, un concept renforcé par les découvertes en épigénétique et en neurosciences.

      Enfin, des études empiriques à grande échelle, notamment les travaux de Daniel Kahneman et l'étude longitudinale de Harvard sur le développement des adultes, convergent vers une conclusion univoque :

      le véritable bonheur et une vie longue et saine ne découlent pas de la richesse ou du succès individuel, mais de la qualité des relations chaleureuses et du partage avec les autres.

      La satisfaction dans la vie (liée au revenu) et le bonheur (lié aux expériences relationnelles) sont deux concepts distincts, souvent confondus au détriment du bien-être humain.

      --------------------------------------------------------------------------------

      1. Critique des Hypothèses Fondamentales du "Logiciel" Occidental

      Le professeur Kim commence par souligner l'importance des "hypothèses de base sur la réalité" qui, selon Peter Drucker, forment le paradigme d'une culture et d'une science.

      Ces hypothèses, souvent implicites et résistantes au changement, déterminent ce qui est considéré comme un fait. La pensée occidentale repose sur plusieurs hypothèses qui sont remises en question.

      L'Individu comme Unité de Base (Socrate) : L'injonction socratique "Connais-toi toi-même" a placé l'individu comme l'unité d'analyse fondamentale, considérée comme "indivisible".

      La Compétition comme Moteur de l'Évolution (Darwin) : La théorie de l'évolution de Charles Darwin, basée sur la compétition, la sélection naturelle et la "survie du plus apte", a été largement appliquée à la société humaine, aux entreprises et aux individus, créant une croyance fondamentale en la nécessité de la compétition.

      Le Déterminisme Biologique et Pathologique (Freud) : Sigmund Freud a adopté un modèle biologique, définissant le comportement humain en termes de pulsions sexuelles ou violentes.

      Ses théories ont été généralisées à l'ensemble de la population à partir d'études de cas de patients "hystériques" et anormaux, ce qui constitue une extrapolation problématique.

      Le Comportementalisme Réductionniste (Skinner) : B.F. Skinner a étudié des pigeons et des rats pour comprendre les êtres humains, supposant que les comportements de base sont le fondement des comportements complexes, ignorant ainsi la spécificité humaine et le rôle du contexte social.

      Le Développement Cognitif sans Contexte (Piaget) : Le modèle de développement cognitif de Jean Piaget, bien qu'influent, est critiqué pour son omission quasi-totale du rôle des parents et des émotions, car Piaget observait principalement ses propres enfants de manière isolée.

      2. Un Paradigme Alternatif : L'Agentivité et l'Auto-Efficacité

      En opposition aux modèles déterministes, le professeur Kim met en avant le travail d'Albert Bandura sur le "soi en tant qu'agent proactif".

      L'être humain n'est pas simplement déterminé par la biologie ou l'environnement, mais possède une agentivité qui lui permet de façonner son propre avenir.

      Concept d'Auto-Efficacité : Il s'agit de la "croyance en sa propre capacité à organiser et exécuter les actions requises pour gérer des situations futures".

      Les personnes ayant une auto-efficacité élevée agissent, pensent et ressentent différemment, produisant leur propre avenir plutôt que de simplement le prévoir.

      Composantes Clés : L'intention, la connaissance, les objectifs, les croyances et les compétences sont essentiels.

      Influence Sociale : L'auto-efficacité n'est pas purement individuelle. Elle est modifiée et renforcée par :

      Le feedback : La pratique constante, comme le font les athlètes et les musiciens.    ◦ Le soutien social : Un élément crucial pour augmenter l'auto-efficacité d'une personne.

      3. Réévaluation de l'Évolution Humaine : La Coopération Prime sur la Compétition

      L'exposé conteste directement l'idée que la compétition est le principal moteur de l'évolution humaine en réexaminant notre héritage biologique et anthropologique.

      Deux Modèles de Chimpanzés : Il existe une distinction entre les chimpanzés communs (agressifs, violents, hiérarchiques) et les bonobos ou "chimpanzés pygmées" (dominés par les femelles, égalitaires, non-violents).

      L'espèce la plus proche de l'ancêtre humain est le bonobo, suggérant que nos racines sont plus coopératives qu'agressives.

      Le Rôle du Milieu : Les Homo sapiens ont évolué dans la savane subsaharienne, un environnement ouvert, tandis que les chimpanzés vivent dans la jungle.

      Adaptations Clés pour la Coopération :

      La Bipédie : Marcher sur deux pieds a permis de réduire le stress thermique, mais a surtout provoqué une "descente du larynx", rendant possible la production de jusqu'à 20 000 sons différents, base essentielle du langage et de la communication complexe.   

      La Maîtrise du Feu : La plus grande transformation. Les humains ont appris à contrôler le feu, ce qui a permis de cuire les aliments. La cuisson a détruit les bactéries et permis de consommer cinq fois plus de calories que la viande crue.  

      Développement du Cerveau : Cet apport calorique supplémentaire est la cause principale de la taille du cerveau humain (quatre fois plus grand que celui du chimpanzé), en particulier du lobe frontal.

      C'est en surmontant notre instinct (la peur du feu) que nous avons développé un plus grand cerveau, et non l'inverse.

      4. L'Esprit Humain comme Système Ouvert et Socialement Construit

      La présentation souligne une différence fondamentale entre les humains et les autres primates : la capacité de stocker et de transmettre l'information en dehors du corps.

      Le Corps comme Système Fermé, l'Esprit comme Système Ouvert : Alors que le corps est défini par la peau, l'esprit est un système ouvert.

      Le cerveau humain, avec ses milliards de neurones et ses billions de connexions potentielles, intègre de nouvelles idées et se reconfigure en permanence par l'interaction avec les autres.

      L'Explosion de la Créativité : Il y a 30 000 à 40 000 ans, l'art rupestre est apparu comme la "première technologie de l'information", permettant de projeter des images et de combiner des concepts (ex: l'homme-lion).

      Stockage Externe de l'Information :

      ◦ Un chimpanzé comme Kanzi peut apprendre à communiquer avec des symboles, mais ne peut pas enseigner cette connaissance à sa progéniture.

      À sa mort, tout son savoir disparaît.  

      ◦ Chez les humains, l'invention de l'écriture (cunéiforme), du papier et de l'imprimerie a permis un stockage et une transmission de l'information exponentiels, permettant aux générations futures de se connecter spirituellement et intellectuellement aux idées passées.

      Neurosciences et Épigénétique :

      Épigénétique : L'idée qu'un gène spécifique définit une expression unique est une simplification excessive. Les gènes peuvent être activés ou désactivés par des facteurs environnementaux (alimentation, exercice, stress, expériences). Nous naissons avec des gènes, mais leur expression dépend de l'expérience.  

      Le Cerveau comme Construction Sociale : Citant le neurobiologiste Gerald Hüther, le professeur Kim affirme que "le cerveau humain est une construction sociale".

      Les connexions neuronales se forment et se renforcent par l'expérience sociale et la répétition (ex: faire du vélo, conduire).   

      L'Absence d'Objectivité Pure : Toute information sensorielle passe par le système limbique, où elle est connectée aux émotions.

      Un même stimulus active un réseau cognitif et émotionnel.

      5. Contrastes Culturels : Individualisme Occidental vs Relationalisme Oriental

      Le "logiciel de l'esprit" varie considérablement selon les cultures.

      La Dualité Cartésienne : René Descartes, par son doute radical, a établi une dualité stricte entre le corps (soumis aux lois naturelles) et l'âme/esprit (capable de comprendre Dieu et la vérité).

      Cela a conduit à une pensée dichotomique (noir/blanc, bien/mal).

      La Vision Relationnelle Est-Asiatique : En Asie de l'Est, le noir et le blanc (Yin et Yang) ne sont pas en opposition mais en relation.

      Le caractère chinois pour "humain" (人間) signifie "entre les humains".

      ◦ La devise n'est pas "Je pense, donc je suis" mais pourrait être traduite par "Je suis entre, donc je suis" (I am between, therefore I am).

      Exemples Coréens :

      Culture du riz : La riziculture nécessite une coopération intense, favorisant une culture de l'harmonie.  

      Le concept de Cheong (情) : Une forme de connexion humaine profonde, de compassion et d'affection. Ne pas ressentir de compassion pour un enfant en train de se noyer signifie ne pas être humain.  

      Piété filiale : Le corps n'appartient pas à l'individu mais a été reçu des parents.

      Le succès est donc un devoir envers eux. Les enfants représentent le futur et les parents le passé, créant une interdépendance où les parents ne peuvent être heureux que si leurs enfants le sont.

      6. La Science du Bonheur : Les Relations Avant l'Argent et le Succès

      Les recherches empiriques les plus récentes en psychologie et en économie convergent pour démanteler le mythe selon lequel l'argent et le succès individuel mènent au bonheur.

      A. Les Travaux de Daniel Kahneman (Prix Nobel)

      Kahneman fait une distinction cruciale entre la "satisfaction de vie" (liée au "soi qui se souvient") et le "bien-être émotionnel" ou bonheur (lié au "soi qui expérimente").

      Caractéristique

      Satisfaction de Vie

      Bonheur (Bien-être Émotionnel)

      Prédicteurs

      Revenu, éducation, succès, atteinte d'objectifs

      Santé, relations, absence de solitude, partage

      Relation au Revenu

      Augmente avec le revenu

      Plafonne à un revenu médian (~75 000 $)

      Concept du Soi

      "Soi qui se souvient" (Remembering self)

      "Soi qui expérimente" (Experiencing self)

      Focalisation

      Évaluation globale de la vie, réalisations

      Expériences vécues dans le moment présent

      Conclusion de Kahneman : Les gens poursuivent la satisfaction de vie (liée au statut social et à l'argent) en pensant qu'elle leur apportera le bonheur. Cependant, les personnes à hauts revenus sont souvent plus stressées et ne consacrent pas plus de temps à des activités agréables. C'est une "illusion de focalisation" où l'on surestime l'impact d'un seul facteur (l'argent) sur le bien-être global.

      B. L'Étude Longitudinale de Harvard sur le Développement des Adultes

      Cette étude, menée sur 85 ans auprès de deux groupes (hommes de Harvard et hommes de quartiers défavorisés de Boston), est l'une des plus longues jamais réalisées.

      Découverte Surprenante : Le facteur le plus puissant influençant la santé et la longévité n'est ni l'argent, ni le succès, ni le QI.

      Principaux Résultats :

      ◦ Les personnes les plus satisfaites de leurs relations à 50 ans étaient les plus en bonne santé à 80 ans.   

      ◦ Les relations chaleureuses sont un meilleur prédicteur d'une vie longue et heureuse que le statut social, le QI ou les gènes.  

      La solitude tue. Elle est associée à un décès plus précoce (jusqu'à 10 ans), au stress, à la dépression et à une mauvaise santé physique.   

      ◦ La qualité des relations avec la mère dans l'enfance prédisait l'efficacité au travail et des revenus plus élevés.   

      ◦ Des relations chaleureuses avec les parents étaient liées à moins d'anxiété et une plus grande satisfaction à l'âge adulte.

      Conclusion de Robert Waldinger (directeur actuel de l'étude) : "La clé du vieillissement en bonne santé est : relation, relation, relation."

      Les personnes les plus heureuses et en meilleure santé sont celles qui ont cultivé les "connexions les plus chaleureuses avec les autres".

      7. Débat sur l'Analogie du "Logiciel"

      Lors de la session de questions-réponses, l'analogie du "logiciel de l'esprit" est remise en question.

      La Critique : Un intervenant suggère que l'analogie est potentiellement trompeuse.

      Un logiciel est un ensemble d'instructions spécifiques exécutées par un ordinateur standard.

      Le cerveau ne fonctionne pas de cette manière ; il s'apparente davantage à un réseau neuronal artificiel complexe d'où émerge un comportement.

      Des termes comme "culture", "récits" ou "habitudes" pourraient être plus appropriés et moins confus.

      La Réponse du Professeur Kim : Il reconnaît qu'il s'agit d'une analogie utilisée pour inciter les gens à penser différemment, en s'éloignant des vues déterministes (biologiques, cognitives-mécaniques) et en soulignant que le "logiciel" est invisible et que chacun fonctionne différemment.

      L'analogie vise à introduire le concept d'agentivité et l'importance du soutien social.

      Il admet ne pas avoir de meilleure analogie pour l'instant et souligne que les ordinateurs eux-mêmes sont des créations humaines qui imitent certaines de nos fonctions.

    1. Document d'Information : Utilisation des Systèmes d'IA pour la Prise de Décision dans l'État Moderne

      Synthèse Exécutive

      Ce document synthétise les perspectives d'experts sur l'application des systèmes d'intelligence artificielle (IA) dans deux domaines sociétaux critiques : le droit en Europe et la santé en Afrique du Sud.

      Dans le secteur juridique européen, l'IA est présentée comme une solution à la pression croissante entre l'augmentation des coûts du travail juridique et la nécessité de maintenir un état de droit de haute qualité face à une complexité réglementaire grandissante.

      Les applications clés incluent l'optimisation de la recherche d'informations juridiques, la révision de contrats, la diligence raisonnable et l'analyse de cas complexes.

      L'IA n'est pas considérée comme une menace pour l'emploi des juristes, mais plutôt comme un outil pour automatiser les tâches fastidieuses, leur permettant de se concentrer sur des activités à plus forte valeur ajoutée.

      Cependant, des risques importants subsistent, notamment le manque d'explicabilité des décisions prises par l'IA (risque d'aliénation) et la multiplication des erreurs en cas de faille dans un système automatisé.

      Dans le secteur de la santé sud-africain, confronté à des ressources limitées et à une forte prévalence de maladies transmissibles, l'IA offre un potentiel immense pour passer d'un modèle de santé curatif coûteux à un modèle préventif.

      Les applications vont du diagnostic assisté par l'analyse d'images médicales à la prédiction de l'apparition de maladies grâce à des modèles d'apprentissage automatique.

      Une vision d'avenir optimiste repose sur le déploiement de technologies à faible coût, comme les dispositifs portables (wearables), pour un suivi continu des individus.

      Ces données pourraient créer des "jumeaux numériques" des citoyens et, à terme, des villes entières, permettant une surveillance, une simulation et des interventions proactives en matière de santé publique à une échelle sans précédent.

      L'adaptation des technologies au contexte local à faibles ressources est une condition essentielle de succès.

      Enfin, le document souligne l'importance cruciale de la collaboration interdisciplinaire pour développer des systèmes d'IA qui soient non seulement techniquement performants mais aussi socialement pertinents et responsables.

      L'IA dans le Domaine Juridique : Relever les Défis en Europe

      L'analyse du professeur Henrik Palmer Olsen de l'Université de Copenhague met en lumière les tensions et les opportunités liées à l'intégration de l'IA dans le système juridique européen.

      Le Défi : La Pression entre le Coût et l'État de Droit

      Le principal défi identifié est une "pression" économique et qualitative.

      D'un côté, le travail juridique devient de plus en plus coûteux.

      De l'autre, la demande pour ce travail augmente en raison de la complexification croissante de la réglementation, due au développement technologique, économique et social.

      Les États européens sont donc confrontés au dilemme de maîtriser les dépenses tout en garantissant la haute qualité de l'état de droit, un principe fondamental de leur société.

      Le Rôle de l'IA : Soutien et Optimisation du Travail Juridique

      L'IA peut jouer un rôle de soutien essentiel pour résoudre cette tension de plusieurs manières :

      Recherche d'informations juridiques : L'IA peut analyser des milliers de pages de textes juridiques (lois, précédents judiciaires) de manière beaucoup plus rapide et fiable qu'un humain.

      Cela réduit considérablement le temps consacré à la recherche de sources pertinentes pour la prise de décision.

      Révision de contrats : Pour les grandes entreprises gérant de nombreux contrats, l'IA peut automatiser la vérification de la conformité des contrats entrants avec les standards internes, en s'assurant que les clauses requises sont présentes.

      Diligence raisonnable (Due Diligence) : Lors de l'acquisition d'une entreprise, l'IA peut analyser rapidement le portefeuille de contrats pour évaluer leur valeur économique et identifier les obligations qui en découlent.

      Analyse de cas complexes : Dans des affaires longues et complexes (par ex. fraude fiscale, cas environnementaux) impliquant des milliers de documents sur plusieurs années, l'IA peut aider à construire et visualiser des chronologies et des séquences d'événements, offrant ainsi une meilleure vue d'ensemble aux humains.

      Ces applications permettent d'accomplir un travail juridique de haute qualité à moindre coût.

      L'Impact sur la Profession Juridique

      Contrairement aux craintes courantes, l'IA ne devrait pas éliminer les emplois des juristes.

      Au contraire, elle est susceptible d'améliorer leurs conditions de travail en prenant en charge les aspects les plus "fastidieux" et répétitifs du métier, qui ne requièrent pas une compétence juridique de haut niveau.

      Les juristes pourront ainsi se consacrer aux tâches plus intéressantes et fondamentales, telles que la construction d'arguments, la défense des clients et la garantie de la justice.

      Risques et Préoccupations Essentiels

      L'utilisation de l'IA dans le domaine juridique n'est pas sans risques. Deux préoccupations majeures sont soulevées :

      1. Le risque d'aliénation par manque d'explicabilité : L'IA fonctionne différemment de l'intelligence humaine.

      Les décisions juridiques prises par certains algorithmes peuvent être difficiles, voire impossibles, à expliquer. Si les citoyens et même les professionnels ne peuvent pas comprendre comment une décision a été prise, cela peut entraîner une aliénation vis-à-vis des autorités de l'État.

      2. Le risque de multiplication des erreurs : Une faille dans un processus juridique automatisé ne provoque pas une seule erreur isolée, mais une erreur multipliée sur potentiellement des milliers de cas.

      Cela peut conduire à des violations massives des droits des citoyens si les systèmes ne fonctionnent pas correctement.

      Ces risques ne sont pas une perspective lointaine ; il est jugé crucial de les prendre en compte dès maintenant, lors du développement des modèles d'IA, notamment en concevant des systèmes où les humains restent "dans la boucle" pour superviser et collaborer avec l'IA.

      L'IA dans le Domaine de la Santé : Une Approche Préventive pour l'Afrique du Sud

      Deshen Moodley, de l'Université du Cap, expose les défis uniques du système de santé sud-africain et le potentiel transformateur de l'IA.

      Le Défi : Un Système de Santé sous Forte Pression

      Le système de santé sud-africain est décrit comme "très tendu" en raison de plusieurs facteurs :

      Ressources limitées : En tant que pays en développement, les fonds alloués à la santé sont restreints.

      Fardeau élevé des maladies transmissibles : Le pays fait face à une forte prévalence du VIH et de la tuberculose, ce qui met une pression énorme sur le système.

      Pénurie de personnel qualifié : Il y a un manque critique de médecins et d'infirmières.

      Modèle de santé curatif : Le système est principalement réactif, traitant les patients une fois qu'ils sont malades, ce qui implique des traitements coûteux et une gestion de crise constante.

      Le Rôle de l'IA : De la Détection à la Prévention

      L'IA, bien qu'encore sous-explorée en Afrique du Sud, a un potentiel immense pour améliorer la détection et, surtout, la prévention.

      Détection et diagnostic : L'IA peut être utilisée pour analyser automatiquement des images médicales (radiographies, etc.) ou pour recommander des diagnostics et des interventions.

      Santé préventive : C'est le domaine le plus prometteur.

      En utilisant des modèles d'apprentissage automatique et des techniques basées sur la connaissance, l'IA peut prédire l'apparition d'une maladie avant qu'elle ne se manifeste.

      Cela permet des interventions proactives et un passage crucial vers un modèle de santé préventive, particulièrement pertinent pour les pays à faibles ressources.

      Adapter l'IA aux Contextes à Faibles Ressources

      Un simple transfert de technologie des pays développés n'est pas une solution viable. Il est impératif de prendre en compte le contexte local. L'approche privilégiée se concentre sur :

      Technologies à faible coût : Développer des solutions open source, avec des coûts de déploiement et de maintenance réduits et de faibles besoins en puissance de calcul.

      Interopérabilité : Un projet concret, le "Open Health Mediator", a été développé en partenariat avec une ONG africaine pour une fraction du coût des solutions équivalentes dans les pays développés.

      Dispositifs portables (Wearables) à faible coût : À l'instar des téléphones portables, le prix des wearables devrait chuter, permettant une adoption à grande échelle en Afrique pour un suivi continu de la santé des individus.

      Vision d'Avenir : La Santé Préventive et les Jumeaux Numériques

      La vision optimiste pour les 10 à 20 prochaines années est centrée sur la convergence de plusieurs technologies pour une santé préventive à grande échelle.

      1. Suivi continu via les wearables : Une simple montre-bracelet mesurant la fréquence cardiaque ou l'ECG pourrait, grâce à l'IA, détecter l'humeur et l'état émotionnel d'une personne et prédire les états négatifs pouvant affecter sa santé.

      2. Le Jumeau Numérique individuel : La collecte continue de données via ces dispositifs crée une "empreinte virtuelle" ou un jumeau numérique de l'individu, un miroir de sa personne dans le monde virtuel.

      3. Le Jumeau Numérique d'une ville : En agrégeant les données des jumeaux numériques individuels, il devient possible de créer un jumeau numérique d'une ville entière.

      Ce modèle permettrait de surveiller la santé et le bien-être à une échelle sans précédent, de simuler la propagation de maladies, d'apprendre des interactions entre les individus et leur environnement, et de mettre en place des interventions proactives.

      Un tel système aurait été un "game-changer" lors de la pandémie de COVID-19.

      Cette vision ambitieuse repose sur la convergence de l'IA, des systèmes cyber-physiques (jumeaux numériques) et de la réalité virtuelle.

      L'Importance de la Collaboration Interdisciplinaire

      Les deux experts soulignent la valeur de l'environnement de recherche interdisciplinaire de l'IEA de Paris.

      Le fait d'être confronté à des spécialistes d'autres domaines (juristes, philosophes, technologues) a permis d'élargir leurs horizons, de générer de nouvelles approches à leurs propres problèmes de recherche et de repenser la manière de communiquer des idées complexes à un public non technique.

      Cette expérience renforce l'idée que le développement futur de systèmes d'IA ayant un impact sociétal majeur doit impérativement adopter une approche interdisciplinaire pour être efficace et responsable.

    1. Synthèse : Décomposition de la Discrimination

      Résumé Exécutif

      Cette étude, présentée par la Professeure Lina Restrepo-Plaza, propose une approche méthodologique innovante issue de l'économie expérimentale pour décomposer la discrimination en deux composantes distinctes :

      • la discrimination fondée sur les préférences (ou les goûts) et
      • la discrimination fondée sur les croyances (ou statistique).

      En utilisant une version modifiée du "Jeu des Biens Publics" dans le contexte post-conflit en Colombie, l'expérience vise à isoler les motivations sous-jacentes des comportements discriminatoires.

      Les résultats préliminaires révèlent des preuves claires de discrimination fondée sur les préférences.

      Notamment, les participants non-victimes du conflit ont tendance à discriminer les victimes ainsi que les ex-combattants.

      Un résultat majeur et contre-intuitif émerge : les victimes directes du conflit se montrent plus coopératives et moins discriminatoires envers les ex-combattants que ne le sont les non-victimes, suggérant une forme de résilience et une plus grande ouverture.

      L'importance de cette décomposition réside dans ses implications pour les politiques publiques.

      Une discrimination basée sur les croyances peut être corrigée par des campagnes d'information, tandis qu'une discrimination ancrée dans les préférences nécessite des interventions plus profondes, telles que la promotion du contact intergroupes pour réduire les préjugés.

      L'étude ouvre ainsi des voies pour des interventions anti-discriminatoires plus ciblées et potentiellement plus efficaces.

      --------------------------------------------------------------------------------

      1. Contexte et Problématique de la Discrimination

      La discrimination est un phénomène économique et social persistant et quantifiable à l'échelle mondiale. Des données récentes illustrent des disparités significatives :

      États-Unis (2022) : Les femmes gagnent 82 centimes pour chaque dollar gagné par un homme.

      États-Unis (2023) : Les Latinos gagnent 76 centimes pour chaque dollar gagné par un Américain blanc.

      Colombie : 75 % des Vénézuéliens gagnent moins que le salaire minimum, contre 43 % des Colombiens.

      Du point de vue de la science économique, la discrimination est principalement conceptualisée selon deux axes :

      1. Discrimination fondée sur les préférences ("Taste-based") : Un individu traite différemment une autre personne en raison d'une aversion ou d'un préjugé intrinsèque envers cette personne ou le groupe auquel elle appartient.

      C'est un comportement motivé par une antipathie qui n'est pas nécessairement rationalisée.

      2. Discrimination fondée sur les croyances ("Belief-based" ou statistique) : Un individu agit différemment en se basant sur des croyances ou des stéréotypes concernant les caractéristiques moyennes d'un groupe (par exemple, la productivité, la fiabilité).

      Le comportement n'est pas motivé par une aversion personnelle, mais par une inférence statistique, même si celle-ci est erronée.

      La principale difficulté méthodologique consiste à distinguer et mesurer l'influence respective de ces deux mécanismes, car les approches traditionnelles (comme la fourniture d'informations supplémentaires pour neutraliser les croyances) sont souvent "bruitées" et sensibles à des facteurs contextuels (voix, apparence, etc.).

      2. Une Approche par l'Économie Expérimentale

      Pour surmonter ces limites, la recherche utilise un protocole d'économie expérimentale basé sur le "Jeu des Biens Publics", un modèle canonique qui étudie la coopération et la confiance.

      2.1 Le Jeu des Biens Publics

      Le jeu se déroule entre deux participants anonymes. La mécanique est la suivante :

      • Chaque joueur reçoit une dotation initiale (par exemple, 15 $).

      • Chaque joueur peut décider de contribuer tout ou partie de cette somme à un "compte commun".

      • L'équipe de recherche bonifie le compte commun en ajoutant 2 $ pour chaque 5 $ qui y sont déposés.

      • La somme totale du compte commun (contributions + bonus) est ensuite divisée à parts égales entre les deux joueurs, quel que soit le montant de leur contribution individuelle.

      Ce dispositif crée un dilemme social :

      Coopération maximale : Si les deux joueurs contribuent la totalité de leur dotation, le gain collectif est maximisé, et leur gain individuel final est supérieur à leur dotation de départ (21 $ chacun dans l'exemple).

      Incitation à la défection : Un joueur a un intérêt individuel à ne rien contribuer tout en bénéficiant de la contribution de l'autre, ce qui lui permet de conserver sa dotation initiale et de recevoir la moitié du pot commun (il termine avec 25,5 $ tandis que le coopérateur n'a que 10,5 $).

      Échec de la coopération : Si personne ne contribue, personne ne bénéficie du bonus.

      La décision de contribuer est donc fortement influencée par les croyances qu'un joueur a sur le comportement de son partenaire.

      2.2 Population et Contexte de l'Étude

      L'expérience a été menée en Colombie auprès de 193 participants du SENA, un grand organisme public de formation professionnelle pour les populations vulnérables.

      Après le processus de paix, le SENA a intégré des victimes du conflit, des non-victimes (issues de milieux économiques vulnérables similaires) et des ex-combattants.

      Les participants savaient que leur partenaire anonyme pouvait appartenir à l'un de ces trois groupes :

      • Victime du conflit

      • Non-victime

      • Ex-combattant

      La présence d'ex-combattants dans le bassin de participants, bien que leur nombre soit faible (7), a rendu cette possibilité saillante et crédible pour tous.

      3. Le Dispositif de Décomposition

      L'étude utilise deux tâches successives pour isoler les composantes de la discrimination.

      Tâche

      Description

      Mécanisme de Discrimination Capturé

      1. Coopération Inconditionnelle

      Les participants décident combien contribuer pour chaque type de partenaire possible (victime, non-victime, ex-combattant), sans connaître le montant que l'autre contribuera.

      Préférences + Croyances. La décision est influencée à la fois par l'aversion potentielle pour un groupe et par les croyances sur la probabilité de coopération de ce groupe.

      2. Coopération Conditionnelle

      Les participants indiquent combien ils contribueraient pour chaque montant possible de contribution de l'autre (par ex. "si l'autre contribue 0, je contribue X ; s'il contribue 5, je contribue Y...").

      Préférences uniquement. L'incertitude sur le comportement de l'autre est éliminée.

      Si un participant contribue différemment face à une victime et une non-victime qui ont toutes deux contribué le même montant, cette différence ne peut être attribuée qu'à une préférence.

      L'étude évite de demander directement aux participants leurs croyances afin de contourner les biais de désirabilité sociale et de dissonance cognitive, qui poussent les gens à rationaliser leurs réponses.

      4. Résultats Préliminaires et Analyse

      L'analyse des données, bien qu'encore en cours pour la partie "croyances", fournit déjà des conclusions claires sur la discrimination fondée sur les préférences.

      4.1 Mise en Évidence de la Discrimination

      Discrimination envers les ex-combattants : Les victimes et les non-victimes discriminent toutes deux les ex-combattants.

      Cependant, les non-victimes discriminent beaucoup plus fortement que les victimes.

      Relations entre victimes et non-victimes :

      ◦ Les non-victimes discriminent les victimes.   

      ◦ De manière surprenante, les victimes manifestent une discrimination positive envers les non-victimes, se comportant mieux avec elles qu'avec les membres de leur propre groupe.

      4.2 Le Résultat Contre-intuitif : La Résilience des Victimes

      Le résultat le plus marquant est que les personnes ayant été directement exposées au conflit (les victimes) se montrent plus coopératives et moins enclines à discriminer les ex-combattants que la population non directement affectée.

      Ce constat suggère que l'exposition à des situations difficiles peut favoriser des comportements de résilience et une plus grande ouverture à la coopération.

      Ce résultat est qualifié de "très surprenant" et "porteur d'espoir".

      4.3 Données sur les Ex-Combattants

      Avec seulement sept ex-combattants dans l'échantillon, les données sur leur propre comportement sont anecdotiques.

      Cependant, l'observation initiale est qu'ils ne discriminent aucun groupe et se comportent de la même manière avec les autres qu'entre eux.

      5. Implications et Perspectives

      5.1 Implications pour les Politiques Publiques

      La capacité à décomposer la discrimination est cruciale pour concevoir des interventions efficaces :

      • Si la discrimination est principalement fondée sur les croyances, des campagnes d'information peuvent suffire à corriger les perceptions erronées et à mettre à jour les croyances des individus sur les autres groupes.

      • Si elle est principalement fondée sur les préférences, des interventions plus profondes sont nécessaires.

      Des stratégies basées sur le contact intergroupes, comme celles pratiquées au SENA où les différents groupes étudient ensemble, se sont avérées efficaces pour réduire les préjugés et les stéréotypes.

      5.2 Pistes de Recherche Futures

      La discussion a soulevé plusieurs axes pour de futures recherches :

      Adaptation à d'autres tâches : Appliquer cette méthode à d'autres jeux économiques (jeu de la confiance, jeu de l'ultimatum) pour tester la robustesse des résultats.

      Intégration de données qualitatives : Compléter l'approche quantitative en interrogeant les participants sur leurs représentations, même biaisées, pour comprendre les arguments qu'ils jugent "acceptables".

      Étude en jeux répétés : Analyser comment la discrimination évolue sur plusieurs tours d'interaction.

      Une expérience positive répétée avec un membre d'un autre groupe est-elle suffisante pour modifier un préjugé, et si oui, à quelle vitesse ?

      Cela permettrait de mesurer la "résilience du préjugé".

    1. Document d'Information : Repenser la Collaboration avec l'Ennemi

      Résumé Exécutif

      Ce document synthétise les réflexions d'Adam Kahane, directeur de Reos Partners, sur la nature et les mécanismes de la collaboration dans des contextes de profonds désaccords.

      L'analyse est issue de son travail de réécriture de son livre de 2017, Collaborating with the Enemy.

      L'idée centrale de Kahane est que la collaboration est définie par une tension fondamentale : la nécessité de travailler avec des personnes avec qui l'on est en désaccord pour résoudre des problèmes complexes, et la crainte que ce faisant, on trahisse ses propres valeurs fondamentales.

      Pour explorer cette dynamique, il propose un modèle de "cercles concentriques" qui classe les relations de la collaboration la plus proche à l'élimination de l'ennemi.

      L'objectif principal est de trouver des moyens d'élargir le cercle de la collaboration.

      Alors que la première édition de son livre se concentrait sur les approches individuelles, sa recherche actuelle vise à identifier et à comprendre les approches collectives qui favorisent une collaboration plus large et plus efficace.

      Celles-ci incluent des cadres constitutionnels et juridiques, des systèmes politiques et réglementaires, des normes culturelles et des processus de réconciliation.

      La discussion qui suit son exposé met en lumière des concepts clés tels que l'importance de trouver des objectifs communs, même minimes ; le rôle de la planification par scénarios non pas pour prédire mais pour façonner l'avenir ; et la prise de conscience que la collaboration peut également servir à créer des conflits en unissant un groupe contre un autre.

      1. Contexte et Problématique Centrale

      Adam Kahane est un praticien spécialisé dans la conception et la facilitation de dialogues multipartites sur des questions complexes depuis 1991.

      Son travail l'a amené à intervenir dans divers contextes, notamment :

      • Le processus de paix en Colombie, impliquant toutes les parties, y compris les factions armées.

      • Les chaînes d'approvisionnement alimentaire durable, réunissant des communautés, des entreprises et des régulateurs.

      • Les relations entre les États-Unis et la Chine, avec des acteurs de la sécurité et de la défense.

      • Le travail avec des peuples autochtones et insulaires du détroit de Torrès en Australie.

      Sa réflexion actuelle s'inscrit dans le cadre de la réécriture de son livre _Collaborating with the Enemy:

      How to work with people you don't agree with or like or trust_.

      La question fondamentale qui guide son travail peut être résumée par une formulation plus grandiose : "Comment diable pouvons-nous vivre ensemble ?"

      Les Quatre Approches face à une Situation Problématique

      Selon Kahane, face à une situation que nous jugeons problématique, quatre stratégies principales s'offrent à nous :

      1. Forcer (Make) : Tenter d'imposer notre volonté, indépendamment de ce que les autres veulent.

      2. S'adapter (Adapt) : Accepter la situation telle qu'elle est, car nous ne pouvons pas la changer.

      3. Sortir (Exit) : Quitter la situation (émigrer, démissionner, divorcer).

      4. Collaborer (Collaborate) : Travailler avec d'autres acteurs pour changer la situation.

      Son travail se concentre sur cette quatrième option.

      La Double Signification de la "Collaboration"

      Kahane souligne une dualité sémantique cruciale dans le mot "collaboration", qui est au cœur des défis qu'il explore.

      Sens positif : Travailler ensemble avec d'autres. Les recherches Google pour "collaboration" montrent des images de coopération harmonieuse.

      Sens négatif : Collaborer de manière traîtresse avec l'ennemi. Il illustre ce point avec une photo de 1944 montrant deux collaboratrices françaises punies par la tonture de leurs cheveux.

      Cette double signification révèle la tension inhérente à toute entreprise de collaboration :

      "D'une part, nous pensons que nous pourrions avoir besoin de travailler avec ces autres personnes pour arriver là où nous essayons d'aller, et d'autre part, nous craignons que le faire nous obligerait à trahir ce que nous tenons pour précieux."

      2. Un Modèle de Relations : Les Cercles Concentriques

      Pour mieux comprendre les frontières de la collaboration, Kahane propose un modèle de cercles concentriques illustrant différents niveaux de volonté d'interaction avec autrui :

      1. Collaboration : Le cercle intérieur, composé des personnes avec qui nous sommes prêts à travailler activement.

      2. Cohabitation : Les personnes avec qui nous ne voulons pas collaborer, mais avec qui nous sommes prêts à partager un espace (un foyer, une ville, un pays).

      3. Coexistence : Les personnes avec qui nous ne sommes pas prêts à cohabiter, mais dont nous tolérons l'existence à condition qu'elles restent séparées.

      C'est le principe de l'apartheid ("apartness").

      4. Élimination : Le cercle extérieur, composé de nos ennemis, des personnes que nous ne sommes même pas prêts à laisser coexister et que nous devons expulser ou éliminer.

      L'objectif de sa recherche est de comprendre comment "déplacer la frontière entre les personnes avec qui nous sommes prêts à collaborer et celles que nous considérons comme nos ennemis".

      3. Forces Motrices et Forces Restrictives

      La décision de collaborer ou non est influencée par des forces contradictoires.

      Forces Poussant à la Collaboration

      Forces Freinant la Collaboration

      Nécessité d'une action collective : Des défis qui exigent une réponse commune (ex: gestion des eaux usées dans la ville divisée de Nicosie, changement climatique).

      Différences réelles : Désaccords, méfiance et conflits d'intérêts concrets et non imaginaires.

      Peur du conflit violent : La crainte qu'une absence de collaboration ne mène à la guerre.

      Fragmentation et polarisation : Tendance au tribalisme, à la partisanerie, aux bulles d'information, à la démagogie et à la diabolisation.

      Sentiment d'interconnexion ("All My Relations") : Une conviction, notamment issue des traditions des Premières Nations, que nous sommes tous liés, que nous nous entendions bien ou non.

      Identification exclusive à son groupe ("mon peuple") : Une vision qui empêche de s'ouvrir à la collaboration avec des "autres".

      La diabolisation est un frein particulièrement puissant : "ces autres ne sont pas simplement nos adversaires ou nos ennemis, ce sont des démons, des diables. Et comment pourrions-nous collaborer avec le diable ? Nous ne le pouvons pas."

      4. L'Enquête Actuelle : Des Approches Individuelles aux Approches Collectives

      La question centrale qui anime la réécriture du livre de Kahane est de nature pratique : "Quelles approches permettent une collaboration plus nombreuse et de meilleure qualité ?".

      Il s'agit d'identifier des méthodes pour élargir le cercle des acteurs avec lesquels nous sommes disposés et capables de travailler.

      Le Passage de l'Individuel au Collectif

      La première édition de son livre se concentrait sur les approches individuelles, destinées à aider les individus à mieux collaborer. Ces approches étaient :

      • Accepter le conflit autant que la connexion.

      • Expérimenter pour avancer.

      • Reconnaître son propre rôle dans le système.

      Pour la seconde édition, Kahane souhaite compléter cette perspective en explorant les approches collectives.

      Il considère la relation entre le travail individuel et collectif comme une "bande de Möbius", où l'un ne va pas sans l'autre.

      Exemples d'Approches Collectives à Explorer

      Kahane a dressé une liste préliminaire d'approches collectives, qu'elles soient anciennes ou de pointe, qui permettent de collaborer au-delà des différences :

      Constitutions et accords : Cadres établis pour gérer les différences sans recourir à la violence.

      Organisation politique : Façons de s'organiser pour collaborer avec certains contre d'autres, ou contre un problème commun.

      Systèmes réglementaires : Mécanismes pour gérer les différences.

      Organisation des villes : Comment l'urbanisme peut faciliter la cohabitation et le travail en grande diversité.

      Politiques et "Nudges" : Interventions (comme celles d'Antanas Mockus à Bogota) conçues pour modifier les relations entre les gens, les faisant passer de la violence à la paix.

      Culture, valeurs et normes : Leur influence sur la capacité à collaborer.

      Réconciliation et guérison : Le rôle de la prise en charge des traumatismes collectifs et du rétablissement de la paix.

      5. Perspectives Issues de la Discussion

      Plusieurs intervenants ont enrichi la réflexion de Kahane avec des concepts et des exemples pertinents :

      Trouver un objectif commun, même minime : Même avec le pire ennemi, il est souvent possible de trouver un motif commun.

      Commencer par ce petit objectif peut créer une expérience de collaboration positive qui change la dynamique de la relation.

      La finalité de la collaboration : Consensus ou Agonisme ? : La collaboration vise-t-elle à atteindre un consensus ou à gérer une tension permanente ("agonisme") ? Kahane adopte une posture pragmatique : l'objectif est de résoudre le problème en question.

      Le meilleur scénario est de pouvoir vivre avec des différences et une pluralité permanentes. Il cite le président colombien Santos :

      "il est possible de travailler avec des gens avec qui nous ne sommes pas d'accord et avec qui nous ne serons jamais d'accord".

      La Planification par Scénarios comme Outil de Co-création : La méthode des scénarios, apprise chez Shell, peut être détournée de son objectif initial (prévoir et s'adapter à l'avenir). Utilisée dans des contextes de conflit (Colombie, Myanmar), elle devient un moyen pour des acteurs, même en guerre, de "co-créer des récits sur ce qui pourrait arriver afin d'influencer ce qui arrive".

      Le Droit au-delà des Constitutions : Des règles de procédure, telles que les exigences de supermajorité ou l'obligation de motiver les décisions, peuvent contraindre les acteurs à dialoguer, à faire des compromis et donc à collaborer.

      La Collaboration comme Moteur de Conflit : Une mise en garde cruciale a été formulée : "les gens collaborent principalement en partant d'un environnement pacifique pour créer plus de conflits".

      La collaboration se fait toujours avec certains et souvent contre d'autres, ce qui peut exacerber les conflits ou l'oppression.

      Le Cadre de la Justice Transitionnelle : Les cadres de la justice transitionnelle (commissions de vérité, réparations) offrent une approche systématique et globale pour aborder les problèmes de coexistence et de collaboration dans des contextes post-conflit, et sont de plus en plus appliqués à d'autres problématiques sociales.

    1. Document d'Information : Peut-on Réinventer les Lumières ?

      Synthèse

      Ce document d'information synthétise les arguments et les thèmes clés abordés lors de la séance de clôture du cycle "Peut-on réinventer les Lumières ?", organisée par l'Institut d'Études Avancées de Paris.

      Les interventions de Francis Wolf et Céline Spector, deux philosophes éminents, ont convergé vers une défense robuste et nuancée de l'universalisme, tout en examinant de manière critique les objections contemporaines, notamment celles issues des courants identitaires et postcoloniaux.

      L'argument central, porté par Francis Wolf, est que l'humanité forme une communauté morale unique, fondée sur des droits et des devoirs réciproques.

      Il déconstruit méthodiquement les critiques affirmant que les valeurs universelles ne sont qu'un masque pour la domination occidentale.

      En distinguant l'origine d'une idée de sa portée et en s'appuyant sur des exemples concrets de luttes pour la démocratie et la liberté à travers le monde (Printemps arabes, Iran), il soutient que l'universalisme est un outil d'émancipation essentiel. Il insiste sur la distinction fondamentale entre l'universel, qui garantit la diversité, et l'uniforme, qui la nie.

      Céline Spector prolonge cette analyse en se concentrant sur les critiques postcoloniales des droits de l'homme.

      Elle en systématise les principaux arguments (ethnocentrisme, fiction idéologique, outil de colonisation) tout en soulignant les paradoxes inhérents au concept de droits humains dès son origine.

      Son propos, en accord avec celui de Wolf, vise à réaffirmer la pertinence de cet héritage des Lumières face à ces objections.

      La discussion a ensuite exploré plusieurs concepts connexes, dont la notion de "pluriversel" (jugée contradictoire ou maladroite), l'existence de précédents non-occidentaux aux droits humains (la Charte du Mandé de 1236), et la tension persistante entre l'idéal universel et son application souvent défaillante ("deux poids, deux mesures").

      Enfin, le débat s'est ouvert sur les défis contemporains, tels que les droits de la nature face à la crise environnementale et le rôle de l'héritage des Lumières dans la construction d'une Europe capable de résister aux dynamiques impériales.

      --------------------------------------------------------------------------------

      Contexte de l'Événement

      La discussion s'est tenue dans le cadre de la séance de clôture du cycle de conférences de l'IEA de Paris, présidé par Betina Laville, sur le thème "Peut-on réinventer les Lumières ?".

      L'objectif était de conclure une année de réflexion sur la place de l'universel dans un monde qualifié de "fracturé" et de plus en plus contestataire envers l'héritage intellectuel européen.

      Les deux intervenants principaux étaient :

      Francis Wolf : Philosophe, professeur émérite à l'École Normale Supérieure, spécialiste de philosophie antique et auteur de travaux significatifs sur l'humanisme et l'universalisme, notamment Plaidoyer pour l'universel.

      Céline Spector : Philosophe, professeure à Sorbonne Université, spécialiste des Lumières (en particulier Montesquieu et Rousseau) et des questions européennes, auteure de No Demos. Souveraineté et démocratie à l'épreuve de l'Europe.

      Le Plaidoyer pour l'Universalisme de Francis Wolf

      Francis Wolf a structuré son intervention comme une défense des valeurs universelles, qu'il définit à travers une thèse fondatrice : "l'humanité forme une communauté morale de droit et de devoirs réciproques".

      Il se concentre principalement sur la réfutation des critiques qui jugent cet universalisme excessif, au profit de communautés morales restreintes ("infrahumaines").

      Les Critiques de l'Universalisme

      Wolf identifie deux grands courants critiques contemporains de l'universalisme :

      1. Les idéologies "de droite" : Nationalistes, racistes et xénophobes, elles nient l'existence de l'Homme en général pour n'admettre que des communautés de "semblables" ("nous" contre "eux").

      Cette vision, selon Wolf, est en pleine résurgence et se manifeste par le piétinement du droit international (depuis l'invasion de l'Ukraine), la remise en cause du droit des réfugiés (accords de Genève) et la montée des politiques discriminatoires ou d'épuration ethnique.

      2. Les idéologies identitaristes "de gauche" : Symétriques aux premières, elles reprennent des arguments hérités d'un "marxisme simplifié" selon lesquels toute prétention à l'universalité est un leurre masquant la domination.

      Réfutation des Arguments Anti-Universalistes

      Wolf examine et réfute systématiquement plusieurs arguments récurrents contre les valeurs universelles.

      Argument Critique

      Réfutation par Francis Wolf

      1. Aucune lutte ne peut se faire au nom de l'universel, car elle défend toujours des victimes particulières.

      Si les combats pour des minorités oublient qu'ils visent l'égalité pour tous, ils trahissent leur propre cause.

      Les colonisés n'ont pas lutté pour devenir colonisateurs, mais pour abolir le colonialisme.

      2. L'universel se présente comme neutre, mais ne l'est jamais ; il nie les relations de domination.

      Bien que l'universel soit parfois utilisé pour nier les injustices, il n'est pas nécessaire de se définir uniquement "en tant que" (femme, colonisé, etc.).

      Les identités sont métissées, fluides et non des essences réifiées.

      3. L'expérience des souffrances particulières est incommunicable et il n'y a pas de lieu neutre pour juger.

      Une injustice ne concerne pas que la victime ou le coupable, mais la communauté morale entière. Sans un "tiers lieu" permettant de juger, il n'y a plus de justice, seulement des vengeances. Toute souffrance a une dimension communicable.

      4. L'universel n'est que le masque des intérêts dominants.

      Cet argument, bien que souvent justifié par l'histoire (colonisation, guerre d'Irak), n'est pas généralisable.

      Les pires entreprises de domination (génocides) n'ont pas besoin de ce prétexte et se font au nom d'identités essentialisées ("sous-hommes", "bêtes nuisibles").

      5. Tout universel est en fait particulier ; c'est un autre nom de l'Occident.

      Concéder qu'un universel naît dans un contexte particulier n'en limite pas la portée. L'algèbre, née en Perse, n'est pas une science "iranienne".

      La démocratie et les droits humains sont réclamés par les peuples en lutte partout dans le monde (Printemps arabes, Hong Kong, Iran), et leurs despotes les rejettent en les qualifiant de "valeurs occidentales".

      Prétendre que l'Occident a seul inventé les droits humains est une "illusion occidentaliste" (Amartya Sen).

      La Vertu Émancipatrice de l'Universel

      Pour conclure, Wolf affirme que l'universalisme conserve sa force émancipatrice.

      Il pose la question : qui est le véritable ethnocentriste ?

      Celui qui croit en l'existence de consciences critiques dans toutes les cultures, ou celui qui essentialise les autres cultures en leur déniant cette capacité critique ?

      Il distingue enfin l'universel de l'uniforme. Loin d'effacer les particularités, les valeurs universelles (laïcité, liberté d'opinion, tolérance) sont la condition de leur coexistence.

      Elles constituent un "universel de second niveau", formel, qui garantit la diversité.

      La Critique Postcoloniale des Droits de l'Homme selon Céline Spector

      Céline Spector se déclare en "profond accord" avec Francis Wolf et concentre son propos sur la critique spécifique des droits de l'homme par les études postcoloniales et décoloniales.

      Les Paradoxes Originels des Droits de l'Homme

      Dès leur proclamation aux États-Unis (1776) et en France (1789), les droits de l'homme présentent des paradoxes fondamentaux :

      • Ils sont à la fois évidents et advenus (nés de révolutions).

      • Ils sont à la fois naturels et historiques.

      • Ils sont à la fois innés et civiques.

      • Ils sont à la fois universels et situés.

      Ces paradoxes ont nourri les critiques (marxistes, féministes) qui y voyaient une hypocrisie, notamment en raison de l'exclusion des femmes, des esclaves et d'autres minorités.

      Les Cinq Piliers de la Critique Postcoloniale

      Spector résume la critique postcoloniale des droits de l'homme en cinq arguments principaux :

      1. Ils ne sont pas universels mais occidentaux, protégeant uniquement les citoyens d'Europe.

      2. Ce sont des fictions idéologiques ayant servi à justifier la "mission civilisatrice" de la colonisation.

      3. Ils sont associés à une conception de la raison qui exclut les peuples "sauvages" ou "barbares", jugés incapables d'y accéder.

      4. La liste des droits est arbitraire et abusive, notamment l'inclusion du droit de propriété qui a servi à exproprier les peuples nomades.

      5. Ce sont les droits des colons et de leurs complices, qui n'avaient aucune volonté politique de mettre fin au pillage des colonies ou à l'esclavage.

      Tout en reconnaissant la nécessité de prendre en compte ces critiques pour révéler les "tensions inhérentes aux Lumières", l'approche de Céline Spector vise à formuler des objections à cette vision, rejoignant ainsi la défense de l'universalisme de Francis Wolf.

      Thèmes Clés de la Discussion

      La période d'échange avec le public a permis d'approfondir plusieurs thématiques.

      Le Concept de "Pluriversel"

      Interrogés sur cette notion issue des théories décoloniales, les deux intervenants expriment leur scepticisme :

      Francis Wolf y voit soit une contradiction dans les termes, soit une simple reformulation du fait que l'universel est toujours perçu depuis un point de vue culturel particulier, sans pour autant y être prisonnier.

      Céline Spector, citant la définition du Dictionnaire décolonial, le décrit comme une "critique radicale de l'universalisme".

      Elle considère ce concept comme une "tentative maladroite" de la part d'auteurs (Ramon Grosfoguel, Walter Mignolo, etc.) qui se retrouvent dans une impasse existentielle : vouloir lutter pour les droits sans utiliser l'outil des droits universels.

      Précédents Historiques et Application du Droit

      La Charte du Mandé (1236) : Cette charte, issue de l'empire du Mali, est évoquée comme un possible précédent africain à la reconnaissance de valeurs universelles, telles que l'égalité entre ethnies et religions, et la participation des femmes au gouvernement.

      Le "Deux Poids, Deux Mesures" : Un participant soulève le problème du "double standard" dans l'application du droit international.

      Céline Spector reconnaît la légitimité de cette critique mais met en garde contre une indignation qui dévalorise les institutions internationales (ONU, CPI), les rendant fragiles et poussant les puissances hégémoniques à simplement les quitter.

      Universalité, Environnement et Europe

      Droits de la Nature : La question d'un "droit à l'environnement" est soulevée comme un défi majeur pour réinventer les Lumières.

      La discussion porte sur la tension entre les droits humains et les "droits de la nature", un concept de plus en plus débattu juridiquement (ex: le fleuve Whanganui en Nouvelle-Zélande, la lagune Mar Menor en Espagne).

      Ce débat interroge la centralité de l'homme dans la définition de l'environnement.

      L'Héritage des Lumières pour l'Europe : Céline Spector propose de voir dans l'héritage de Montesquieu, et spécifiquement son modèle de "République fédérative", un outil puissant pour penser la résistance des démocraties face à la résurgence des empires.

      Francis Wolf abonde en ce sens, soulignant que la construction européenne illustre la primauté du demos (communauté politique) sur l'ethnos (communauté préexistante), un principe également au cœur de la résistance ukrainienne.

      Les "Lumières Noires" : Ce terme, associé à Curtis Yarvin, est décrit comme un "usage complètement perverti" des Lumières, désignant une technocratie oligarchique où une élite numérique domine des citoyens dépossédés de leurs droits.

      C'est l'antithèse même de l'idéal des Lumières.

    1. La Réflexion Dialogique : Synthèse des Idées de Steve Mann

      Synthèse Exécutive

      Le professeur Steve Mann (Université de Warwick), lors de sa résidence à l'Institut d'Études Avancées (IEA) de Paris, présente son projet de recherche sur la "réflexion dialogique".

      Il la définit comme une forme de conversation collaborative et médiatisée, conçue pour examiner les expériences et les idées, contrastant fortement avec la vision traditionnelle de la réflexion en tant qu'exercice solitaire et individuel.

      L'argument central de sa présentation est que les êtres humains possèdent un "moteur interactionnel" inné, une capacité fondamentale à l'empathie, à l'écoute et à l'interaction, rendant les pratiques dialogiques non pas artificielles, mais au contraire profondément ancrées dans notre nature.

      Mann suggère que l'IEA, dont la mission est de favoriser le dialogue, pourrait systématiquement documenter et analyser ces interactions fertiles, voire positionner la réflexion dialogique comme une de ses méthodes de recherche.

      Son propre plan de travail à l'institut consiste à réexaminer ses corpus de données à la recherche de marqueurs linguistiques de la réflexion dialogique, tout en explorant des domaines comme les études néonatales pour en consolider les fondements théoriques.

      --------------------------------------------------------------------------------

      1. Définition et Fondements de la Réflexion Dialogique

      La réflexion dialogique est présentée comme un processus collaboratif qui vise à dépasser la pensée individuelle à travers une interaction dynamique et une multiplicité de perspectives.

      Définition : Il s'agit d'une forme d'enquête par la parole, souvent structurée, qui permet d'examiner les expériences, les idées et les présupposés.

      Elle est fondamentalement médiatisée et collaborative.

      Origines du Concept : L'intérêt de Steve Mann pour ce sujet provient de plusieurs sources :

      "Cooperative Development" (Développement Coopératif) : Un modèle développé par son superviseur de thèse, Julian Edge, fortement influencé par les idées de Carl Rogers (respect, empathie, sincérité).

      Ce modèle met l'accent sur l'écoute active et utilise des techniques linguistiques spécifiques comme le "reflet" (reflecting) et la "focalisation" (focusing) pour soutenir l'émergence des idées du locuteur.   

      Travaux antérieurs : Un chapitre co-écrit avec le professeur Steve Walsh sur la réflexion dialogique, que Mann a estimé n'avoir fait qu'effleurer le sujet.   

      Recherche sur la Réflexivité : Des travaux sur la réflexivité dans les entretiens de recherche qualitative, analysant comment les chercheurs réfléchissent à leur propre identité et méthodologie.

      2. Contestation de la Vision Traditionnelle de la Réflexion

      Mann remet en question la sémiotique dominante qui présente la réflexion comme une pratique purement individuelle et solitaire.

      L'image du "Penseur" : La sculpture "Le Penseur" de Rodin est citée comme l'archétype de cette vision de la pensée individuelle et isolée.

      Mann note l'influence de Charles Baudelaire sur Rodin, soulignant le lien entre la forme physique et l'exploration des états émotionnels internes.

      La connotation négative : Cette vision individualiste a un "côté sombre", incarné par le mythe de Narcisse.

      La pratique réflexive est ainsi souvent perçue de manière péjorative comme une forme d'introspection excessive ou de "nombrilisme" (navel-gazing).

      Le Contexte Éducatif : Le système éducatif est souvent décrit comme "monologique", dominé par la parole de l'enseignant qui fournit des réponses à des questions que les élèves n'ont pas posées.

      Le travail de Mann vise à "perturber" ou "intervenir" dans ces normes d'interaction pour les rendre plus dialogiques.

      3. Le Concept du "Moteur Interactionnel"

      Pour contrer l'idée que le dialogue structuré est artificiel, Mann s'appuie sur des recherches en études néonatales, notamment celles de Stephen Levinson.

      Preuves chez les nouveau-nés : Des études montrent que les nouveau-nés interagissent avec leurs soignants quelques jours seulement après la naissance.

      On observe des preuves de prise de tour (turn-taking) et d'organisation séquentielle dans leur regard et leurs interactions.

      Une Capacité Innée : Levinson propose l'existence d'un "moteur interactionnel" (interactional engine), une capacité humaine spéciale et innée pour l'interaction.

      Cette capacité inclut des compétences cognitives comme l'attention conjointe, l'empathie et la recherche d'un terrain d'entente (common ground).

      Implications Fondamentales : Si l'empathie et l'écoute sont des aspects fondamentaux de l'expérience humaine dès le début de la vie, alors les pratiques qui les favorisent ne sont pas artificielles mais exploitent une disposition naturelle.

      Neurosciences et Interaction : Mann cite des études montrant que les processus cérébraux et cognitifs fonctionnent différemment lorsque les individus sont en interaction.

      Par exemple, le cerveau d'un nourrisson réagit différemment à une écoute dirigée vers lui par rapport à une écoute périphérique.

      De plus, les messages soutenus par des éléments multimodaux sont mieux assimilés par le cerveau.

      4. Outils et Méthodes pour la Pratique Dialogique

      Pour être efficace, la réflexion dialogique doit être médiatisée par des outils et un "étayage" (scaffolding) appropriés, au sens vygotskien du terme.

      Outil / Approche

      Description

      Outils vidéo (Iris Connect, VEO)

      Permettent aux praticiens (enseignants, médecins) d'analyser leurs propres interactions.

      E-portfolios et Podcasts

      Offrent des moyens multimodaux pour la création de sens et la réflexion.

      Mentorat et Coaching

      Projets qui structurent la pratique réflexive et l'intègrent dans le développement professionnel.

      Recherche-Action

      Approche visant à modifier les normes d'interaction au sein des séminaires ou des formations.

      5. Perspectives pour l'Institut d'Études Avancées de Paris

      Mann souligne l'alignement entre son projet et la mission de l'IEA, qui est de "promouvoir des discussions qui encouragent la réflexion".

      Témoignages de Résidents : Il cite le rapport annuel de l'institut, où des résidents témoignent de l'importance des conversations informelles et de la manière dont ces interactions ont fait évoluer de manière significative leur projet de recherche.

      ◦ _« Très enrichissant de discuter de manière informelle pendant le déjeuner et les apéritifs aussi.

      Ces conversations m'ont aidé à la fois à voir mon propre projet d'un point de vue non spécialiste et à avoir une idée des développements importants dans d'autres domaines. »_   

      « Grâce à l'interaction à l'IEA, l'orientation initiale de ma recherche a considérablement évolué depuis sa création. Cela m'a amené à examiner les questions de pouvoir, les structures sociétales et leur impact sur l'atteinte des objectifs de durabilité. »

      Propositions pour l'Institut :

      1. Documenter les processus : L'IEA pourrait-il systématiquement documenter et analyser les types d'interactions et de réflexions dialogiques qui s'y déroulent ?   

      2. Une nouvelle méthode de recherche : L'institut pourrait-il positionner la réflexion dialogique comme l'une de ses nouvelles méthodes de recherche, valorisant ainsi les processus collaboratifs au même titre que les productions écrites ?

      6. Plan de Recherche de Steve Mann

      Durant sa résidence, Mann prévoit de se concentrer sur plusieurs axes :

      Analyse de Données Existantes : Réexaminer ses corpus de données (les siens et ceux de ses étudiants) pour identifier des exemples de réflexion dialogique.

      Identification de Marqueurs Linguistiques : Rechercher des preuves linguistiques spécifiques de la réflexion, telles que :

      ◦ La création de liens et de résonances.  

      ◦ L'utilisation de métaphores, de récits, d'anecdotes.    ◦ Les stratégies d'atténuation (hedging) et de spéculation.   

      ◦ La signalisation de "zones grises" ou de "tiers-espaces".    ◦ Les "moments eurêka" (light bulb moments).

      Influence de Bakhtine : Explorer la nature multimodale et intertextuelle de la réflexion dialogique, en s'appuyant sur le concept d'hétéroglossie de Bakhtine (les voix, concepts et cadres internalisés que nous mobilisons dans le dialogue).

      Tension Centripète/Centrifuge : Étudier comment l'esprit oscille entre un désir de focalisation (centripète) et une volonté d'élargir les perspectives (centrifuge).

      7. Échanges avec les autres Chercheurs

      La présentation a suscité des réactions et des connexions avec les travaux d'autres résidents.

      Dialogue avec Sadi :

      ◦ Sadi exprime son intérêt pour l'approche de Mann afin d'améliorer les "formats" de l'IEA et mentionne l'approche de l'enquête humble (humble inquiry) d'Edgar Schein.  

      ◦ Il partage une expérience utilisant des micro-caméras qui révèlent une synchronisation des regards entre des personnes résolvant un problème.

      Cela illustre le "triangle psychosocial" : l'ego, l'alter et l'objet. 

      ◦ Il émet l'hypothèse que le succès de l'IEA réside dans l'absence de hiérarchie ou de compétition, ce qui permet aux chercheurs de se concentrer sur l'objet de la discussion plutôt que sur les relations interpersonnelles.

      Dialogue avec Eleanor :

      ◦ Eleanor établit un lien avec le concept de "co-construction" du sens (une poignée de main nécessite deux personnes).   

      ◦ Elle cite les travaux de Charles Goodwin ("Co-operation"), qui a analysé à un niveau micro-temporel comment la pensée se forme pendant que l'on parle.    ◦

      Elle recommande deux chercheuses françaises travaillant sur ces sujets : Aude-Marie Morgenstern et Maya Gratier, qui étudient les interactions entre mères et nourrissons et leur dimension "musicale".

    1. La Créativité : Perspectives Croisées des Neurosciences, de l'Art, de la Musique et de l'Intelligence Artificielle

      Résumé

      Ce document de synthèse analyse les thèmes et les arguments clés d'une table ronde sur la créativité, réunissant des experts en neurosciences, composition musicale, arts plastiques et intelligence artificielle.

      La discussion s'articule autour d'un cadre conceptuel définissant la créativité humaine selon quatre dimensions : la nouveauté, l'adéquation, l'authenticité et l'agentivité.

      Les intervenants explorent comment ces dimensions se manifestent dans leurs domaines respectifs.

      En intelligence artificielle, la créativité émerge par des mécanismes de curiosité et des algorithmes évolutionnistes, permettant à des robots de découvrir de manière autonome des solutions nouvelles et efficaces à des problèmes complexes, comme le démontrent les exemples du jeu de Go ou de l'apprentissage moteur.

      Dans le domaine artistique et musical, la créativité oscille entre la génération au sein de contraintes strictes (l'algorithme de composition de Mozart) et la transgression délibérée des conventions pour créer de l'inédit (l'hybridation chez Beethoven).

      Les bases neuroscientifiques révèlent le rôle central du cortex préfrontal, qui agit comme un moniteur capable d'inhiber des stratégies inefficaces pour laisser émerger de nouvelles solutions issues de la mémoire.

      Enfin, des exemples tirés du monde animal, notamment le poulpe et sa capacité de camouflage et de ruse ("métis"), suggèrent que la créativité est un phénomène plus large que l'activité purement humaine.

      La discussion conclut sur les limites actuelles de l'IA, qui excelle à produire des surfaces cohérentes mais peine encore à générer des œuvres dotées de la profondeur structurelle et de l'authenticité caractéristiques de la création humaine.

      --------------------------------------------------------------------------------

      1. Un Cadre Théorique pour la Créativité

      Étienne Koechlin, neuroscientifique, propose un modèle standard pour décomposer le concept de créativité en quatre dimensions fondamentales.

      Ce cadre sert de référence tout au long de la discussion pour analyser les différentes manifestations de la créativité.

      Dimension

      Description

      Concepts Clés

      Cognitives

      Nouveauté

      La capacité à produire quelque chose qui n'existait pas auparavant. Cette possibilité est inhérente même aux systèmes formels les plus fermés, comme le démontre le théorème de Gödel.

      Génération, innovation, possibilité de l'inédit.

      Adéquation

      La production nouvelle doit être pertinente par rapport à un contexte externe. Cela peut être la solution à un problème, ou une œuvre d'art qui résonne avec un public.

      Évaluation, pertinence, contexte, originalité (articulation nouveauté/adéquation).

      Conatives

      Authenticité

      L'acte créatif est l'expression d'un individu, souvent issue d'un déséquilibre interne (insatisfaction, état extatique).

      Le créateur cherche à répondre à ce déséquilibre.

      Expression individuelle, déséquilibre interne, énergie créatrice.

      Agentivité

      La créativité est une action visant à transformer ou influencer le monde. Il y a une volonté d'être effectif, d'avoir un impact.

      Action, volonté, transformation du monde, effectivité.

      Koechlin souligne que ces dimensions peuvent être présentes à des degrés divers selon l'activité (humaine, animale ou artificielle).

      Par exemple, une IA comme AlphaGo fait preuve de nouveauté et d'adéquation (coups créatifs pour gagner), et d'une forme d'agentivité (interagir avec un joueur humain), mais son authenticité est considérée comme très réduite.

      2. La Créativité dans les Systèmes Artificiels

      Pierre-Yves Oudeyer, chercheur en IA, présente comment des machines peuvent générer des comportements et des connaissances à la fois nouveaux, pertinents et efficaces, remplissant ainsi plusieurs critères de la créativité.

      2.1. La Curiosité comme Moteur de l'Exploration

      Le travail de l'équipe de P-Y. Oudeyer se concentre sur la modélisation de la curiosité, comprise comme le mécanisme poussant un agent (enfant ou robot) à explorer spontanément son environnement.

      Apprentissage Autonome : Un robot quadrupède, initialement sans connaissance de son corps ou de l'environnement, apprend par expérimentation.

      Guidé par des algorithmes de curiosité, il teste des actions (bouger ses membres, vocaliser) et observe les résultats.

      Découverte de Régularités : Le robot découvre progressivement des relations de cause à effet : pousser un objet avec son bras le fait bouger, vocaliser vers un autre robot provoque une imitation.

      Cette exploration, motivée par la curiosité, le mène à découvrir les interactions sociales.

      Étienne Koechlin relie cette approche à la recherche en neurosciences sur les moteurs de l'action.

      Il oppose deux visions : l'action pour accumuler des ressources (récompenses) et l'action pour acquérir de l'information et améliorer ses modèles internes du monde.

      La curiosité est au cœur de cette seconde vision : on agit là où l'on pense pouvoir apprendre le plus.

      2.2. Algorithmes Évolutionnistes et Apprentissage par Renforcement

      Des algorithmes inspirés de l'évolution biologique permettent de générer des solutions créatives que des ingénieurs n'auraient pas envisagées.

      Créatures Virtuelles : Dans une simulation, des "créatures" composées de cellules virtuelles (muscles, cellules rigides) sont générées aléatoirement.

      Un critère de "fitness" (capacité à avancer vite) est défini.

      Les créatures les plus performantes sont sélectionnées, leurs "gènes" sont mutés aléatoirement pour créer une nouvelle génération.

      Au fil des générations, des formes de corps et des stratégies de locomotion efficaces et inattendues émergent.

      Robots Physiques : Un robot physique apprend à se déplacer par essais et erreurs (apprentissage par renforcement). Initialement, ses mouvements sont aléatoires et maladroits.

      En quelques minutes, il découvre comment se retourner, puis se mettre sur ses pattes et marcher de manière robuste, capable de réagir aux perturbations.

      La stratégie de mouvement finale n'a pas été programmée par un humain, mais découverte par le robot lui-même.

      Ces mêmes méthodes sont à la base des succès d'AlphaGo, qui a produit des coups jugés "hautement créatifs" par les experts humains.

      3. La Créativité dans la Pratique Artistique

      Les intervenants issus des domaines de la musique et des arts plastiques illustrent la tension créative entre la contrainte et la liberté, et entre la tradition et l'innovation.

      3.1. Musique : Algorithmes et Transgressions

      Le compositeur Floris Guédy présente deux modèles de création musicale :

      Le Jeu de Dés de Mozart : Un système algorithmique pour composer des menuets.

      En lançant des dés, on sélectionne des mesures pré-écrites dans une matrice.

      Bien que basé sur le hasard, le système est ultra-contraint par des règles d'harmonie tonale (fonctions harmoniques : sujet, verbe, complément).

      Le résultat est toujours cohérent et varié, générant des milliards de combinaisons possibles.

      Ce système peut être généralisé pour simuler, avec le même modèle de base, les styles de compositeurs ultérieurs (Schumann, Debussy) en changeant simplement les paramètres.

      L'Hybridation chez Beethoven : L'analyse des brouillons de la 30ème sonate pour piano montre un processus créatif différent. Beethoven oppose deux éléments musicaux (A : monodique et piqué ; B : accords liés) et crée un troisième élément (C) en hybridant leurs caractéristiques.

      Ses carnets révèlent un processus de recherche active, d'essais et d'erreurs pour trouver le contraste maximal rendant l'hybridation la plus audible possible.

      Pour F. Guédy, ce type de créativité, qui consiste à "casser les conventions" d'une infinité de manières possibles, est difficilement simulable par une IA qui cherche plutôt à reproduire ce qui est statistiquement probable.

      3.2. Arts et Artisanat : Co-création et Matière Active

      Patricia Ribault, spécialiste en arts plastiques, met en lumière la créativité dans les processus de "faire" et les interactions.

      La Co-création à Murano : Lors d'un workshop, des étudiants en design présentent des dessins aux maîtres verriers de Murano.

      Les artisans, confrontés à des formes qui dépassent leur savoir-faire traditionnel, doivent inventer de nouvelles techniques.

      Ce moment de "cocréation" pousse les techniques traditionnelles au-delà de leurs limites.

      La Matière Active ("Active Matter") : Elle décrit son travail au sein du cluster d'excellence "Matters of Activity", où des chercheurs de toutes disciplines (scientifiques, ingénieurs, designers) étudient des pratiques comme le filtrage, le tissage ou la découpe sous l'angle de la matière elle-même comme agent actif.

      Visualisation de la Neuroplasticité : Elle présente le projet "Brain Roads", une collaboration entre artistes, designers et neurochirurgiens visant à visualiser la complexité de la plasticité cérébrale.

      Face aux limites des imageries traditionnelles (tractographie), les artistes proposent de nouveaux modèles graphiques (inspirés des cartes de métro, des voxels) pour mieux guider le geste du chirurgien et représenter l'expérience des patients en chirurgie éveillée.

      4. Les Bases Biologiques et Neuroscientifiques

      La discussion explore les mécanismes cérébraux sous-jacents à la créativité humaine ainsi que ses manifestations dans le monde animal.

      4.1. Le Rôle du Cortex Préfrontal

      Étienne Koechlin explique que le cortex préfrontal est la région clé qui "autorise" la créativité chez l'homme.

      Le Mécanisme de Contrôle et d'Ouverture : Cette région du cerveau monitore en permanence nos comportements et stratégies mentales.

      Lorsqu'une stratégie est jugée non pertinente ou inefficace, le cortex préfrontal l'inhibe.

      Cette inhibition permet à de nouvelles options, issues d'un "remixage" contextualisé de la mémoire à long terme, d'émerger.

      Gestion de la Propre Limitation : Le système est conçu pour prendre en compte sa propre limitation. Il accepte de "perdre le contrôle" pour permettre l'émergence de la nouveauté.

      Les nouvelles options sont ensuite évaluées : si elles sont probantes, elles sont confirmées et consolidées en mémoire, enrichissant le répertoire de l'individu pour de futures créations.

      L'Exemple du Test des 9 Points : Ce test classique illustre le processus.

      Pour relier 9 points avec 4 segments de droite sans lever le crayon, il faut abandonner des modèles mentaux implicites (ne pas sortir du carré, ne pas repasser sur un trait).

      La solution émerge lorsqu'on transgresse ces règles auto-imposées.

      4.2. La Créativité Animale : Le Poulpe et la "Métis"

      Patricia Ribault utilise l'exemple du poulpe pour illustrer une forme d'intelligence créative non-humaine, la "métis" (la ruse), théorisée par Marcel d'Étienne et Jean-Pierre Vernand.

      Un Être sans Structure Rigide : Le poulpe peut prendre et perdre forme, ce qui lui confère une plasticité exceptionnelle.

      Maître du Camouflage : Sa créativité s'exprime dans sa capacité à interagir avec la perception de l'autre.

      Le camouflage n'est pas seulement se fondre, mais "tromper celui ou ceux qui vous regardent". Il peut être défensif ou offensif (hypnotiser une proie).

      Le "Mimic Octopus" : Cette espèce est capable non seulement de se camoufler mais de changer son comportement pour imiter d'autres animaux en fonction de la situation.

      La Métis comme Forme de Créativité : La métis est décrite comme une "intelligence à l'œuvre dans le devenir", utilisant "la prudence, la perspicacité, la promptitude", mais aussi "la ruse, voire le mensonge".

      L'être "amétis", comme le poulpe, est "insaisissable" et capable de "retourner constamment des situations".

      5. Thèmes Transversaux et Conclusion

      La discussion finale aborde plusieurs questions clés sur la nature de la créativité et les distinctions entre l'humain et la machine.

      Authenticité et Subjectivité : La question de l'authenticité reste la plus difficile à attribuer aux IA.

      L'authenticité humaine est liée à un déséquilibre interne et à une intention expressive.

      Les IA peuvent simuler une forme de subjectivité primaire (en ayant des modèles de leurs propres connaissances), mais l'expressivité profonde reste un attribut humain.

      Hasard et Contrainte : Le hasard est une composante essentielle du fonctionnement cérébral, notamment via le "bruit neuronal" qui augmente lorsque les modèles du monde sont mis en défaut, ouvrant le "champ des possibles".

      Cependant, comme le montre le jeu de Mozart, un hasard apparent peut opérer au sein de contraintes très fortes.

      La créativité réside dans ce jeu entre ouverture (pensée divergente) et fermeture (pensée convergente).

      Les Limites Actuelles de l'IA : Une anecdote est partagée sur une IA chargée d'improviser dans le style de L'Art de la Fugue de Bach.

      Le résultat était bluffant en surface ("la chair"), mais ignorait complètement la structure fondamentale de l'œuvre.

      De même, un texte rédigé par une IA est décrit comme "très fluide", "cohérent en surface", mais sans "corps" ni profondeur sémantique.

      Sérendipité : Il est souligné que la créativité ne peut pas être planifiée.

      Elle émerge souvent de la sérendipité : la découverte de quelque chose d'intéressant par hasard en cherchant autre chose.

      Pour être efficace, la sérendipité nécessite cependant une capacité de reconnaissance de ce qui est intéressant, ce qui renvoie à la subjectivité et au modèle interne du créateur.

    1. Dossier de Synthèse : La Psychologie de l'Engagement

      Résumé Exécutif

      Ce document synthétise les concepts clés de la psychologie de l'engagement, tels que présentés par le professeur Fabien Girandola.

      La thèse centrale est que la persuasion traditionnelle, basée sur l'information et l'argumentation, est largement inefficace pour modifier durablement les comportements.

      En opposition, la théorie de l'engagement propose une approche contre-intuitive mais puissante :

      • amener les individus à réaliser un premier acte, peu coûteux et en situation de libre choix, pour les lier à cet acte et
      • les inciter à adopter des comportements plus significatifs par la suite.

      Des techniques comme le "pied-dans-la-porte" et "l'étiquetage", validées par des décennies de recherche expérimentale, démontrent qu'il est possible d'influencer les actions en structurant la situation plutôt qu'en tentant de convaincre les esprits.

      Un effet psychologique majeur de ces techniques est la "naturalisation" : les individus attribuent leur nouveau comportement à leur propre nature ("je suis altruiste") sans avoir conscience de la manipulation situationnelle qui en est la véritable cause.

      La maîtrise de ces techniques soulève des questions éthiques fondamentales, naviguant entre l'influence et la manipulation.

      1. L'Inefficacité de la Persuasion : Le Fossé entre Opinion et Comportement

      La démarche classique pour changer les comportements repose sur la persuasion : l'idée qu'en fournissant des informations et des arguments convaincants, on peut modifier les opinions des individus, ce qui entraînera une modification de leurs actions.

      1.1. Le Postulat de la Persuasion

      L'approche persuasive suppose une chaîne causale directe :

      1. Information : Présenter des faits (ex: "Le tabac tue").

      2. Conviction : L'individu intègre l'information et modifie son opinion.

      3. Action : L'individu ajuste son comportement pour qu'il soit cohérent avec sa nouvelle opinion.

      1.2. La Démonstration de l'Échec

      Des décennies de recherche en psychologie sociale, depuis les années 1960, montrent que ce lien est faible, voire inexistant.

      Savoir quelque chose ne garantit pas de se conformer à cette connaissance.

      Exemples courants :

      ◦ Les fumeurs savent que le tabac est nocif mais continuent de fumer.   

      ◦ La majorité des gens s'accordent sur l'importance de l'écologie mais n'adoptent que peu de comportements pro-environnementaux.

      L'Expérimentation de Bigman (1972) : Cette étude princeps illustre parfaitement le décalage entre l'opinion déclarée et le comportement réel.

      Phase de l'Expérience

      Résultat

      Sondage d'opinion

      95 % des passants déclarent qu'il est important de garder les rues propres.

      Mise en situation

      Confrontés à un papier à ramasser dans la rue, seulement 2 % des mêmes personnes effectuent le geste.

      Cette expérience fondatrice démontre que l'adhésion à une idée (la propreté) ne se traduit pas automatiquement en action.

      2. La Théorie de l'Engagement : Agir d'Abord, Penser Ensuite

      Face aux limites de la persuasion, la théorie de l'engagement, développée notamment par des chercheurs comme Kiesler, Jean-Léon Beauvois et Robert-Vincent Joule, propose de renverser la logique.

      Au lieu de viser les opinions pour changer les actes, elle vise les actes pour, par la suite, influencer les opinions et les comportements futurs.

      2.1. Définition et Principes

      Définition (Kiesler, 1971) : L'engagement est "le lien qui unit l'individu à son acte".

      Principe fondamental : Ce n'est pas l'individu qui s'engage de lui-même, mais la situation qui l'engage.

      L'objectif est d'amener une personne à réaliser de petits actes progressifs qui l'entraîneront vers des comportements plus coûteux qu'elle n'aurait pas réalisés spontanément.

      2.2. Les Facteurs Clés de l'Engagement

      Pour qu'une situation soit engageante, plusieurs facteurs doivent être réunis.

      Facteur

      Description

      Exemple

      Le Sentiment de Liberté

      C'est le facteur le plus crucial. L'individu doit avoir l'impression qu'il a choisi librement de réaliser l'acte.

      Les formules comme "Vous êtes libre d'accepter ou de refuser" ou "Faites comme vous voulez" augmentent considérablement le taux d'acceptation, car elles créent un sentiment de liberté, même si celui-ci est contextuellement contraint.

      Demander de signer une pétition en ajoutant "mais vous êtes libre de refuser" fait passer le taux d'acceptation de 15 % à 45 %.

      Le Caractère Public

      Un acte réalisé publiquement (signer une pétition, prendre la parole) est plus engageant qu'un acte privé.

      Le nom et la signature laissés lient l'individu à son action.

      Signer une pétition avec son nom complet.

      La Répétition de l'Acte

      Répéter un comportement renforce le lien d'engagement.

      Après avoir prêté un objet plusieurs fois, il devient difficile de refuser.

      Prêter un outil à un voisin chaque semaine.

      Le Coût de l'Acte

      Un acte qui demande un effort ou un sacrifice (en temps, en argent, en énergie) est plus engageant.

      Prêter sa voiture est plus engageant que de prêter un stylo.

      L'Étiquetage (Imputation Interne)

      Attribuer une qualité à une personne ("Je sais que vous êtes serviable") l'engage à se comporter conformément à cette étiquette.

      L'acte semble alors "naturel" pour l'individu.

      Dire à quelqu'un "Vous êtes vraiment quelqu'un de bien".

      Note importante : L'engagement ne fonctionne pas en présence de récompenses ou de punitions.

      Si une personne est payée ou menacée pour faire quelque chose, l'acte n'est pas attribué à une décision interne mais à la contrainte externe.

      Il n'y a donc pas d'engagement psychologique.

      3. Les Techniques de Soumission Librement Consentie

      Ces principes théoriques ont été déclinés en techniques d'induction comportementale concrètes, regroupées sous le nom paradoxal de "soumission librement consentie" :

      l'individu se soumet à une demande tout en ayant le sentiment d'avoir agi librement.

      3.1. Le Pied-dans-la-Porte : Demander Peu pour Obtenir Plus

      C'est la technique la plus connue.

      Elle consiste à faire accepter une première requête très peu coûteuse (l'acte préparatoire) pour augmenter significativement les chances que la personne accepte une seconde requête, beaucoup plus coûteuse (le comportement visé).

      Expérimentation de Freedman & Fraser (1966) - Scénario 1 : L'enquête à domicile

      Condition Expérimentale

      Requête

      Taux d'Acceptation

      Contrôle

      Demande directe : Accepter la visite de 2-3h d'une équipe d'enquêteurs pour fouiller la maison.

      22 %

      Pied-dans-la-porte

      1. Acte préparatoire : Répondre à un court questionnaire téléphonique (accepté par tous).<br>

      2. Requête finale (3 jours plus tard) : Accepter la visite de l'équipe d'enquêteurs.

      53 %

      Expérimentation de Freedman & Fraser (1966) - Scénario 2 : Le panneau dans le jardin

      Condition Expérimentale

      Requête

      Taux d'Acceptation

      Contrôle

      Demande directe : Planter un grand panneau de 4x4m pour la sécurité routière dans son jardin.

      17 %

      Pied-dans-la-porte

      1. Acte préparatoire : Apposer un petit autocollant pour la prévention routière sur sa vitre (accepté par tous).<br>

      2. Requête finale (3 jours plus tard) : Accepter de planter le grand panneau.

      76 %

      3.2. L'Étiquetage et le Pied-dans-la-Porte Implicite

      Cette approche combine l'acte préparatoire avec une valorisation de la personne, l'incitant à réaliser d'elle-même un comportement coûteux, sans qu'on le lui demande explicitement.

      Expérimentation de Joule et al. (2002) - Le billet perdu à Aix-en-Provence

      Le comportement visé est l'altruisme : rendre un billet de 10 € tombé de la poche d'un complice.

      L'acte préparatoire consiste à renseigner un "touriste" (un autre complice) sur un plan.

      La variable clé est la manière dont le touriste remercie la personne.

      Condition

      Réponse du "Touriste" après avoir été aidé

      Taux de Restitution du Billet

      Contrôle

      Pas d'interaction préalable avec le touriste.

      30 %

      Pied-dans-la-porte (Remerciement simple)

      "Merci."

      43 %

      Pied-dans-la-porte (Service)

      "Vous m'avez rendu un grand service."

      48 %

      Pied-dans-la-porte + Étiquetage 1

      "Vous êtes serviable."

      70 %

      Pied-dans-la-porte + Étiquetage 2

      "Vous êtes vraiment quelqu'un de bien."

      78 %

      Cette expérience démontre que l'on peut faire varier le taux d'altruisme de 30 % à 78 % uniquement en modifiant une interaction anodine quelques minutes auparavant.

      4. Conséquences Psychologiques et Éthiques

      4.1. La Naturalisation du Comportement

      L'effet le plus remarquable de l'engagement est que les individus n'ont pas conscience d'avoir été influencés. Interrogés sur les raisons de leur acte (ex: rendre le billet), ils répondent systématiquement :

      "C'est normal, je suis quelqu'un d'altruiste/généreux".

      Signification vs. Détermination :

      Signification : L'explication que l'individu donne à son comportement (interne, liée à sa personnalité).  

      Détermination : La cause réelle du comportement (externe, liée à la situation créée par l'expérimentateur).

      Les individus n'ont pas accès à la véritable détermination de leurs actes et la remplacent par une signification qui valorise leur "moi".

      4.2. La Frontière avec la Manipulation

      Le professeur Girandola insiste sur le fait que ces techniques sont puissantes et naviguent à la frontière de la manipulation.

      Leur connaissance est essentielle non seulement pour les utiliser à bon escient (santé publique, éducation) mais aussi pour s'en prémunir.

      Il rappelle que l'usage de ces techniques par les psychologues est encadré par un code de déontologie strict : "il n'y a pas d'action sans éthique".

      5. Lectures et Ressources Recommandées

      Pour approfondir le sujet, plusieurs ouvrages et articles ont été mentionnés :

      Ouvrages de référence :

      Petit traité de manipulation à l'usage des honnêtes gens par R.-V. Joule et J.-L. Beauvois.  

      La soumission librement consentie par les mêmes auteurs.    ◦ Psychologie sociale et Attitude et comportement par F. Girandola.

      Articles en ligne :

      ◦ Des articles de vulgarisation sur la plateforme The Conversation, notamment sur l'application des techniques de manipulation par Donald Trump ou dans le contexte des soldes.

      Vidéo :

      ◦ La reconstitution filmée de l'expérience du "billet perdu" est disponible en ligne.

      6. Conclusion et Perspectives

      La présentation s'est concentrée sur les fondements de la théorie de l'engagement et la technique du pied-dans-la-porte.

      Il a été précisé que d'autres aspects importants n'ont pas été abordés, notamment :

      • Les effets de l'engagement sur les opinions (via la théorie de la dissonance cognitive).

      L'escalade d'engagement, un processus où un individu persévère dans une décision ou un comportement qui s'avère négatif, simplement parce qu'il s'y est initialement engagé.

    1. 'Écoute dans le Développement Humain : Une Analyse de la Perspective de la Professeure Elinor Ochs

      Résumé Analytique

      Ce document de synthèse analyse les arguments principaux de la professeure Elinor Ochs concernant le rôle sous-estimé de l'écoute dans le développement de l'enfant.

      La thèse centrale est que les études développementales dominantes, principalement menées dans les sociétés occidentales post-industrielles, se sont concentrées de manière excessive sur la production de la parole par l'enfant dans des contextes dyadiques (parent-enfant), tout en négligeant la compétence cruciale de l'écoute, en particulier l'écoute incidente ("overhearing") au sein d'interactions multipartites.

      En s'appuyant sur des décennies de recherche ethnographique, notamment son travail fondateur au Samoa, Ochs démontre que dans de nombreuses sociétés, les enfants sont socialisés dès leur plus jeune âge pour devenir des auditeurs compétents au sein de conversations de groupe.

      Cette "formation" à l'écoute est facilitée par des "affordances" culturelles spécifiques, telles que l'architecture ouverte des habitations, les postures corporelles qui orientent l'enfant vers l'espace public, et une économie domestique qui valorise la continuité générationnelle et les ressources partagées.

      En contraste, le modèle occidental, avec ses espaces privés et son accent sur l'individualisme économique, favorise des interactions dyadiques centrées sur l'enfant, amplifiant son rôle de locuteur plutôt que d'auditeur.

      En conclusion, la professeure Ochs soutient que les interactions multipartites offrent des avantages développementaux uniques, exposant les enfants à une plus grande diversité de locuteurs, de perspectives et de variétés linguistiques.

      Ses recherches remettent en question l'universalité des modèles actuels d'acquisition du langage et appellent à une réévaluation du rôle de l'écoute comme une compétence socio-culturellement construite, essentielle à l'apprentissage, à la coopération et à l'intégration sociale.

      Introduction : La Perspective d'une Anthropologue Linguistique

      La professeure Elinor Ochs, de l'UCLA, est une anthropologue linguistique qui combine les disciplines de la linguistique et de l'anthropologie.

      Sa méthodologie principale est le travail de terrain ethnographique, utilisant des enregistrements audio et vidéo pour documenter de manière détaillée comment la communication façonne les situations sociales, les relations et les modes de pensée.

      Domaine de spécialisation : Elle a co-créé le sous-domaine de la "socialisation langagière", qui postule qu'en apprenant une langue, les enfants acquièrent simultanément une compétence socioculturelle pour devenir une "personne" au sein de leur communauté.

      Expérience de recherche :

      Samoa (1978-1988) : Étude longitudinale sur l'acquisition du langage chez de jeunes enfants dans un village rural.  

      États-Unis (années 80 et 2000) : Recherches sur les différences de classe sociale dans le discours de résolution de problèmes et une étude interdisciplinaire à grande échelle documentant la vie de 32 familles de la classe moyenne.   

      Autisme (depuis 1997) : Étude des pratiques communicatives des enfants sur le spectre autistique à la maison et à l'école.

      Le Paradigme Dominant dans les Études Développementales : La Primauté de la Parole sur l'Écoute

      La professeure Ochs commence par un constat : bien que la parole et l'écoute soient deux pratiques communicatives universelles, la parole reste de loin l'objet d'intérêt principal dans tous les domaines qui étudient le langage. L'accent est mis sur la production du langage, et non sur le processus qui distingue l'audition de l'écoute.

      Les Limites des Études Quantitatives

      Les études quantitatives sur le développement du langage chez l'enfant se concentrent sur la langue produite par l'enfant, souvent réduite au nombre de mots.

      Une préoccupation majeure du public, notamment concernant les différences socio-économiques ("word gap"), est née de ces études.

      Le Modèle Dyadique : La généralisation dominante est que "plus un enfant entend de mots qui lui sont directement adressés, plus son vocabulaire sera étendu".

      Conditions Idéales Supposées : Ce modèle repose sur des conditions très spécifiques :

      1. L'enfant est l'allocutaire principal dans une conversation dyadique (un locuteur, un auditeur).  

      2. L'interaction est en face à face.  

      3. Le langage utilisé est simplifié et affectif (langage adressé à l'enfant ou "parler bébé").

      La Négation de l'Écoute Incidente : Dans ce cadre, l'écoute de conversations d'autres personnes ("overhearing") est considérée comme ayant "peu ou pas de bénéfice développemental".

      Biais Culturel : Ces études sont principalement situées dans des sociétés occidentales post-industrielles, avec très peu de recherches menées dans des sociétés aux économies sociopolitiques différentes.

      Un Modèle Alternatif : L'Apprentissage par l'Écoute en Contexte Multipartite

      La thèse centrale de la professeure Ochs, étayée par des recherches ethnographiques, est qu'un autre modèle d'apprentissage existe et est courant dans de nombreuses sociétés.

      Arguments Clés

      Argument

      Description

      Argument 1

      Les études développementales valorisent les conversations dyadiques fréquentes où le jeune enfant est locuteur ou allocutaire principal, motivant des interventions éducatives dans le monde entier.

      Argument 2

      Des études ethnographiques montrent que dans certaines sociétés, les nourrissons et les tout-petits participent régulièrement à des conversations multipartites en tant qu'auditeurs incidents légitimes ("legitimate overhearers") ou participants secondaires.

      Argument 3

      Qu'ils soient immergés dans des contextes multipartites ou dyadiques, les enfants neurotypiques acquièrent le langage avec succès dans différents contextes socioculturels.

      Argument 4

      Les interactions multipartites possèdent leurs propres affordances développementales, exposant les enfants à une diversité de locuteurs, de perspectives et de variétés linguistiques, et leur apprenant à adapter leur discours à différents interlocuteurs ("recipient design").

      Argument 5

      Les compétences d'écoute sont renforcées dès la petite enfance par des alignements corporels multipartites tournés vers l'extérieur et par des environnements construits ouverts qui offrent un accès auditif et visuel aux espaces publics.

      Étude de Cas Ethnographique : Le Village Samoan

      Le travail de terrain de la professeure Ochs au Samoa, il y a près de 50 ans, constitue la principale source de données pour son argumentaire.

      Contexte Linguistique et Social

      Langue Complexe : La langue samoane est ergative, avec des ordres de mots multiples, deux registres phonologiques, et un vocabulaire de respect complexe.

      Société Hiérarchique : La société est structurée avec des personnes titrées (grands chefs, orateurs) et non titrées.

      Absence de "Parler Bébé" : Les soignants n'utilisent généralement pas de langage simplifié ou de "parler bébé" avec les nourrissons. Ils n'étiquettent pas les objets et posent rarement des questions dont ils connaissent la réponse.

      Apprentissage Immersif : Les enfants acquièrent le samoan parlé en étant au milieu d'interactions multipartites.

      Les Affordances Environnementales et Corporelles pour l'Écoute

      Ochs identifie deux types principaux d'affordances qui favorisent une culture de l'écoute.

      1. Environnements Construits Ouverts :

      ◦ Les maisons traditionnelles samoanes n'ont ni murs extérieurs ni murs intérieurs. L'espace est ouvert, avec des nattes en feuilles de cocotier pour l'ombre.   

      ◦ Les maisons sont regroupées en concessions familiales ouvertes et proches de la route principale, donnant accès aux conversations publiques.  

      ◦ Les interactions simultanées à l'intérieur et à l'extérieur de la maison sont courantes, et les habitants sont habitués à écouter plusieurs conversations à la fois.  

      ◦ En revanche, les maisons de style européen (coloniales), bien que prestigieuses, sont murées, rectangulaires et moins appréciées car elles limitent l'accès auditif et sont très chaudes.

      2. Alignements Corporels Orientés vers l'Extérieur :

      Nourrissons : Ils sont souvent "nichés" dans les bras d'un soignant (adulte ou aîné) de manière à faire face à l'extérieur, vers l'espace public et la communauté. Ils sont portés sur le dos, sur la hanche, ou assis devant le soignant, regardant dans la même direction que les autres participants.  

      Enfants plus âgés : Ils doivent s'asseoir en tailleur (ne pas montrer la plante des pieds) et observer activement les personnes à l'intérieur de la maison ainsi que celles sur la route depuis le bord de la maison. Leurs tâches (messagers, service, etc.) les rendent mobiles et actifs dans la communauté.  

      ◦ Le mot samoan pour "respect" (fa'aaloalo) est composé du préfixe fa'a et de alo, qui signifie "visage", impliquant l'idée de "se tourner vers l'autre".

      Hypothèses Socio-Économiques et Questions Ouvertes

      La professeure Ochs relie ces différents modes d'interaction à la structure économique de la famille.

      Le Modèle de la Continuité Familiale (ex: Samoa) :

      ◦ Les enfants sont élevés pour soutenir les ressources économiques partagées de la famille et assurer la continuité générationnelle des biens.  

      ◦ Dans ce contexte, "la famille a un investissement pour que l'enfant écoute". L'écoute est une compétence essentielle pour apprendre les dynamiques sociales et économiques du groupe.  

      ◦ Ce modèle favorise la participation de l'enfant en tant qu'auditeur dans des conversations multipartites.

      Le Modèle de l'Indépendance Individuelle (ex: familles néolibérales américaines) :

      ◦ Les enfants sont élevés pour devenir des individus économiquement indépendants, un héritage culturel où les droits de succession ont été abolis bien avant la révolution industrielle.    ◦ L'accent est mis sur le développement rapide de l'enfant en tant qu'individu, ce qui favorise les interactions dyadiques intenses et centrées sur l'enfant.

      Questions Centrales pour la Recherche Future

      La présentation se termine par une série de questions fondamentales :

      1. Les habitats (ouverts ou murés) et les orientations corporelles peuvent-ils influencer la phénoménologie de l'écoute dans la petite enfance ?

      2. Ces facteurs socioculturels agissent-ils comme des "amplificateurs culturels" ?

      Un habitat privé et clos amplifie-t-il l'écoute en tant qu'allocutaire dyadique, tandis qu'un habitat ouvert amplifie l'écoute en tant que participant secondaire ?

      3. Les études développementales actuelles n'examinent-elles qu'une "fraction des possibilités" en matière d'environnements et d'affordances pour l'écoute ?

    1. Synthèse : L'Ascension de la Diversité comme Valeur Politique

      Résumé

      Ce document de synthèse analyse l'exposé de la professeure Lorraine Daston sur l'ascension extraordinairement rapide de la diversité en tant que valeur politique fondamentale.

      Le point de départ est un paradoxe : alors que les changements de valeurs morales sont généralement des processus séculaires, voire millénaires (ex. l'abolition de l'esclavage, l'égalité des sexes), la diversité s'est imposée comme un bien allant de soi en quelques décennies seulement, à partir des années 1970.

      L'hypothèse centrale de Daston est que cette ascension fulgurante n'est pas un événement ex nihilo. La valeur politique actuelle de la diversité "s'est appuyée" (piggybacked) sur des incarnations antérieures et bien établies de cette même valeur dans d'autres domaines.

      Le document retrace cette généalogie en trois étapes clés :

      1. La Diversité Esthétique : Depuis l'Antiquité (Pline l'Ancien), la "fécondité exubérante" de la nature, notamment la variété infinie des fleurs, a été perçue comme une forme de beauté pure, gratuite et admirable.

      Cette valeur a atteint son apogée aux XVIe-XVIIe siècles avec l'afflux de nouveautés et les cabinets de curiosités (Wunderkammern).

      2. La Diversité Économique : À partir du XVIIIe siècle, la diversité change de nature et s'associe à l'efficacité. L'exemple de la manufacture d'épingles d'Adam Smith illustre comment la division du travail – une forme de diversité des tâches – devient synonyme de productivité et d'innovation.

      3. La Synthèse Biologique : Au XIXe siècle, les biologistes, notamment Henri Milne-Edwards et Charles Darwin, fusionnent ces deux conceptions.

      Ils appliquent le principe de la division du travail à l'organisme vivant et à l'évolution des espèces, présentant la nature non plus comme un simple terrain de jeu esthétique, mais comme une "économie sauvagement compétitive" et efficace.

      C'est la naissance conceptuelle de la "biodiversité".

      La valeur politique contemporaine de la diversité, née aux États-Unis dans le sillage des mouvements pour les droits civiques des années 1960, puise sa force et son évidence dans ce double héritage.

      Elle invoque à la fois l'efficacité économique (les équipes diverses sont plus performantes) et la beauté esthétique, comme l'illustre la métaphore de la "Nation Arc-en-ciel" de Nelson Mandela, qui évoque simultanément la splendeur de la flore sud-africaine et l'harmonie multiraciale.

      La session de questions-réponses explore les critiques contemporaines (de gauche comme de droite), les contextes nationaux spécifiques et les distinctions conceptuelles cruciales avec des notions comme le pluralisme, l'égalité et l'équité.

      --------------------------------------------------------------------------------

      Introduction : Une Ascension "Météorique"

      L'analyse de Lorraine Daston part d'un constat qu'elle qualifie d'« étonnant » : la rapidité avec laquelle la diversité s'est établie comme une valeur politique, non seulement dans les arguments et la législation, mais aussi comme une intuition morale viscérale.

      Un changement de valeur exceptionnellement rapide : Les changements de valeurs fondamentales sont des processus extrêmement lents. Daston cite plusieurs exemples :

      L'esclavage : Il a fallu des millénaires pour passer d'une acceptation quasi universelle dans l'Antiquité à une réprobation quasi universelle aujourd'hui.   

      L'égalité des femmes : Les arguments en sa faveur remontent au XVIIe siècle en Europe, mais la législation sur le droit de vote n'est intervenue qu'au XXe siècle, et l'enracinement de cette valeur dans la conscience collective reste discutable.  

      L'égalité économique : Défendue depuis le XVIIIe siècle, elle n'a pas encore franchi le seuil de la législation, et encore moins celui de l'intuition morale.

      Un indicateur quantitatif : L'analyse des données de Google Ngram, qui mesure la fréquence des mots dans un corpus de millions de livres, montre une augmentation "météorique" de l'usage du mot "diversité" à partir des années 1970.

      Années 1970 : La hausse est principalement liée à la biodiversité.  

      Années 1980 : Le terme commence à être appliqué à des contextes sociaux et politiques.  

      Influence américaine : Les courbes pour le français (diversité) et l'allemand (Diversität) suivent celles de l'anglais avec un décalage d'environ cinq ans, suggérant une direction d'influence des États-Unis vers l'Europe.

      En allemand, le mot "Diversity" est d'abord importé de l'anglais avant d'être naturalisé en "Diversität".

      L'Hypothèse Centrale : Une Préhistoire de la Valeur

      Pour expliquer cette ascension rapide, Daston avance que "l'incarnation la plus récente de la diversité dans le domaine politique puise son évidence en partie dans des versions antérieures de la diversité, d'abord comme valeur esthétique, puis comme valeur économique".

      Chaque nouvelle version s'est appuyée sur la précédente, créant une sorte de palimpseste de significations qui confère à la valeur politique actuelle sa force d'évidence.

      Les Incarnations Historiques de la Diversité

      1. La Diversité comme Valeur Esthétique : La Surabondance de la Nature

      Depuis l'Antiquité, la nature, par sa "fécondité débordante" et son "excès exubérant", a été le premier exemple de la diversité en tant que beauté.

      Pline l'Ancien (~78 ap. J.-C.) : Il s'émerveillait de la prolifération "magnifique mais apparemment inutile" des fleurs, qu'il considérait comme la preuve que la nature est "dans son humeur la plus enjouée".

      Emmanuel Kant (XVIIIe siècle) : Pour illustrer la beauté pure, qui ne sert aucun but et ne peut être subsumée sous aucun concept, il choisit les fleurs comme exemple premier.

      L'expansion européenne (XVIe-XVIIe siècles) : L'arrivée de produits exotiques (tulipes du Levant, porcelaines de Chine, coquilles de nautile de l'Indo-Pacifique) a enrichi cette esthétique de la diversité, visible dans les natures mortes et les peintures de l'époque.

      Les cabinets de curiosités (Wunderkammern) : Considérés comme l'apogée de cette esthétique, ils rassemblaient des objets hétéroclites (artefacts, animaux empaillés, etc.) dans un esprit d'extravagance et de mépris pour la frugalité.

      2. La Diversité comme Valeur Économique : L'Efficacité et la Division du Travail

      À la fin du XVIIIe siècle, la diversité est associée à un concept radicalement différent : l'efficacité économique.

      La manufacture d'épingles : Décrite dans l'Encyclopédie de Diderot et D'Alembert, cette usine normande illustre comment la division de la fabrication en 18 opérations distinctes permet une efficacité "époustouflante" (jusqu'à 48 000 épingles par jour).

      Adam Smith (1776) : Dans La Richesse des Nations, il utilise cet exemple pour démontrer comment la division du travail favorise l'efficacité et l'innovation technologique.

      Applications étendues : Au XIXe siècle, ce principe est appliqué bien au-delà de l'industrie :

      Charles Babbage : S'en inspire pour concevoir le premier ordinateur, la machine analytique.    ◦ Émile Durkheim : L'utilise pour sa théorie de la solidarité organique dans les sociétés avancées.

      3. La Synthèse Biologique : De la Physiologie à la Biodiversité

      Ce sont les biologistes qui ont réuni les conceptions esthétique et économique de la diversité.

      Henri Milne-Edwards : Confronté à l'infinie variété des organismes, ce zoologiste français y a décelé un principe organisateur fondamental : la division du travail.

      Pour lui, "c'est surtout par la division du travail que la perfection est obtenue".

      Le corps d'un organisme complexe est comme une usine où chaque organe a sa fonction (le cerveau ne digère pas, l'estomac ne pense pas).

      Charles Darwin (1859) : En lisant Milne-Edwards, il relie le principe de la division du travail à la spéciation dans L'Origine des espèces.

      La nature n'est plus seulement un terrain de jeu, mais une "économie sauvagement compétitive" et extrêmement efficace.

      C'est le moment où la "corne d'abondance de Pline fusionne avec la manufacture d'épingles d'Adam Smith", donnant naissance à l'idée moderne de biodiversité.

      L'Émergence de la Diversité comme Valeur Politique

      Origines aux États-Unis : De l'Égalité à la Diversité

      Le consensus académique situe le début de l'ascension de la diversité politique aux États-Unis dans les années 1960.

      Le Mouvement des Droits Civiques : Les campagnes pour les droits des Afro-Américains, puis des femmes, se sont menées sous la bannière de l'égalité pour tous les citoyens, indépendamment de la race, du genre ou de la sexualité.

      L'argument était démographique : si un groupe représente X% de la population, il devrait être représenté à hauteur de X% dans toutes les sphères de la société.

      La controverse de l'Affirmative Action : Les programmes conçus pour appliquer ce principe (quotas, discrimination positive) se sont avérés politiquement controversés.

      Le tournant de la "Diversity Management" : Après que la Cour Suprême a jugé l'affirmative action inconstitutionnelle dans plusieurs décisions marquantes, une nouvelle spécialité a émergé : la gestion de la diversité.

      Dans les années 1990, le terme "diversité" a supplanté celui d'"égalité" dans les politiques publiques et privées.

      Influence et Exemples Mondiaux

      Cette nouvelle valeur s'est ensuite propagée à l'échelle mondiale.

      Union Européenne : Le concept est intégré dans les directives aux États membres vers 2012.

      Afrique du Sud post-apartheid : Cet exemple est particulièrement révélateur de la fusion des différentes couches de la valeur.

      L'archevêque Desmond Tutu a qualifié les Sud-Africains de "peuple arc-en-ciel de Dieu", un symbole religieux évoquant l'alliance après le Déluge.  

      Nelson Mandela a repris cette phrase à des fins civiques, soulignant les connotations multiraciales de l'arc-en-ciel.

      Dans son discours présidentiel, il déclare : "Nous contractons une alliance : nous construirons une société dans laquelle tous les Sud-Africains, noirs et blancs, pourront marcher la tête haute... une nation arc-en-ciel en paix avec elle-même et avec le monde."

      Cette métaphore puise sa force dans le double héritage de la diversité :

      Efficacité économique : L'argument selon lequel des équipes diverses obtiennent de meilleurs résultats par la combinaison des perspectives.

      Beauté esthétique : Mandela a souvent associé l'arc-en-ciel à la flore de son pays, comme "les célèbres jacarandas de Pretoria".

      Le cœur de la valeur politique de la diversité reste "la splendeur de la prairie en fleurs".

      Analyses et Critiques Contemporaines (Session Q&R)

      La discussion qui a suivi l'exposé a permis d'explorer plusieurs nuances et critiques contemporaines de la notion de diversité.

      Thème

      Analyse et Points Clés

      Déclin et Critiques

      L'observation d'un léger déclin dans l'usage du mot "diversité" après 2010 pourrait s'expliquer par l'émergence de critiques venant des deux côtés du spectre politique :<br>\

      • Critique de gauche : Au nom de l'universalisme, arguant que la diversité accorde un statut politique sur la base de caractéristiques distinctives, alors que l'égalité se fonde sur ce qui est commun à tous les êtres humains.<br>\

      • Critique de droite : Au nom de la méritocratie, considérant que le principe de diversité s'y oppose.

      Contextes Nationaux et Résistances

      L'application de la diversité varie considérablement selon les contextes nationaux :<br>\

      • France : Réticence à collecter des statistiques ethniques en raison de forts principes universalistes.<br>\

      • États-Unis : Le débat est centré sur la question raciale.<br>- Europe Centrale : La discussion porte souvent sur les populations Roms.<br>\

      • Résistances pratiques : La définition des groupes "divers" à inclure est souvent un "champ de bataille", une "guerre de tous contre tous" hobbesienne, loin de l'image d'un défilé arc-en-ciel.

      Distinctions Conceptuelles Clés

      Des distinctions importantes ont été établies avec des termes voisins :<br>\

      • Diversité vs. Pluralisme : La diversité tend à s'appliquer aux identités individuelles ou de groupe, tandis que le pluralisme est une catégorie plus large incluant la pluralité des opinions et des idées ("marketplace of ideas" de John Stuart Mill) au sein même de ces groupes.<br>\

      • Égalité vs. Équité : L'égalité (des chances) est compatible avec une méritocratie sur un "terrain de jeu équitable".

      L'équité (des résultats) devient très controversée dans un contexte de contraction économique (post-2008), où le gain d'un groupe est perçu comme la perte d'un autre, menant à la fragmentation.

      Le Pouvoir de la Métaphore Esthétique

      La métaphore de l'arc-en-ciel est qualifiée de "brillante" car elle désamorce la stratégie de l'altérité et du dénigrement.

      Personne ne hiérarchise les couleurs de l'arc-en-ciel ; au contraire, leur mélange est considéré comme plus beau que chaque couleur prise isolément.

      Cela démontre le rôle actif de la valeur esthétique de la diversité dans la sphère politique.

    1. Crise, Inégalités et Précarité : Synthèse des Analyses d'Esther Duflo, Claire Hédon et Frédéric Worms

      Résumé

      Ce document de synthèse analyse les interventions d'Esther Duflo, Claire Hédon et Frédéric Worms sur l'impact de la crise du coronavirus sur les inégalités et la précarité. Les conclusions clés sont les suivantes :

      Aggravation des Inégalités : La crise a un effet immédiat et délétère, exacerbant les inégalités existantes tant au sein des pays qu'entre eux.

      Les populations les plus pauvres et les plus vulnérables subissent de manière disproportionnée les chocs sanitaires et économiques.

      Aux États-Unis, par exemple, la probabilité de décès du coronavirus pour une personne noire est quatre fois supérieure à celle d'une personne blanche, à âge égal.

      Disparité des Réponses Économiques : Les pays riches ont pu mobiliser 20% de leur PIB pour soutenir leurs économies, contre 6% pour les pays émergents et seulement 2% pour les pays pauvres, ce qui laisse présager un enlisement de la pauvreté dans ces derniers.

      Révélation des Failles Systémiques : La crise a mis en lumière des problèmes structurels profonds :

      • une méfiance institutionnalisée envers les pauvres qui rend les systèmes de protection sociale punitifs,
      • un recul des services publics qui complique l'accès aux droits (notamment à cause de la dématérialisation), et
      • une incapacité de la communauté internationale à organiser une solidarité efficace.

      Opportunités de Changement : Malgré ses effets négatifs, la crise offre des opportunités.

      Elle a démontré que le gouvernement est une solution essentielle pour gérer les crises, et non le problème.

      L'expérience massive du chômage partiel pourrait également changer la perception de la redistribution, en montrant que chacun peut avoir besoin d'aide, et potentiellement ouvrir la voie à des systèmes plus respectueux de la dignité.

      Approche Structurelle : Le traitement des inégalités n'est pas seulement une conséquence à gérer, mais une condition préalable à la gestion efficace des crises futures, qu'elles soient sanitaires, climatiques ou démocratiques.

      La confiance dans un système de redistribution juste est indispensable pour obtenir l'adhésion collective aux efforts nécessaires.

      Enjeux de l'Accès au Droit : La crise a aggravé le phénomène de "non-recours" aux droits, où les personnes les plus précaires, confrontées à la fermeture des services physiques et à la barrière numérique, ne parviennent pas à obtenir les aides auxquelles elles ont droit.

      --------------------------------------------------------------------------------

      1. L'Impact Immédiat et Disproportionné de la Crise

      La crise du coronavirus, loin d'être un "grand égaliseur", a frappé de manière asymétrique, aggravant les vulnérabilités existantes.

      1.1. Inégalités au sein des Pays Riches

      Sur le plan sanitaire : Esther Duflo souligne que les populations les plus pauvres et minoritaires ont été les plus touchées.

      Aux États-Unis, en ajustant pour l'âge, une personne noire a quatre fois plus de chances de mourir du coronavirus qu'une personne blanche.

      Une étude de l'INSEE en France, citée par Claire Hédon, montre également une corrélation entre le niveau de vie de la commune et la mortalité.

      Sur le plan économique :

      ◦ La reprise est inégale. Aux États-Unis, le quart le plus riche de la population a retrouvé ses niveaux d'emploi et de salaire d'avant-crise, tandis que les plus pauvres, notamment dans le secteur des services, s'installent dans une crise durable.  

      ◦ Les dispositifs de solidarité, comme le chômage partiel en Europe, se sont principalement basés sur l'existence d'un emploi préalable, laissant de côté les personnes déjà en grande précarité.   

      ◦ Claire Hédon rapporte que les personnes aux minima sociaux ont vu leur situation se dégrader (courses plus chères dans les commerces de proximité, enfants non scolarisés à la cantine à 1€) sans bénéficier d'aides supplémentaires significatives.

      1.2. Inégalités entre les Pays

      Esther Duflo met en évidence un fossé immense dans la capacité de réponse économique à la crise.

      Catégorie de pays

      Dépenses de soutien fiscal (en % du PIB)

      Pays riches

      20 %

      Pays émergents

      6 %

      Pays pauvres

      2 % (d'un PIB déjà beaucoup plus petit)

      Cette disparité a des conséquences majeures :

      • Les pays riches ont pu emprunter massivement pour protéger leurs populations, une option inaccessible aux pays pauvres.

      • Alors qu'une reprise économique rapide est attendue dans les pays riches grâce à la vaccination, les pays pauvres risquent un "enlisement de la crise" et un renfermement de la pauvreté sur elle-même.

      2. Les Failles Systémiques Révélées et Exacerbées

      La crise a agi comme un révélateur de dysfonctionnements structurels profonds dans nos sociétés et nos institutions.

      2.1. La Méfiance envers les Pauvres et le Carcan Punitif de la Redistribution

      Esther Duflo affirme que nos systèmes de protection sociale sont qualitativement faibles et "punitifs à leur cœur" en raison d'une méfiance profonde envers les pauvres, perçus comme "paresseux".

      Cette vision, qualifiée de "victorienne", érige des barrières pour éviter que les bénéficiaires "ne se vautrent pas dans la complaisance".

      Claire Hédon confirme ce constat avec des exemples concrets :

      Le soupçon de fraude permanent : Elle cite le cas d'un homme ayant mis 15 mois à obtenir le RSA, ou ceux de personnes accusées de fraude pour avoir vendu leurs vêtements ou leur voiture pour survivre.

      Un regard culpabilisateur : "J'ai le sentiment qui est ancré dans la société un regard très culpabilisateur qui est aussi qu'est-ce que vous avez raté dans votre vie pour vous retrouver dans cette situation là."

      Elle soutient que c'est la société qui a échoué envers ces personnes, et non l'inverse.

      2.2. Le Recul des Services Publics et le Non-Recours aux Droits

      Claire Hédon, en tant que Défenseure des droits, alerte sur un "recul de la présence de l'État" qui a été aggravé par la crise.

      La dématérialisation comme barrière : La fermeture des services physiques (CAF, postes) a rendu l'accès aux droits quasi impossible pour les personnes sans connexion internet, sans matériel adéquat ou sans compétences numériques.

      Pour les plus précaires, la dématérialisation aboutit à un "non accès au droit".

      Le phénomène du non-recours : Beaucoup de personnes éligibles n'arrivent pas à faire valoir leurs droits. La lutte contre la fraude, en complexifiant les démarches, génère de fait du non-recours.

      Qualité de l'accueil : Même l'accès physique est semé d'embûches, comme l'illustre l'exemple d'un homme devant parcourir 30 km pour se rendre à la CAF, se voir refuser l'entrée faute de rendez-vous pris sur internet, puis être jugé "pas motivé" par les agents d'accueil.

      2.3. L'Échec de la Solidarité Internationale

      Esther Duflo déplore que les pays riches, qui ont dépensé des "trillions de dollars" pour leurs propres économies, aient été "aux grands abonnés absents" pour aider les pays pauvres.

      L'appel à un "plan Marshall pour les pays pauvres" qu'elle a lancé au début de la crise n'a pas été entendu.

      Cette incapacité à agir collectivement en temps de crise est un signal inquiétant pour les défis à venir, notamment le changement climatique.

      3. Les Crises comme Catalyseurs de Changements Potentiels

      Malgré le constat sombre, les intervenants identifient des lueurs d'espoir et des opportunités de repenser certains paradigmes.

      3.1. Le Rôle Essentiel de l'État

      Pour Esther Duflo, la crise a apporté une leçon majeure : "le gouvernement n'est pas le problème, le gouvernement est la solution."

      Seul l'État a la capacité :

      • D'imposer des mesures de santé publique (port du masque).

      • D'investir massivement dans la recherche et l'achat de vaccins.

      • D'emprunter au nom de la population pour la protéger des chocs économiques.

      Cette prise de conscience pourrait mener à un "regain d'appréciation pour l'importance du rôle du gouvernement".

      3.2. Vers une Nouvelle Perception de la Redistribution

      L'expérience massive et souple du chômage partiel en Europe a montré que "tout le monde peut avoir besoin d'aide".

      Des personnes "tout à fait vertueuses" se sont retrouvées dépendantes d'un soutien public.

      Espoir d'un changement de mentalité : Esther Duflo espère que cette expérience pourra "nous libérer un peu de ce carcan victorien" et permettre une redistribution "plus fluide, plus respectueuse, mettant la dignité des individus au cœur".

      Débat sur le revenu des jeunes : Claire Hédon note que la crise a rendu moins tabou le débat sur un revenu d'existence pour les 18-25 ans (via le RSA ou la généralisation de la Garantie Jeune).

      4. Une Approche Structurelle : Traiter les Inégalités pour Prévenir les Crises

      Frédéric Worms propose une analyse en trois niveaux de la réponse à la crise et plaide pour une vision structurelle à long terme.

      4.1. Trois Types de Réponses à la Crise

      1. La réponse "hypocrite" : Consiste à dire que, puisque les mesures sanitaires aggravent les inégalités, il ne fallait pas y répondre (ou pas autant).

      Frédéric Worms et Esther Duflo réfutent cet argument en soulignant qu'il n'y a pas d'arbitrage entre le sanitaire et l'économique : les pays qui ont mal géré la crise sanitaire ont aussi les pires résultats économiques.

      2. La réponse "honnête" (démocratie sociale) : Consiste à répondre aux deux dangers simultanément, en conjuguant les impératifs sanitaires, économiques et sociaux.

      3. La réponse "structurelle" (la plus forte) : Consiste à affirmer que le traitement des inégalités est la condition même de la réponse aux dangers sanitaires du 21e siècle. Les inégalités ne sont pas un effet secondaire, mais une cause première des crises.

      4.2. La Confiance comme Prérequis à l'Action Collective

      Cette approche structurelle est essentielle car, comme le souligne Esther Duflo, on ne peut pas gérer une crise (COVID, climatique) qui implique des sacrifices sans la confiance des citoyens.

      Confiance et redistribution : Les gens n'accepteront des mesures difficiles (ex: taxe carbone) que s'ils ont confiance dans le fait qu'ils seront justement compensés.

      Cette confiance est impossible sans un système de redistribution perçu comme "efficace, généreux et qui respecte les gens".

      Le cercle vicieux de la défiance : Frédéric Worms pointe une "défiance mutuelle" :

      celle des citoyens envers le gouvernement, mais aussi celle du gouvernement envers les citoyens (soupçon de fraude).

      Briser ce cercle nécessite de s'appuyer sur le savoir, la science, et des "institutions du désaccord" solides.

      5. Pistes d'Action et Solutions

      La discussion a également abordé des solutions concrètes pour lutter contre la pauvreté et les inégalités.

      Revenu Minimum Garanti vs. Revenu Universel :

      Pour les pays pauvres, Esther Duflo préconise un revenu universel très faible, accessible sur simple demande.

      L'enjeu principal y est la perte de dignité, et même un revenu modeste peut suffire à "mettre de quoi manger à vos enfants trois fois par jour".   

      Pour les pays riches, elle privilégie un revenu minimum garanti (sur le principe du RSA), qui concentre les ressources sur ceux qui en ont le plus besoin, car les informations pour les cibler existent.

      Elle insiste sur le fait que la dignité y est aussi liée au travail, qui nécessite plus que de l'argent (logement, garde d'enfants, etc.).

      Ce doit être un droit, non une charité.

      Le Droit au Travail : Claire Hédon et Esther Duflo s'accordent sur l'importance du droit au travail.

      Les personnes en situation de précarité souhaitent travailler, car c'est un "moyen d'être inséré dans la société".

      L'Approche Expérimentale : Esther Duflo plaide pour l'importation d'une attitude apprise dans son travail dans les pays pauvres :

      l'humilité de reconnaître qu'on ne sait pas toujours ce qui marche et la nécessité de tester rigoureusement les politiques publiques avant de les généraliser.

      Des études ont par exemple montré que la sécurité financière encourage l'initiative plutôt qu'elle ne la limite.

      Droit à l'accès au numérique : Face à la dématérialisation généralisée, Claire Hédon estime qu'il faut désormais réfléchir à un "droit à l'accès au numérique".

  2. May 2025
    1. Die Politik der Trump-Administration in den ersten 100 Tagen hat zu einem Anstieg der Treibhausgasemissionen geführt. Trotz wirtschaftlicher Unsicherheiten durch Trumps Handelskriege und Tarife fördert seine "Drill, baby, drill"-Strategie die Öl- und Gasförderung, was die Emissionen erhöht. Gleichzeitig behindert Trump erneuerbare Energien durch Tarife und den Stopp neuer Solar- und Windprojekte. Experten warnen vor den klimaschädlichen Folgen und betonen die Notwendigkeit, auf erneuerbare Energien umzusteigen. [Zusammenfassung generiert mit Mistral] https://www.theguardian.com/us-news/2025/may/02/trump-drill-baby-drill-tariffs

  3. Mar 2025
    1. In Ihrem Global Energy Review 2025 steht die EAA einen re Commissionen zuwachs im Verbrauch und Produktion von Elektrozytet fest. Dieser Zufachs geht allerdings nur in ganz kleinen Teilen auf den Ersatzforsilerenergien zurück und ist im Wesentlichen durch zunehmenden Energieverbrauch bedingt, z.B. durch Datencenter. Durch diesen Zuwachs steigt der Verbrauch, steigt der Bedarf an bestimmten Mitte um Mineralien ebenfalls sprunghaft an. Der Chef der Ehea geht davon aus, dass um 20-30 Gruppen verknab werden wird. Der Kommentar der Tat weiß deshalb darauf hin, dass die Dekabonisierung durch den Umstieg auf erneuerbare Energien ohne Reduzierung des Verbrauchs nicht gelingen wird. https://taz.de/Die-Tuecken-der-Energiewende/!6074719/

  4. Feb 2025
    1. Der Welt-Electricitätsbedarf wird bis 2027 umjährlich 4% wachsen. Das sagt die ERA in ihrer neuesten Prognose voraus. Bisher war sie von 3,4% ausgegangen. Der wachsende Bedarf lässt sich durch erneuerbare Energien decken. ohne massive zusätzliche Investitionen würde dann aber der Bedarf an Facilenenergien gleich bleiben. https://www.theguardian.com/business/2025/feb/14/electric-cars-datacentres-new-global-age-of-electricity

  5. Jan 2025
  6. Nov 2024
    1. 2023 wurde mit 55,5 Milliarden Fass Öläquivalent so viel Öl und Gas gefördert wie nie zuvor. 578 Unternehmen arbeiten daran, durch zusätzliche Förderstätten weitere 240 Milliarden Fass zu produzieren, obwohl zur Einhaltung des 1,5 Grad-Ziels keine Förderkapazitäten mehr aufgebaut werden dürfen. Zu den Unternehmen mit den größten Expansionsplänen gehört die an der OMV beteiligte Adnoc. Die Zahlen sind - neben vielen weiteren z.B. zur LNG-Expansion - in der aktualisierten Global Oil & Gas Exit List (Gogel) der NGO Urgewald enthalten https://www.derstandard.at/story/3000000244513/weltweite-oel-und-gasfoerderung-erreichte-2023-ein-allzeithoch

  7. Oct 2024
    1. Die Fossilindustrie in den USA fürchtet einen Paradigmenwechsel weg vom Primat von Öl und Gas vor allem, weil er Kapital aus ihrem Sektor abziehen würde. Deshalb unterstützt sie Trump gegen Harris, obwohl die USA unter der Biden-Administration zu einem Rekord-Ölproduzenten und zum führenden Gas-Exporteur wurden. Analyse von Jonathan Mingle mit Details zur interessenverquickung von Big Oil und Republikanern https://www.nytimes.com/2024/10/21/opinion/oil-gas-exports-climate-change.html

    1. 2/3 der Zunahme des Strombedarfs in den letzten 10 Jahren wurden in China verursacht. Die Steigerung der Nachfrage nach Strom wird sich dem World Energy Outlook 2024 zufolge beschleunigen, wesentlich angetrieben durch den Bedarf von Klimaanlagen. Die IEA erwartet bis zum Ende des Jahrhunderts 2,4° höhere Temperaturen als in der vorindustriellen Zeit https://www.repubblica.it/green-and-blue/2024/10/16/news/energia_elettricita_boom_iea-423558911/

    1. die international energie elfchen sie stellt in ihrem neuen bericht zu den erneuerbaren fest komma das das globale ziel komme die kapazität an erneuerbaren energien bis zweitausenddreißig zu verdreifachen komma erreicht werden kann punkt voraussetzung sei allerdings bekomme den ärmeren ländern das nötige kapital zur verfügung zu stellen pumpt zwanzig dreißig könnte fast die hälfte des weltweit erzeugten stroms aus erneuerbaren quellen kommen , Wobei sechzig prozent der kapituliert kapazitäten in china installiertpunkthttps://www.liberation.fr/environnement/climat/energies-renouvelables-le-monde-peut-atteindre-ses-objectifs-a-condition-daider-les-pays-du-sud-20241009_AASGBWH43VBAJDCVSWSFOMCIEM/

  8. Aug 2024
  9. Jun 2024
  10. May 2024
    1. In Frankreich beginnt in dieser Woche eine öffentliche Debatte um ein großes lithium-bergbauprojekt im zentralmassiv. Der umfassende Artikel beleuchtet eine Vielzahl von Aspekten des lithium-Abbaus und der zunehmenden Opposition dagegen, die eng mit dem Kampf gegen die individuelle motorisierte Mobilität verbunden ist. https://www.liberation.fr/environnement/climat/course-au-lithium-made-in-france-une-opportunite-a-saisir-ou-un-mirage-ecologique-20240310_FQOVXTBNKJC5NJ7EZI2UQKOAIY/in

    1. Dichter und sehr gut dokumentierter Überblicksratikel über die Expansionspläne der Öl- und Gasindustrie. Aus unerschlossenen Feldern sollen 230 Milliarden Barrel Öläquivalent gefördert werden - im klaren Widerspruch zum Pariser Abkommen. Durch Ausbeutung neuer Lager werden bis 2025 voraussichtlich 70 Gt CO<sub>2</sub> und damit 17% des Budgets für das 1,5° Ziel ausgestoßen. Eingegangen wird auch auf den Ausstiegsplan des Tyndall Centre. https://taz.de/Run-auf-fossile-Brennstoffe/!5973686/

    1. Résumé de la vidéo [00:00:10][^1^][1] - [00:32:18][^2^][2] : Cette vidéo présente une conférence de Jérôme Lang sur le choix social computationnel. Il aborde l'intersection de l'intelligence artificielle, des sciences informatiques, de l'économie et de la théorie du choix social. Lang discute des problèmes de prise de décision collective, de la manipulation de vote, de la démocratie liquide et de l'agrégation des croyances.

      Points forts : + [00:00:10][^3^][3] Introduction au choix social computationnel * Présentation de Jérôme Lang et de son parcours multidisciplinaire * Aperçu de la théorie du choix social et de ses applications + [00:07:07][^4^][4] Contribution de l'informatique et de l'IA * Impact de l'informatique sur la résolution de problèmes complexes en choix social * Nouveaux paradigmes et objets d'étude introduits par l'IA + [00:08:14][^5^][5] Démocratie liquide * Explication du concept de démocratie liquide et de ses avantages * Discussion sur les problèmes algorithmiques liés à la démocratie liquide + [00:15:13][^6^][6] Choix social épistémique et crowdsourcing * Application de l'agrégation des croyances au crowdsourcing * Utilisation des votes pour estimer la vérité sur le monde réel + [00:22:55][^7^][7] Vote itératif * Présentation du vote itératif et de son potentiel pour améliorer le bien-être social * Exemple de manipulation de vote pour atteindre un consensus + [00:31:19][^8^][8] Budget participatif * Introduction au concept de budget participatif * Discussion sur la manière dont les votes peuvent influencer la sélection des projets Résumé de la vidéo [00:32:20][^1^][1] - [01:03:36][^2^][2] : La vidéo présente une conférence de Jérôme Lang sur le choix social computationnel, abordant des sujets tels que le budget participatif, la sélection de comités diversifiés et les systèmes de vote. Lang discute des méthodes de vote et de sélection, des problèmes algorithmiques sous-jacents et de leur impact sur la prise de décision collective dans divers contextes.

      Points forts : + [00:32:20][^3^][3] Le budget participatif à Paris * Utilisation du vote par approbation jusqu'en 2020 * Les citoyens votaient pour des projets dans leur arrondissement et pour tout Paris * Discussion sur l'efficacité de l'algorithme glouton par rapport à une approche globale + [00:38:14][^4^][4] La sélection de comités * Les défis de la création de comités équilibrés avec diverses contraintes * Exploration des méthodes pour atteindre des proportions cibles ou respecter des contraintes strictes * Exemples de la sélection de comités dans un contexte académique + [00:44:43][^5^][5] Les appariements stables * Présentation du problème de l'appariement stable entre médecins et hôpitaux * Discussion sur l'existence d'appariements stables et leur importance dans les systèmes d'affectation * Examen de la manière dont les préférences des parties influencent la stabilité des appariements + [00:51:15][^6^][6] Les plateformes de vote en ligne * Comparaison entre Doodle et la plateforme de vote en ligne développée par l'Université de Grenoble * Avantages de l'utilisation de plateformes sans publicité et axées sur la recherche pour les décisions collectives

    1. Résumé de la vidéo [00:00:07][^1^][1] - [00:21:52][^2^][2]:

      Maël PEGNY discute de l'importance pour les scientifiques sociaux de comprendre le calcul et l'informatique, en particulier dans le contexte de l'apprentissage automatique et de la modélisation des thèmes. Il explore les problèmes génériques liés à l'abstraction, à la validation intuitive des résultats et à la pluralité des formalisations dans la recherche.

      Points forts: + [00:00:07][^3^][3] L'importance de la compréhension du calcul * La nécessité pour les scientifiques sociaux de comprendre les outils informatiques * La distinction entre spécification et implémentation * L'impact de l'abstraction sur l'interprétation des calculs + [00:05:03][^4^][4] L'intuition et la formalisation * La traduction des problèmes intuitifs en problèmes formels * La spécification comme guide pour l'exécution des méthodes computationnelles * La validation des résultats computationnels par rapport à l'intuition initiale + [00:11:15][^5^][5] La pluralité des formalisations * Les différentes manières de formaliser un problème intuitif * L'interprétation de la pluralité comme clarification conceptuelle ou échec méthodologique * Les décisions pragmatiques prises lors de la formalisation + [00:15:36][^6^][6] Les concepts opaques et la méthodologie * La difficulté de définir des concepts intuitifs comme les thèmes de recherche * La comparaison entre l'intuition et la formalisation * La question de savoir si la philosophie des sciences a pleinement reconnu ces problèmes méthodologiques Résumé de la vidéo [00:21:53][^1^][1] - [00:44:03][^2^][2] : La vidéo présente une conférence de Maël PEGNY sur l'importance de la compréhension des calculs en sciences sociales, en particulier en ce qui concerne le machine learning et la métaprogrammation. PEGNY discute des défis liés à la formalisation des problèmes intuitifs et à la spécification des calculs, soulignant les ambiguïtés terminologiques et les difficultés d'interprétation. Il explore également la notion de métriques de performance en machine learning et leur rôle dans la formalisation partielle des intuitions de départ.

      Points saillants : + [00:22:00][^3^][3] Défis de la formalisation * Difficulté à caractériser les actions sans formalisation explicite * Débat sur la terminologie appropriée pour décrire les processus + [00:23:01][^4^][4] Métaprogrammation en machine learning * Processus de programmation d'un algorithme qui génère un autre programme * Importance de comprendre les calculs sous-jacents à la fois de l'algorithme d'apprentissage et du modèle résultant + [00:24:53][^5^][5] Rôle des métriques de performance * Les métriques guident l'apprentissage et optimisent la performance * Elles constituent une forme de formalisation partielle des intuitions + [00:37:04][^6^][6] Identification des thèmes de recherche * Approche intuitive et non systématique pour déterminer les thèmes * Comparaison entre les résultats intuitifs et ceux générés par le machine learning Résumé de la vidéo [00:44:05][^1^][1] - [01:04:55][^2^][2]:

      La vidéo présente une conférence de Maël PEGNY sur l'importance de la compréhension des méthodes computationnelles en sciences sociales. Il discute des défis liés à l'analyse de données et à l'interprétation des résultats obtenus par machine learning, soulignant les limites des approches traditionnelles et la nécessité d'adapter les méthodes statistiques aux complexités des données sociales.

      Points forts: + [00:44:05][^3^][3] Choix de la base de données * Importance de la sélection des données * Différences entre autodescription et publications + [00:45:35][^4^][4] Problèmes d'interprétation * Difficultés d'interprétation des résultats * Nécessité d'ajuster les stop words en NLP + [00:48:04][^5^][5] Pluralité des formalisations * Comparaison de différentes méthodes d'analyse * Impact de la complexité des modèles sur l'interprétation + [00:57:52][^6^][6] Épistémologie des statistiques * Questionnement sur la nouveauté des problèmes posés par le machine learning * Pertinence des traditions statistiques pour comprendre l'apprentissage automatique Résumé de la vidéo 01:04:57 - 01:09:09 : La partie 4 de la vidéo aborde la nécessité pour les scientifiques sociaux de comprendre les calculs dans le contexte de l'apprentissage profond et de la statistique. Elle explore le choc que le succès de l'apprentissage profond a provoqué chez les statisticiens et comment cela a conduit à une réévaluation des fondements de la théorie statistique.

      Points forts : + [01:05:00][^1^][1] Surprise des statisticiens * L'apprentissage profond a surpris les statisticiens * Reconsidération des fondements de la théorie statistique * Recherche d'une compréhension théorique de l'apprentissage profond + [01:05:49][^2^][2] Nouveautés dues à l'échelle de calcul * Changements qualitatifs avec l'augmentation de la masse des données * Nouveautés apparaissent avec le calcul à grande échelle * Importance de la modélisation formelle des problèmes + [01:07:37][^3^][3] Différenciation des enjeux de formalisation * Distinction entre mathématiques, logique et informatique théorique * La formalisation en informatique diffère de celle en mathématiques * La tradition de méthodes formelles rigoureuses est peu représentée en machine learning

    1. Résumé de la vidéo [00:00:06][^1^][1] - [00:31:01][^2^][2] : La vidéo présente une conférence de Benedict Eastaugh sur la théorie du choix social dans les sociétés infinies. Il explore le paradoxe de Condorcet et les conditions d'Arrow pour une fonction de bien-être social, ainsi que les possibilités offertes par les sociétés infinies pour résoudre ces paradoxes.

      Points forts : + [00:00:06][^3^][3] Le paradoxe de Condorcet * Examine la règle de la majorité et ses limites * Présente un scénario où la règle de la majorité mène à une contradiction * Souligne le besoin de conditions supplémentaires pour les fonctions d'agrégation + [00:07:20][^4^][4] Les conditions d'Arrow * Discute de l'unanimité, de l'indépendance des alternatives irrélevantes et de la non-dictature * Explique le théorème d'impossibilité d'Arrow et ses implications * Mentionne le théorème de possibilité de Fishburn pour les sociétés infinies + [00:14:02][^5^][5] Modèles de sociétés infinies * Présente trois types de sociétés infinies : continues, infinies dans le temps et conditionnées par des états possibles * Questionne la pertinence et l'applicabilité de ces modèles * Aborde les défis liés à la prise de décision sociale dans ces contextes + [00:20:52][^6^][6] La non-calculabilité des fonctions de bien-être social * Examine la nature non-constructive des preuves et des fonctions résultantes * Discute de la relation entre les axiomes non-constructifs et le théorème de possibilité de Fishburn * Explore les implications pour les scénarios électoraux et les sociétés infinies Résumé de la vidéo [00:31:04][^1^][1] - [01:03:23][^2^][2]:

      La deuxième partie de la vidéo se concentre sur la théorie du choix social dans les sociétés infinies, en utilisant le cadre formel de l'arithmétique du second ordre. Elle aborde les défis de la cardinalité et de l'effectivité, propose des solutions pour modéliser les sociétés comptables et examine les théorèmes de Kerman-Sunderman, Arrow et Fishburne dans ce contexte.

      Points forts: + [00:31:04][^3^][3] Cadre formel et reverse mathematics * Introduction à l'arithmétique du second ordre et à la notion de contre-exemple récursif * Lien entre les mathématiques inversées et la théorie de la calculabilité + [00:35:08][^4^][4] Défis de la théorie du choix social pour les sociétés comptables * Problèmes de cardinalité avec un nombre infini de votants * Nécessité de conditions affaiblies pour satisfaire les théorèmes d'Arrow dans le cas fini + [00:45:00][^5^][5] Construction d'une société comptable * Définition des votants, des alternatives et des profils dans le cadre comptable * Conditions pour qu'une collection détermine une société, en termes de mesurabilité et de richesse combinatoire + [00:51:03][^6^][6] Théorèmes dans le cadre comptable * Preuve du théorème d'Arrow pour les sociétés finies dans RCA 0 * Discussion sur le théorème de possibilité de Fishburne et son statut non constructif Résumé de la vidéo [01:03:27][^1^][1] - [01:04:52][^2^][2]:

      La partie 3 de la vidéo aborde la théorie du choix social dans les sociétés infinies, en se concentrant sur les résultats de manipulabilité et d'impossibilité dans les systèmes de vote, ainsi que sur les théorèmes de Gibbard-Satterthwaite et d'Arrow.

      Points forts: + [01:03:27][^3^][3] Choix social et médicaments * Discussion sur l'indexation des résultats en fonction de conditions * Questionnement sur la plausibilité des états infinis + [01:04:10][^4^][4] Résultats de manipulabilité et théorèmes d'impossibilité * Mention des théorèmes de Gibbard-Satterthwaite et d'Arrow * Analyse des cas infinis et résultats similaires à la compréhension arithmétique + [01:04:45][^5^][5] Nature non constructive des résultats * Évocation de la non-constructivité et de la non-calculabilité * Clôture de la discussion par des remerciements

    1. Résumé de la vidéo [00:00:06][^1^][1] - [00:27:33][^2^][2]:

      Célia Zolynski discute de la transition du calcul du sujet à son empowerment dans le contexte de l'intelligence artificielle (IA) et de la régulation des plateformes. Elle aborde les enjeux de la régulation de l'IA, l'importance de protéger les droits fondamentaux face aux risques potentiels, et propose des pistes pour renforcer le pouvoir d'action des utilisateurs.

      Points forts: + [00:00:06][^3^][3] Introduction et contexte * Présentation de Célia Zolynski et de son domaine d'expertise en droit du numérique * Importance de la régulation des plateformes et des systèmes d'IA + [00:03:06][^4^][4] Régulation des droits fondamentaux et IA * Approche actuelle de la régulation visant à protéger les droits fondamentaux * Nécessité d'une approche complémentaire pour renforcer le pouvoir d'action des utilisateurs + [00:10:01][^5^][5] Le règlement sur l'intelligence artificielle (AI Act) * Discussion sur le AI Act proposé par la Commission européenne * Classification des risques et mécanismes de mise en conformité + [00:17:01][^6^][6] Empowerment de l'utilisateur final * Stratégies pour améliorer la compréhension et l'interaction des utilisateurs avec les systèmes d'IA * Importance de la transparence et de la jouabilité pour l'empowerment Résumé de la vidéo [00:27:34][^1^][1] - [00:53:16][^2^][2]:

      La vidéo présente une conférence de Célia Zolynski, qui aborde le sujet de l'impact des systèmes algorithmiques sur les individus et la société. Elle souligne l'importance de comprendre, débattre et potentiellement contester les contraintes techniques imposées par ces systèmes, en particulier dans le contexte des ressources humaines et de la reconnaissance faciale.

      Points forts: + [00:27:34][^3^][3] Comprendre et débattre des contraintes techniques * Nécessité de réflexion collective sur l'utilisation des algorithmes * Importance de la formation pour un débat éclairé * Propositions de la Commission nationale consultative des droits de l'homme + [00:30:10][^4^][4] Droit de contester les décisions algorithmiques * Reconnaissance du droit de contestation en droit des données personnelles * Discussion sur l'accès aux preuves et la présomption de non-discrimination * Importance de la défense des libertés et droits fondamentaux + [00:34:18][^5^][5] Actions collectives pour la défense des droits * Nécessité de procédures pour organiser des actions collectives * Importance des organismes de promotion de l'égalité et de la défense des droits * Propositions pour une régulation plus humaniste de la technique + [00:36:01][^6^][6] Droit au paramétrage des systèmes algorithmiques * Proposition d'un droit de paramétrage pour l'utilisateur * Impact sur les algorithmes de recommandation et les assistants vocaux * Vision d'une interaction plus humaniste entre l'homme et la machine Résumé de la vidéo [00:53:17][^1^][1] - [01:10:10][^2^][2]:

      La vidéo présente une discussion approfondie sur le Digital Markets Act (DMA) et son impact sur les grandes plateformes numériques, en particulier en ce qui concerne l'accès aux données et le contrôle du marché. Célia Zolynski explore les défis liés à la qualification des bases de données en tant qu'infrastructures essentielles et les obligations imposées aux acteurs dominants pour promouvoir l'innovation et la concurrence loyale.

      Points saillants: + [00:53:17][^3^][3] Le marché numérique et le DMA * Analyse du rôle des grandes plateformes dans l'organisation du marché * Discussion sur les pratiques déloyales et l'effet de verrouillage du marché * Importance de l'accès aux données pour la concurrence et l'innovation + [00:57:03][^4^][4] Paramètres de l'utilisateur et contenu * Exploration de la possibilité pour les utilisateurs de contrôler l'affichage du contenu * Importance du design et de la facilité de modification des paramètres * Réflexion sur les paramètres utiles et déterminants pour les utilisateurs + [01:02:00][^5^][5] Fatigue du consentement et design * Discussion sur la fatigue du consentement et l'importance d'un design encourageant l'interaction * Idées pour préconfigurer les choix des utilisateurs concernant les cookies * Défis liés à l'équilibre entre préinstallation et contrôle utilisateur + [01:07:02][^6^][6] Complexité réglementaire et accès au marché * Analyse de la complexité des textes réglementaires et de leur impact sur les PME * Approche asymétrique imposant plus d'obligations aux grands acteurs * Objectif de ne pas créer de barrières réglementaires à l'entrée sur le marché

    1. Résumé de la vidéo [00:00:20][^1^][1] - [00:22:58][^2^][2]:

      Cette vidéo présente une conférence de Luc PELLISSIER sur la complexité des textes juridiques et leur traitement calculatoire. Il explore les notions de complexité en informatique théorique, la simplification et la codification du droit, et comment ces processus affectent l'accessibilité et l'intelligibilité de la loi. Il discute également des différentes époques de la codification en France et de l'impact de l'informatisation sur la législation.

      Points forts: + [00:00:20][^3^][3] Introduction et contexte * Présentation du sujet et de l'importance de la complexité en informatique * Lien entre l'enseignement du droit et la complexité + [00:01:15][^4^][4] Complexité et droit * Exploration de la complexité en informatique théorique * Absence de la notion de complexité dans la littérature juridique + [00:04:27][^5^][5] Simplification et codification * Discussion sur la simplification du droit comme objectif constitutionnel * Relation entre simplification et codification dans l'histoire juridique française + [00:07:04][^6^][6] Les trois âges de la codification en France * Analyse des différentes méthodes de codification depuis le Consulat jusqu'à aujourd'hui * Impact de l'informatisation sur la codification et la législation + [00:17:19][^7^][7] Le droit comme système calculatoire * Proposition d'une nouvelle perspective sur le droit comme objet calculatoire * Exemple de la rémunération des heures complémentaires dans les universités françaises Résumé de la vidéo [00:23:00][^1^][1] - [00:44:29][^2^][2] : La vidéo présente une analyse détaillée des textes juridiques en tant qu'objets calculatoires, en explorant la complexité des modifications législatives et réglementaires, ainsi que leur impact sur la consolidation des textes de loi.

      Points saillants : + [00:23:00][^3^][3] Classification des dispositions législatives * Différenciation entre les dispositions substantielles et celles qui appellent à l'action d'autres autorités. * Exemples concrets de modifications législatives et leur effet direct ou indirect sur le monde réel. * Discussion sur la complexité des textes qui modifient d'autres textes. + [00:25:02][^4^][4] Modifications précises vs. générales * Comparaison entre les modifications qui indiquent exactement quel texte changer et celles qui sont plus larges et moins spécifiques. * Impact des modifications générales sur la clarté et l'interprétation des textes. * Exemple de la réforme du Conseil national des universités et ses implications. + [00:31:02][^5^][5] Citations et références dans les textes législatifs * Utilisation de citations textuelles pour lier différents codes, comme le Code de l'éducation et le Code de la santé publique. * Problèmes posés par les modifications qui ne sont pas consolidées et laissent l'utilisateur final interpréter le texte. + [00:37:00][^6^][6] Conséquences des modifications non consolidées * Difficultés rencontrées par les utilisateurs du droit en raison de modifications automatiques non reflétées dans les textes consolidés. * Questions soulevées sur la simplification du droit et l'accessibilité des informations légales actuelles. Résumé de la vidéo [00:44:31][^1^][1] - [01:03:14][^2^][2]:

      La partie 3 de la vidéo aborde la complexité du texte juridique en tant qu'objet calculatoire, en se concentrant sur les processus d'amendement, de consolidation et de codification. Luc Pellissier explore les défis théoriques et pratiques liés à la gestion des versions d'un texte de loi et la nécessité d'une approche formelle pour comprendre les modifications et leur impact sur la structure du texte.

      Points forts: + [00:44:31][^3^][3] Théorie du versionnement * Discussion sur la gestion des versions d'un fichier ou d'une loi * Importance des modifications explicites pour une théorie correcte + [00:46:11][^4^][4] Analogie avec le logiciel libre * Comparaison entre le texte juridique et le code source d'un logiciel * Le rôle de la compilation dans la compréhension du logiciel + [00:49:00][^5^][5] Questions épistémologiques * Débat sur la neutralité du droit et l'impact des hypothèses de recherche * Lien entre la simplification du droit et la qualité démocratique + [00:55:01][^6^][6] Développement d'un logiciel de versionnage * Spécification du logiciel pour la gestion des versions du droit * Défis liés à la création d'une théorie propre pour un "code spaghetti" juridique + [01:01:03][^7^][7] Structure formelle du texte juridique * Visualisation du texte de loi comme un arbre avec des branches et des modifications * Impact des outils informatiques sur la précision des modifications législatives

  11. Mar 2024
  12. Feb 2024
    1. Sultan Al Jaber hat bei einer von der IEA gehosteten Diskussion dazu aufgerufen, ber der Energiewende die Nachfrageseite adäquat zu berücksichtigen (was bei bestimmten IPCC-Szenarios und bei Degrowth-Ansätzen schon lange der Fall ist). Eine Studie von ExxonMobil prognostiziert wedding Wachstum der m des Energieverbrauchs um 15% bis 2050. https://www.theguardian.com/environment/2024/feb/20/energy-turmoil-looms-unless-demand-is-checked-says-cop28-president-sultan-al-jaber

    1. Résumé de la vidéo [00:00:17][^1^][1] - [00:35:18][^2^][2]:

      La vidéo aborde le thème du mensonge et de la réputation dans le contexte philosophique et social. Elle explore pourquoi mentir est considéré comme grave, la relation entre vérité et mensonge, et comment la réputation et l'identité sociale sont construites et perçues.

      Points clés: + [00:00:17][^3^][3] Le mensonge en philosophie * Importance du mensonge pour les philosophes * Impact du mensonge sur la réputation + [00:01:01][^4^][4] Publication sur la réputation * Livre à paraître sur le sujet * Séminaire sur la réputation + [00:01:30][^5^][5] La vérité et l'auto-tromperie * Tradition philosophique sur le mensonge à soi-même * Exemples historiques et contemporains + [00:14:14][^6^][6] L'image de soi et la réputation * Gestion de l'image personnelle * Influence de la réputation sur l'identité sociale + [00:19:18][^7^][7] Développement de l'ego social * Théories sur l'ego et la cognition sociale * Dualité de l'identité personnelle et sociale + [00:25:03][^8^][8] Gestion de la réputation * Travaux d'Erving Goffman sur l'image sociale * Négociation de l'image dans les interactions sociales

    1. Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [00:17:47][^2^][2] :

      Cette vidéo traite du rôle de la religion dans l'espace public et des conditions pour atteindre le respect mutuel dans les sociétés démocratiques et pluralistes. L'orateur examine les exemples de l'intersection de la religion et de la politique dans le monde, et les défis qu'elle pose pour le débat public. Il critique les arguments de Richard Rorty et d'autres qui veulent exclure la religion de la sphère publique, mais il souligne aussi les dangers de l'invocation de l'autorité divine ou de la providence pour justifier des actions politiques. Il appelle à une évaluation au cas par cas des influences religieuses, et à une prise en compte des engagements collatéraux qui peuvent corrompre ou enrichir les valeurs religieuses.

      Points forts : + [00:00:19][^3^][3] Le titre et le sujet de la conférence * Quand la religion est-elle un "arrêt de la conversation" ? * La montée de la religion dans l'espace public + [00:00:49][^4^][4] Les exemples de la conflation du religieux et du politique * Le nationalisme hindou en Inde * Le soutien des chrétiens évangéliques à Donald Trump * Le meurtre de Samuel Paty en France + [00:03:27][^5^][5] L'appel de William Marx à respecter la religion dans les sociétés et le discours publics * La référence à Voltaire et à l'idéal de la coexistence pacifique * La critique de l'allergie nationale à la religion en France + [00:05:02][^6^][6] Le rôle des croyants religieux dans l'atteinte du respect mutuel * La nécessité d'une rue à double sens où les deux parties se respectent * Le problème de la liaison de la croyance en Dieu à des engagements collatéraux + [00:07:00][^7^][7] La réponse à l'argument de Richard Rorty que la religion est un arrêt de la conversation * La citation de Nicholas Wolterstorff sur les brins de conviction religieuse * Le piège de la causalité entre la religion et la moralité * L'exemple de la comparaison de Bruce Lincoln entre Al-Qaïda et George W. Bush

    1. Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [02:57:42][^2^][2] :

      Cette vidéo est une conférence sur les neurosciences de la violence et des valeurs, organisée par le programme Brain, Culture and Society de l'Institut d'études avancées de Paris. Elle réunit des experts de différentes disciplines pour discuter du phénomène du syndrome E, qui désigne la transformation de personnes ordinaires en tueurs de masse. La vidéo se compose de trois parties :

      Faits saillants : + [00:00:20][^3^][3] Introduction par le professeur Alain Berthoz * Présente le contexte et les objectifs de la conférence * Rend hommage au professeur Itzhak Fried, initiateur du projet * Annonce les intervenants et le déroulement de la conférence + [00:18:45][^4^][4] Syndrome E : alors et maintenant, par le professeur Itzhak Fried * Revient sur la genèse et la définition du syndrome E * Présente les symptômes et le modèle de fracture cognitive * Évoque les travaux interdisciplinaires menés à l'Institut d'études avancées * Pose les questions actuelles sur la prévention et la responsabilité + [00:32:40][^5^][5] Neurosciences sociales de la déshumanisation, par la professeure Susan Fiske * Explique comment les gens catégorisent les autres selon deux dimensions : la chaleur et la compétence * Montre comment les groupes marginalisés sont déshumanisés selon différents modes : envie, pitié, dégoût * Illustre les signatures neuronales de la déshumanisation à l'aide d'exemples d'imagerie cérébrale * Souligne les conséquences de la déshumanisation sur la valeur accordée à la vie humaine

      Résumé de la vidéo de [01:00:00][^1^][1] à [02:57:42][^2^][2] :

      La deuxième partie de la vidéo traite des neurosciences de la violence et des valeurs, en abordant les thèmes suivants :

      Points forts : + [01:00:00][^3^][3] Les mécanismes cérébraux de la violence * Comment le cerveau traite les informations sociales et morales * Comment le cerveau réagit aux situations de conflit et de coopération * Comment le cerveau modifie son fonctionnement en fonction du contexte et de l'appartenance au groupe + [01:30:00][^4^][4] Les facteurs psychologiques et sociaux de la violence * Comment les émotions, les motivations, les normes et les identités influencent la violence * Comment les biais, les stéréotypes, la déshumanisation et la radicalisation facilitent la violence * Comment les processus de persuasion, de conformité, d'obéissance et de leadership modèrent la violence + [02:00:00][^5^][5] Les enjeux éthiques et juridiques de la violence * Comment la violence pose des dilemmes moraux et des questions de responsabilité * Comment la violence affecte les victimes, les témoins, les auteurs et les intervenants * Comment la violence peut être prévenue, réduite ou réparée par des actions individuelles et collectives

      Résumé de la vidéo [02:00:00][^1^][1] - [02:57:42][^2^][2] :

      La deuxième partie de la vidéo traite des neurosciences de la violence et des valeurs, en abordant les thèmes suivants :

      Points forts : + [02:00:00][^3^][3] Les bases biologiques de la violence * Les gènes, les hormones et les neurotransmetteurs impliqués dans la régulation de l'agressivité * Les circuits cérébraux du contrôle de l'impulsion, de la peur et de la colère * Les facteurs environnementaux et sociaux qui modulent l'expression de la violence + [02:19:12][^4^][4] Les valeurs morales et le cerveau * Les processus cognitifs et émotionnels qui sous-tendent le jugement moral * Les régions cérébrales impliquées dans la représentation des normes, des intentions et des conséquences * Les effets du contexte, de la culture et de la personnalité sur les décisions morales + [02:38:24][^5^][5] La violence extrême et le syndrome E * La définition et les caractéristiques du syndrome E, un état de violence de masse * Les mécanismes neuronaux de la fracture cognitive, de la déshumanisation et de l'obéissance à l'autorité * Les pistes de prévention et de traitement du syndrome E

    1. Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [01:31:11][^2^][2] :

      Cette vidéo est la dernière partie d'une conférence sur la migration et le développement, organisée par l'Institut d'études avancées de Paris. Elle présente une table ronde avec quatre intervenants qui abordent différents aspects des liens entre migration et inégalités, tels que l'intégration, l'accès à la migration, les transferts de fonds et l'industrie de la migration. La table ronde est animée par Jim Hollifield, professeur à l'Université méthodiste du Sud et chercheur invité à l'IEA.

      Points forts : + [00:00:00][^3^][3] Introduction de la table ronde * Sadia Lahlou, directrice de l'IEA, accueille les participants et le public * Jim Hollifield présente les intervenants et remercie les organisateurs + [00:06:51][^4^][4] Jason Gagnon, économiste au Centre de développement de l'OCDE * Il expose les effets de la migration sur les inégalités dans les pays d'origine et de destination * Il souligne le rôle des politiques publiques, notamment la protection sociale, pour réduire les inégalités liées à la migration * Il évoque les défis posés par la pandémie et la crise en Ukraine sur les flux migratoires et les transferts de fonds + [00:22:05][^5^][5] Brenda Yeoh, professeure à l'Université nationale de Singapour * Elle propose d'analyser le rôle de l'industrie de la migration dans la production et la reproduction des inégalités * Elle s'intéresse aux intermédiaires qui facilitent et contrôlent la mobilité des migrants, notamment les travailleurs peu qualifiés en Asie * Elle montre comment l'industrie de la migration interagit avec les politiques migratoires des États et les expériences des migrants + [00:31:11][^6^][6] François Héran, professeur au Collège de France et directeur de l'Institut Convergences Migrations * Il revient sur les débats théoriques et empiriques sur la relation entre migration et développement * Il critique la notion de hump migratoire et propose une approche alternative basée sur la notion de seuil migratoire * Il illustre son propos avec des exemples de pays africains et européens + [00:49:28][^7^][7] Myriam Aït-Aoudia, sociologue à Sciences Po * Elle s'interroge sur les effets de la migration sur la citoyenneté et la démocratie dans les pays d'origine * Elle présente les résultats d'une enquête sur les pratiques politiques transnationales des migrants algériens en France * Elle analyse les motivations, les modalités et les impacts de l'engagement politique des migrants à distance + [01:11:22][^8^][8] Discussion et questions du public * Les intervenants répondent aux questions du public sur divers sujets, tels que la régulation de l'industrie de la migration, la comparaison entre les migrations Sud-Sud et Sud-Nord, les effets de la migration sur le changement social, etc. * Jim Hollifield conclut la table ronde et invite le public à rejoindre la réception

    1. Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [01:14:13][^2^][2] :

      Cette vidéo est une conférence sur la crise des banlieues de 2005 en France, organisée par l'Institut d'études avancées de Paris et l'École pratique des hautes études. Elle réunit deux intervenants : Latifa Oulkhir, directrice du Bondy Blog, et Marwan Mohammed, sociologue et chercheur au CNRS. Ils analysent les causes, les conséquences et les leçons de ces événements qui ont marqué l'histoire sociale et politique du pays.

      Points forts : + [00:04:14][^3^][3] Le contexte et le déroulement de la crise * La mort de deux adolescents électrocutés dans un transformateur EDF à Clichy-sous-Bois * La colère et la révolte des jeunes des quartiers populaires face aux violences policières et aux discriminations * La médiatisation et la politisation des événements, avec le rôle de Nicolas Sarkozy + [00:20:10][^4^][4] Les réactions et les réponses publiques * La déclaration de l'état d'urgence et le déploiement des forces de l'ordre * Les mesures sociales et économiques prises par le gouvernement de Dominique de Villepin * Les limites et les insuffisances de ces réponses face aux problèmes structurels + [00:38:02][^5^][5] Les conséquences et les leçons de la crise * L'émergence de nouveaux acteurs sociaux, comme le Bondy Blog ou les associations de terrain * La prise de conscience et la mobilisation autour des questions de discriminations et de violences policières * La nécessité de repenser les politiques publiques et les relations entre les quartiers populaires et le reste de la société

    1. Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [00:50:33][^2^][2] :

      Cette vidéo est une conférence sur la poésie, organisée par Sonia Branca-Rosoff à l'Université Paris Diderot. Plusieurs intervenants, dont des poètes, des philosophes, des historiens et des linguistes, partagent leurs réflexions sur la nature, la fonction et la valeur de la poésie dans le contexte historique et social.

      Points forts : + [00:00:10][^3^][3] Les idées sur la poésie de Platon * La poésie comme expérience créative et révélation * La poésie comme marginalité et risque social * La poésie comme résistance au capital et à l'édition + [00:04:56][^4^][4] Les rapports entre poésie et histoire * La poésie comme expression de la singularité et du commun * La poésie comme quête de centre et de marge * La poésie comme critique et transformation du réel + [00:11:07][^5^][5] Les relations entre poésie et philosophie * La poésie comme exercice de décentrement et de déconstruction * La poésie comme accès à un état mental autre * La poésie comme ontologie du devenir et de la fragmentation + [00:17:03][^6^][6] Les liens entre poésie et chant scientifique * La poésie comme exploration du langage et de la pensée * La poésie comme dialogue avec les savoirs et les disciplines * La poésie comme invention et découverte + [00:25:00][^7^][7] Les enjeux de la poésie contemporaine * La poésie comme faculté naturelle et universelle * La poésie comme marginalisation et exclusion * La poésie comme narcissisme et engagement

    1. Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [01:45:29][^2^][2]:

      Cette vidéo est la deuxième partie d'un colloque organisé par le laboratoire LAVUE sur le thème des paysages alimentaires conviviaux. Elle présente les expériences et les réflexions de quatre intervenants qui s'inscrivent dans une démarche d'activisme et de recherche-action autour de l'alimentation, du paysage et de la convivialité. Ils abordent des sujets tels que les ateliers de cuisine de rue, le jardinage urbain, le pastoralisme en ville et le stockage alimentaire domestique.

      Points forts: + [00:00:00][^3^][3] Introduction de la séance par Raoul * Présente le titre et le thème de la séance * Annonce les quatre intervenants et leurs sujets + [00:01:50][^4^][4] Intervention de Julie Lequin sur les ateliers de cuisine de rue * Présente son parcours et son travail à la SCOP salutaire * Explique le concept et les objectifs des ateliers de cuisine de rue * Analyse les pratiques alimentaires durables des personnes modestes + [00:17:05][^5^][5] Intervention de Mathilde sur le pastoralisme en ville * Présente son parcours et son projet de bergerie urbaine * Raconte ses expériences et ses difficultés avec les moutons * Interroge le rapport à la viande et à l'agriculture + [00:29:20][^6^][6] Intervention de Téralim sur les circuits courts et les paysages alimentaires * Présente son parcours et son travail au bureau d'étude Téralim * Explique sa thèse sur les circuits courts alimentaires * Présente les résultats de son enquête sur les paysages alimentaires + [00:41:17][^7^][7] Intervention de Raoul sur le stockage alimentaire domestique * Présente son parcours et son travail au laboratoire LAVUE * Explique son projet de recherche sur le stockage alimentaire * Présente les résultats de son enquête sur les pratiques de stockage + [01:21:15][^8^][8] Discussion et échanges avec le public * Répond aux questions et aux commentaires du public * Développe des pistes de réflexion et d'action * Conclut la séance et remercie les participants

    1. Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [00:44:18][^2^][2]:

      Cette vidéo est une conférence de Jean-Gabriel Ganascia, professeur d'informatique à Sorbonne Université, sur le thème des servitudes virtuelles. Il s'agit de la manière dont les technologies numériques, et notamment l'intelligence artificielle, peuvent exercer des formes de contrainte et d'oppression sur les individus et les sociétés. Il analyse les enjeux éthiques, politiques et juridiques de ces technologies, et propose des pistes de réflexion pour s'en libérer.

      Points clés: + [00:00:07][^3^][3] Il rend hommage à Blaise Pascal, précurseur de la machine à calculer et de la réflexion sur l'intelligence artificielle * Il cite un texte où Pascal distingue les machines des animaux par l'absence de volonté * Il critique les transhumanistes qui veulent attribuer une volonté aux machines + [00:02:46][^4^][4] Il décrit le monde en ligne dans lequel nous vivons, où nos vies sont soumises aux flux d'information et à l'intelligence artificielle * Il reconnaît les bienfaits du numérique dans de nombreux domaines (web, santé, robotique, écologie, etc.) * Il dénonce les nouvelles formes de coercition et d'oppression qui s'exercent au plan cognitif * Il compare la situation actuelle à celle décrite par Étienne de La Boétie dans son Discours de la servitude volontaire + [00:09:01][^5^][5] Il expose les limites des chartes éthiques du numérique, qui se multiplient sans être efficaces * Il montre que les principes invoqués (autonomie, dignité, bienfaisance, non-malfaisance, etc.) sont ambigus, relatifs et imprécis * Il illustre les conséquences sociales et politiques des technologies de l'information et de la communication avec des exemples concrets (reconnaissance faciale, crédit social, cloud act, etc.) * Il plaide pour une approche plus pragmatique et plus critique, qui prenne en compte les usages réels et les modes d'appropriation des technologies + [00:20:10][^6^][6] Il propose une éthique du numérique fondée sur la responsabilité individuelle et collective * Il distingue l'éthique de la morale, de la déontologie et du droit * Il définit l'éthique comme une réflexion sur les valeurs et les normes qui orientent nos actions * Il s'inspire de la pensée de Jacques Derrida, qui met l'accent sur l'ouverture à l'avenir et à l'imprévisible * Il cite un texte d'Albert Camus, qui donne quatre conseils aux journalistes : être lucide, refuser de diffuser la haine, user de l'ironie et être obstiné

    1. Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [01:16:00][^2^][2] :

      Cette vidéo est une conférence organisée par l'Institut d'études avancées de Nantes sur le thème "Le Bien Commun, clé juridique du monde qui vient ?". Elle réunit quatre intervenants qui exposent leurs réflexions sur la notion de bien commun et ses implications juridiques, politiques et écologiques. Ils abordent notamment les questions de la propriété, de la gouvernance, de la participation, de la transmission et de la protection des biens communs, en s'appuyant sur des exemples concrets et des propositions innovantes.

      Points forts : + [00:05:39][^3^][3] Corinne Lepage présente la Déclaration universelle des droits et devoirs de l'humanité * Un texte élaboré en 2015 à la demande du Président français * Un texte qui met la notion de bien commun au cœur de sa réflexion * Un texte qui reconnaît les droits fondamentaux, l'équité intergénérationnelle et la préservation des ressources vitales + [00:20:10][^4^][4] Armand Hatchuel expose les enjeux de la gestion collective des biens communs * Une approche qui dépasse la dichotomie entre propriété privée et propriété publique * Une approche qui repose sur la coopération, la créativité et la responsabilité des acteurs * Une approche qui nécessite de repenser les cadres juridiques, institutionnels et cognitifs + [00:43:34][^5^][5] Thomas Perroud analyse les expériences juridiques de reconnaissance des biens communs * Des expériences qui tentent de répondre à la privatisation du monde et à la crise écologique * Des expériences qui se situent à différents niveaux (constitutionnel, législatif, jurisprudentiel) * Des expériences qui présentent des limites et des défis (hiatus, échec, financement, etc.) + [01:11:22][^6^][6] Christian Huglo propose des pistes pour le développement du droit des biens communs * Une piste qui consiste à renforcer la fonction sociale et écologique de la propriété * Une piste qui consiste à favoriser la participation citoyenne et la démocratie environnementale * Une piste qui consiste à reconnaître la personnalité juridique de certains biens communs naturels

    1. Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [02:12:44][^2^][2]:

      Cette vidéo est une conférence sur les biens communs, organisée par l'Institut d'études avancées de Paris, avec la participation de quatre intervenants : Jessica Makovia, professeure de droit, Dominique Bourg, philosophe, Olivier Poivre d'Arvor, ambassadeur, et Bernard Laville, sociologue. Ils abordent les enjeux théoriques, juridiques, politiques et pratiques liés à la notion de biens communs, en particulier dans le domaine de l'environnement et de la mer.

      Points forts : + [00:00:00][^3^][3] Introduction de la conférence * Présentation des intervenants et du cycle de conférences sur les biens communs * Rappel de l'importance de la recherche et de l'interdisciplinarité pour la ville de Paris * Enjeux de la notion de biens communs face aux défis du siècle + [00:28:27][^4^][4] Les biens communs environnementaux * Analyse des différentes méthodes juridiques pour appréhender le commun : l'esquive, l'énumération, la définition * Exemples de l'eau, de la biodiversité, du climat, de la haute mer * Difficultés à concilier les logiques de propriété, de souveraineté et de commun + [01:02:02][^5^][5] Le commun comme alternative politique * Critique du dualisme moderne entre nature et culture, sujet et objet, individu et collectif * Proposition d'une définition du commun comme un réseau d'interdépendances entre les êtres vivants * Plaidoyer pour une démocratie écologique fondée sur la participation, la délibération et la responsabilité + [01:33:55][^6^][6] La haute mer comme patrimoine commun de l'humanité * Récit de la négociation internationale sur la conservation et l'exploitation durable de la biodiversité marine * Enjeux de la protection des écosystèmes, du partage des ressources, de la coopération scientifique * Perspectives d'un traité historique pour reconnaître la haute mer comme un bien commun mondial

    1. Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [01:48:19][^2^][2]:

      Cette vidéo est une conférence sur les biens communs pour partager la connaissance, organisée par le Collège de France en 2023. Elle réunit trois intervenants qui sont des experts dans le domaine des données numériques et de leur diffusion. Ils abordent les enjeux, les opportunités et les limites de l'ouverture des données, notamment dans les domaines de la recherche, de la géographie, du climat et du patrimoine. Ils illustrent leurs propos par des exemples concrets de projets et de plateformes qui visent à créer des communs numériques, c'est-à-dire des ressources partagées et accessibles à tous.

      Points clés: + [00:08:31][^3^][3] Les données sont au centre de l'innovation économique et sociale * Elles sont nécessaires pour le progrès de la connaissance et la résolution des problèmes * Elles doivent être de qualité, non biaisées, représentatives et interopérables * Elles posent des questions de protection, de régulation et d'éthique + [00:34:00][^4^][4] L'IGN a développé une stratégie de géocommuns pour coproduire et partager les données géographiques * Il s'agit de passer d'un modèle de producteur unique à un modèle de collaboration avec les acteurs du territoire * Il s'agit de créer des tables communes où chacun peut déposer et utiliser des données * Il s'agit de soutenir et de valoriser des initiatives innovantes dans le domaine de la géographie + [00:54:40][^5^][5] Le Haut Conseil pour le climat utilise les données pour évaluer et orienter les politiques climatiques * Il s'agit de mesurer les émissions de gaz à effet de serre, l'empreinte carbone, la vulnérabilité et l'adaptation des territoires * Il s'agit de comparer les scénarios et les trajectoires possibles pour atteindre la neutralité carbone * Il s'agit de sensibiliser et de mobiliser les acteurs et les citoyens sur les enjeux du changement climatique + [01:14:00][^6^][6] Le Collège de France a lancé une plateforme de données ouvertes sur le patrimoine culturel * Il s'agit de mettre à disposition des chercheurs et du public des données issues des collections et des archives du Collège * Il s'agit de favoriser la diffusion et la valorisation des savoirs et des œuvres * Il s'agit de créer des passerelles entre les disciplines et les époques à travers les données

    2. Quels biens communs pour partager la connaissance ?, E. BACRY, M. REGHEZZA-ZITT, N. BERTHELOT

      Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [01:48:00][^2^][2] :

      Cette vidéo est une conférence sur le thème des biens communs pour partager la connaissance, organisée par la Fondation Maison des sciences de l'homme. Trois intervenants présentent leurs travaux et leurs réflexions sur les enjeux, les opportunités et les limites de l'ouverture des données dans différents domaines : la santé, la géographie et le climat. Ils abordent également les questions de qualité, de représentativité, d'interopérabilité, de gouvernance et de régulation des données, ainsi que les défis éthiques, juridiques et sociétaux liés à leur exploitation.

      Points clés : + [00:08:03][^3^][3] Emmanuel Bacry : les données de santé * Présente le Data Hobb, un projet de plateforme de données de santé ouverte et sécurisée * Explique les notions de données personnelles, pseudonymisées et anonymes selon le RGPD * Souligne les risques de biais, de mauvaise qualité et de ré-identification des données * Plaide pour une meilleure représentativité et interopérabilité des données de santé + [00:25:18][^4^][4] Magali Reghezza-Zitt : les données de géographie et de climat * Montre l'importance des données géographiques pour comprendre les dynamiques territoriales et les enjeux climatiques * Expose les difficultés d'accès, de partage et de valorisation des données géographiques * Présente le Haut Conseil pour le climat, une instance indépendante qui produit des rapports et des avis sur la transition écologique * Insiste sur le rôle des sciences sociales et de la participation citoyenne dans la production et l'usage des données + [00:49:10][^5^][5] Nicolas Berthelot : les données spatiales et les géo-communs * Présente l'IGN, un établissement public qui produit et diffuse des données géographiques de référence * Explique les évolutions technologiques et institutionnelles qui ont transformé le paysage des données spatiales * Introduit le concept de géo-communs, des ressources géographiques partagées et gérées collectivement * Propose des pistes pour favoriser la coopération, la mutualisation et la réutilisation des données spatiales

      Résumé de la vidéo [00:50:00][^1^][1] - [01:48:00][^2^][2]:

      Cette partie de la vidéo traite de la question des biens communs pour partager la connaissance, en particulier dans le domaine de la géographie et du climat. Les intervenants présentent leurs expériences, leurs projets et leurs réflexions sur les enjeux et les opportunités liés à la production, à la diffusion et à l'utilisation des données géographiques.

      Points forts: + [00:50:00][^3^][3] Nicolas Berthelot expose la stratégie de l'IGN pour construire des géo-communs * Présente le contexte de la concurrence et de la coopération entre les acteurs de la géographie * Explique le concept de géo-commun comme une ressource partagée et coproduite par une communauté * Décrit les rôles de l'IGN comme opérateur, animateur, sponsor et garant des géo-communs * Donne des exemples de projets comme Panoramax, Géoportail et Géosource + [01:04:00][^4^][4] Magali Reghezza-Zitt présente les travaux du Haut Conseil pour le climat sur les données * Souligne l'importance des données pour évaluer les politiques climatiques et les impacts du changement climatique * Montre les limites et les biais des données disponibles, notamment sur les émissions, les consommations et les vulnérabilités * Appelle à une meilleure gouvernance, une meilleure qualité et une meilleure accessibilité des données climatiques * Insiste sur le rôle des sciences humaines et sociales pour interpréter et contextualiser les données + [01:24:00][^5^][5] Emmanuel Bacry présente les défis et les opportunités de l'analyse des données massives * Définit les caractéristiques des données massives comme le volume, la variété, la vélocité et la véracité * Présente les méthodes et les outils de l'intelligence artificielle pour traiter les données massives, comme l'apprentissage automatique et le deep learning * Illustre les applications de l'analyse des données massives dans différents domaines, comme la santé, la finance, la culture et la mobilité * Discute des enjeux éthiques, juridiques et sociétaux liés à l'usage des données massives, comme la protection de la vie privée, la responsabilité et la transparence

    1. Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [00:27:00][^2^][2] :

      Cette vidéo est une conférence du psychologue du développement Philippe Rochat sur le thème du mensonge et de l'authenticité. Il aborde les questions suivantes : qu'est-ce que le mensonge, comment et pourquoi les enfants apprennent à mentir, quel est le lien entre le mensonge et la conscience de soi, et comment le mensonge s'inscrit dans un espace moral.

      Points forts : + [00:00:00][^3^][3] La présentation du thème et des intervenants * Le conférencier remercie l'institut Grass pour l'invitation * Il expose la problématique générale du mensonge et de l'authenticité * Il présente les différents intervenants de la journée + [00:06:00][^4^][4] La perspective développementale sur le mensonge * Le conférencier explique que les enfants commencent à faire semblant très tôt, avant le langage * Il montre que la tromperie stratégique émerge vers 4 ans, avec l'entrée à l'école et le développement de la théorie de l'esprit * Il souligne l'ambiguïté et la complexité du mensonge, qui soulève des questions philosophiques et morales + [00:14:00][^5^][5] Le lien entre le mensonge et la conscience de soi * Le conférencier présente le test du miroir, qui mesure la capacité à se reconnaître soi-même * Il montre des vidéos d'enfants qui réagissent à leur image marquée dans le miroir, en exprimant de l'embarras ou de la gêne * Il interprète ces réactions comme le signe d'une conscience de soi qui intègre le regard d'autrui + [00:20:00][^6^][6] Le paradoxe du mensonge et de l'équité * Le conférencier expose le fait que les enfants deviennent à la fois plus équitables et plus menteurs vers 5 ans * Il montre des vidéos d'enfants qui partagent des bonbons de façon équitable ou qui trichent dans une tâche de mémoire * Il suggère que le mensonge et les attitudes prosociales se développent de façon parallèle et inséparable

    1. Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [00:48:00][^2^][2] :

      Cette vidéo est une conférence de Jean-Marc Borello, psychologue et thérapeute, sur le thème du mensonge chez les enfants et les adolescents. Il expose son point de vue constructiviste et pragmatique sur le mensonge, qu'il considère comme une modalité de communication adaptative et créative. Il distingue le mensonge fonctionnel, qui permet de se construire et de s'adapter à son environnement, du mensonge dysfonctionnel, qui entraîne des problèmes relationnels ou psychologiques. Il présente ensuite son approche thérapeutique, basée sur la reconfiguration des croyances et des perceptions, à travers des exemples concrets de jeunes délinquants ou radicalisés.

      Points forts : + [00:00:00][^3^][3] Le mensonge : un point de vue constructiviste et pragmatique * Le mensonge est inséparable de la question de la réalité et de la vérité * Le mensonge est une forme d'action et de pouvoir sur le monde * Le mensonge est un acte de création et d'adaptation + [00:14:14][^4^][4] Le mensonge fonctionnel et le mensonge dysfonctionnel * Le mensonge fonctionnel est utile pour soi ou pour les autres * Le mensonge dysfonctionnel est nuisible pour soi ou pour les autres * Le mensonge dysfonctionnel est lié à des croyances rigides ou erronées + [00:26:28][^5^][5] L'apprentissage du mensonge chez les enfants * Le mensonge se développe avec le langage et la cognition * Le mensonge permet d'expérimenter des réalités alternatives * Le mensonge favorise l'autonomie et la socialisation + [00:31:17][^6^][6] La détection du mensonge * Le mensonge est difficile à détecter par les signes non verbaux * Le mensonge est plus facile à détecter par les incohérences verbales * Le mensonge est plus fréquent dans certaines situations ou contextes + [00:44:35][^7^][7] La thérapie du mensonge * La thérapie vise à reconfigurer les croyances et les perceptions * La thérapie utilise des techniques stratégiques et paradoxales * La thérapie s'appuie sur les émotions et les expériences vécues

    1. Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [00:37:00][^2^][2]:

      Cette vidéo présente le point de vue de deux pédopsychiatres, David Cohen et Richard Delorme, sur la question du mensonge chez l'enfant et l'adolescent. Ils abordent les aspects développementaux, psychopathologiques et fictionnels du mensonge, en s'appuyant sur des recherches, des exemples cliniques et des réflexions théoriques.

      Points forts: + [00:00:17][^3^][3] Le mensonge sur le plan développemental * Les différentes étapes du mensonge chez l'enfant, de 2 à 8 ans * Les compétences cognitives et sociales nécessaires pour mentir * Les types de mensonges selon les motivations: antisocial, défensif, pro-social * L'influence de l'environnement familial, culturel et éducatif sur le mensonge + [00:10:25][^4^][4] Le mensonge en psychopathologie * L'histoire du concept de mythomanie et ses critiques * La distinction entre le mensonge pathologique et les troubles délirants * Le mensonge dans les troubles de la conduite, les troubles de la personnalité et les troubles cognitifs + [00:23:18][^5^][5] Mensonges et fiction, un mal nécessaire * La spécificité humaine de la fiction comme objet mental * La fiction comme source de décision, de comportement et de création * Les exemples de fiction chez les patients atteints de troubles neurologiques * La fiction comme va-et-vient entre l'ego et l'alter-ego

    1. Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [01:50:00][^2^][2] :

      Cette vidéo est une conférence organisée par l'Institut d'études avancées de Nantes sur le thème "Le Bien Commun, clé juridique du monde qui vient ?". Elle réunit quatre intervenants qui exposent leurs réflexions sur la notion de bien commun et son rôle dans la transition écologique, la démocratie participative, la gestion des ressources naturelles et la protection des droits de l'humanité.

      Points forts : + [00:05:39][^3^][3] Corinne Lepage présente la Déclaration universelle des droits et devoirs de l'humanité * Un texte élaboré en 2015 par un groupe de juristes à la demande du Président de la République française * Un texte qui met la notion de bien commun au cœur de ses principes, droits et devoirs * Un texte qui reconnaît l'interdépendance entre les besoins fondamentaux, les ressources vitales, les équilibres écologiques et le patrimoine commun de l'humanité + [00:44:13][^4^][4] Thomas Perroud analyse les expériences juridiques de reconnaissance des biens communs en Italie, en France et au Chili * Des expériences qui témoignent d'une volonté de remédier à la privatisation du monde et de réformer le droit de propriété * Des expériences qui révèlent un hiatus entre les recherches sur les communs comme formes d'action collective et les textes juridiques qui consacrent la notion de bien commun * Des expériences qui proposent des éléments de gouvernance démocratique, solidaire, participative et équitable des biens communs + [01:03:06][^5^][5] Armand Hatchuel expose les enjeux de la création collective des biens communs * Une création qui repose sur la capacité des acteurs à se projeter dans l'avenir et à imaginer des possibles * Une création qui nécessite des espaces de liberté, de coopération et d'expérimentation * Une création qui implique une transformation des institutions, des normes et des savoirs + [01:28:50][^6^][6] Christian Huglo plaide pour une reconnaissance juridique de la personnalité de la nature * Une reconnaissance qui permettrait de protéger les biens communs naturels contre les atteintes portées par les activités humaines * Une reconnaissance qui s'appuierait sur les principes du droit de l'environnement, du droit international et du droit constitutionnel * Une reconnaissance qui s'inspirerait des expériences étrangères, notamment en Amérique latine, où des cours ont accordé des droits à des fleuves, des forêts ou des glaciers

    1. Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [00:48:00][^2^][2] :

      Cette vidéo est une conférence sur les low-tech, c'est-à-dire les technologies utiles, durables et accessibles, comme alternative à notre système de production et de consommation actuel. Elle présente les principes, les exemples et les enjeux des low-tech, ainsi que les recherches et les expérimentations menées par le Low-tech Lab et le Centre de sociologie de l'innovation.

      Points forts : + [00:00:00][^3^][3] Introduction du cycle "Agir en temps de crise" * Présentation des partenaires et du thème * Présentation des intervenants Quentin Mateus et Morgan Meyer + [00:02:31][^4^][4] Définition et exemples de low-tech * Trois piliers : utile, durable, accessible * Exemples : toilettes sèches, capteur air chaud, four solaire, etc. * Changement de rapport à la technologie et aux besoins + [00:10:46][^5^][5] Diffusion et capitalisation des savoirs low-tech * Encyclopédie participative en ligne avec des tutoriels open source * Réseau de communautés locales qui se forment et s'entraident * Enquêtes auprès d'acteurs professionnels qui utilisent ou proposent des low-tech + [00:18:04][^6^][6] Recherches et analyses sociologiques sur les low-tech * Intérêt croissant des chercheurs et des institutions pour le sujet * Exemples de travaux sur l'ergonomie, l'agriculture paysanne, la boulangerie au four solaire, etc. * Réflexion sur l'innovation, la technologie, la transition et la société + [00:36:46][^7^][7] Questions du public et conclusion * Réponses sur les jeunes générations, le niveau européen, le rôle de l'industrie, etc. * Perspectives d'avenir et de développement des low-tech * Remerciements et annonce de la prochaine séance

    1. Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [00:56:00][^2^][2] :

      Cette vidéo est une conférence organisée par l'Institut d'études avancées de Paris et l'École Pratique des Hautes Études sur le thème "Comment peut-on changer les systèmes urbains ?". Elle réunit deux intervenants : Stéphanie Vermeersch, sociologue et directrice adjointe scientifique à l'Institut des sciences humaines et sociales du CNRS, et François Croquette, diplomate et directeur de la transition écologique et du climat à la Ville de Paris. Ils abordent les principaux défis et les actions concrètes liés à la crise climatique, à la crise sociale et à la crise sanitaire dans les villes.

      Points clés : + [00:03:04][^3^][3] Les défis des systèmes urbains * La croissance démographique et la densité urbaine * Les risques climatiques (îlots de chaleur, inondations, canicules, etc.) * Les inégalités sociales et spatiales * Les problèmes de mobilité et de pollution * Les menaces sanitaires et sécuritaires + [00:07:34][^4^][4] Les actions de la Ville de Paris * Le plan climat pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et atteindre la neutralité carbone en 2050 * Les secteurs prioritaires d'intervention : le logement, l'alimentation, les transports, l'énergie * Les leviers d'adaptation et d'innovation : la végétalisation, le vélo, le télétravail, la rénovation thermique, les circuits courts, etc. * La coopération avec les autres acteurs : les citoyens, les territoires voisins, les partenaires internationaux + [00:41:51][^5^][5] Les Jeux olympiques et paralympiques de 2024 * Un événement majeur et un défi logistique * Une opportunité pour accélérer la transition écologique * Un exemple de résilience et de solidarité

    1. Résumé de la vidéo [00:00:00] - [01:58:00] :

      Cette vidéo est une conférence organisée par l'Institut d'études avancées de Paris sur le thème des biens communs. Elle réunit quatre intervenants qui abordent la question sous des angles différents : philosophique, juridique, historique et sociétal. Ils exposent leurs réflexions et leurs expériences sur la notion de commun, ses enjeux, ses pratiques et ses perspectives.

      Points forts : + [00:02:35] La notion de commun comme praxis instituante * Pierre Dardot présente sa conception du commun comme une activité de mise en commun qui implique une décision collective et une règle commune * Il distingue le commun du bien commun et des communs, et critique les approches qui réduisent le commun à une catégorie juridique ou économique * Il propose de penser le commun comme un principe politique qui permet de résister à la logique de la propriété et de l'appropriation + [00:21:14] La création des communs de données numériques * Francis Jutand explique les enjeux et les défis liés à la production, au partage et à l'exploitation des données numériques * Il présente la chaire qu'il a créée à l'IMT sur l'économie des communs de données, qui vise à étudier les conditions et les modalités de la mise en commun des données * Il souligne l'importance de la confiance, de la coopération et de la régulation pour construire des communs de données respectueux des droits et des intérêts des acteurs impliqués + [00:35:35] L'histoire des communs agro-pastoraux dans les Alpes * Angelo Torre raconte comment les paysans des Alpes ont développé des pratiques de gestion collective des ressources naturelles, notamment les forêts et les pâturages * Il montre comment ces pratiques ont façonné le paysage, la culture et l'identité des communautés alpines, et comment elles ont évolué au fil du temps * Il analyse les conflits, les compromis et les innovations qui ont marqué l'histoire des communs agro-pastoraux, et les leçons qu'on peut en tirer pour le présent + [00:49:54] L'alchimie du bien commun dans les territoires * Charles-Benoît Heidsieck expose sa vision du bien commun comme une dynamique de transformation sociale qui repose sur la mobilisation des acteurs de la société civile * Il présente le rôle et les actions du Rameau, une association qu'il a fondée pour accompagner et valoriser les partenariats entre les acteurs publics, privés et associatifs * Il illustre son propos par des exemples concrets de projets de bien commun dans les domaines de la santé, de l'éducation, de l'environnement et de la solidarité

      Résumé de la vidéo [00:50:00][^1^][1] - [01:58:00][^2^][2] :

      Cette partie de la vidéo est un débat entre quatre intervenants sur la question des biens communs, animé par Géraldine Muhlmann. Les intervenants sont Pierre Dardot, philosophe et auteur de plusieurs ouvrages sur les communs, Francis Jutand, prospectiviste et directeur de la chaire sur l'économie des communs de données, Angelo Torre, historien et spécialiste des communs agro-pastoraux, et Charles-Benoît Heidsieck, fondateur du Rameau et expert des alliances entre acteurs de l'intérêt général.

      Points saillants : + [00:50:00][^3^][3] Pierre Dardot expose sa conception des communs comme une activité instituante * Il distingue les communs des biens communs, qui sont des objets de droit * Il critique la notion de bien commun naturel, qui repose sur une naturalisation de la valeur * Il propose de penser les communs comme des pratiques sociales et politiques qui visent à mettre en commun des ressources + [01:04:00][^4^][4] Francis Jutand présente les enjeux et les défis de l'économie des communs de données * Il souligne le rôle des données numériques comme ressources stratégiques pour l'innovation et la coopération * Il explique les difficultés techniques, juridiques et éthiques pour créer et gérer des communs de données * Il illustre son propos avec des exemples de projets de communs de données dans le domaine de la santé, de l'environnement et de la culture + [01:18:00][^5^][5] Angelo Torre analyse les dynamiques historiques et spatiales des communs agro-pastoraux * Il montre comment les communs ont été des formes d'organisation adaptées aux contraintes écologiques et économiques des territoires * Il retrace l'évolution des communs depuis le Moyen Âge jusqu'à nos jours, en insistant sur les conflits et les négociations qui les ont traversés * Il propose une typologie des communs selon leur degré d'ouverture, de régulation et de participation + [01:32:00][^6^][6] Charles-Benoît Heidsieck partage son expérience des alliances entre acteurs de l'intérêt général * Il décrit les différentes formes de partenariats possibles entre les acteurs publics, privés et associatifs pour créer de la valeur commune * Il donne des exemples concrets de projets qui ont permis de répondre à des besoins sociaux ou environnementaux grâce à la mobilisation de différents acteurs * Il insiste sur l'importance de la confiance, de la co-construction et de la mesure de l'impact pour réussir ces alliances

    1. Roberto CASATI, The cognitive life of maps

      Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [00:40:00][^2^][2] :

      Cette vidéo est une conférence du professeur Roberto Casati sur la vie cognitive des cartes, c'est-à-dire la façon dont nous interagissons avec les cartes pour nous orienter et comprendre le monde. Il présente les caractéristiques, les limites et les enjeux des cartes comme représentations spatiales, en les comparant à d'autres formes de représentation comme les diagrammes, le langage ou les images. Il propose une sémantique formelle des cartes basée sur la notion de termes singuliers structurés, qui permet de rendre compte de la compositionnalité, de la généricité naturelle et de l'assignation automatique des cartes.

      Points forts : + [00:01:37][^3^][3] Les quatre modes d'orientation * Il distingue quatre façons de se repérer dans l'espace : le système 1 (automatique), le système 2 (réfléchi), le système 3 (avec une carte) et le système 4 (avec un GPS) * Il s'intéresse au système 3, qui implique une interaction entre l'utilisateur et la carte, et qui nécessite des compétences spatiales et des calculs de navigation + [00:10:55][^4^][4] Les contraintes méthodologiques pour étudier les cartes * Il pose trois contraintes pour définir ce qu'est une carte : la même dimensionnalité, la distinction entre la carte et le territoire, et la contrainte méritopologique * Il exclut les cas de distraction, comme les cartes qui mentent ou qui sont inversées, et se concentre sur les cas paradigmatiques de cartes + [00:14:40][^5^][5] La sémantique squelettique des cartes * Il développe une sémantique formelle des cartes qui repose sur l'idée que les cartes sont des surfaces colorées qui expriment des propriétés des régions du territoire * Il montre comment la vérité d'une carte peut être dérivée de la vérité de ses couches, qui sont des transparences imprimées d'une seule couleur * Il compare les cartes au langage naturel et montre que les cartes ont des termes singuliers structurés, qui sont des régions qui ont une structure méritopologique + [00:22:00][^6^][6] La généricité naturelle et l'hyper généricité des cartes * Il reprend la notion de généricité naturelle de Flint Schier, qui caractérise les représentations iconiques comme les images, et qui implique que la connaissance du sens d'une image et l'acquaintance perceptive avec d'autres objets génèrent la connaissance du sens d'autres images * Il soutient que les cartes sont hyper génériques, car il suffit d'avoir une compétence spatiale pour comprendre le sens de n'importe quelle carte, sans même avoir besoin d'acquaintance perceptive * Il illustre ce point avec un exemple de représentation d'un éléphant et d'un chien sur une table + [00:26:26][^7^][7] L'assignation automatique des cartes * Il décrit le phénomène de l'assignation automatique, qui consiste à ce que dès qu'une forme est tracée sur une surface et qu'on lui attribue la fonction de carte, toutes les parties de cette forme deviennent immédiatement sémantiquement actives * Il explique que c'est une sorte de magie qui fait que les cartes ont un pouvoir de référence immédiat, et que le travail du cartographe est ensuite de trouver quelle partie de la carte correspond à quelle partie du territoire * Il compare ce phénomène au langage naturel et montre que les cartes sont plus transparentes que les expressions linguistiques

      Résumé de la vidéo [00:28:00][^1^][1] - [00:40:00][^2^][2] :

      Cette partie de la vidéo traite de la relation entre les cartes et les images, et de la façon dont les cartes peuvent être considérées comme des images particulières qui ont des propriétés spécifiques. L'orateur présente les arguments de Goodman, Blum et Kulik, qui soutiennent que les cartes sont des images dénotatives, c'est-à-dire qu'elles représentent directement des objets ou des situations sans passer par un langage conventionnel. Il examine ensuite les objections de Resnikoff, qui affirme que les cartes sont des images connotatives, c'est-à-dire qu'elles impliquent une interprétation basée sur des règles et des symboles. Il propose enfin sa propre position, qui consiste à distinguer entre les aspects dénotatifs et connotatifs des cartes, et à montrer comment les cartes peuvent être à la fois des images et des langages.

      Points forts : + [00:28:15][^3^][3] Les cartes sont des images dénotatives selon Goodman, Blum et Kulik * Ils s'appuient sur le principe de la ressemblance et de la projection * Ils rejettent l'idée que les cartes soient des langages ou des systèmes de signes * Ils soulignent le rôle de la perception et de la cognition spatiale dans la compréhension des cartes + [00:33:25][^4^][4] Les cartes sont des images connotatives selon Resnikoff * Il critique le principe de la ressemblance et de la projection comme insuffisants et trompeurs * Il défend l'idée que les cartes sont des langages ou des systèmes de signes qui nécessitent un apprentissage * Il met en évidence le rôle de la culture et de la convention dans la production et l'interprétation des cartes + [00:37:10][^5^][5] Les cartes sont des images particulières qui combinent des aspects dénotatifs et connotatifs selon l'orateur * Il reconnaît la validité des arguments des deux camps, mais les considère comme incomplets et partiels * Il propose une distinction entre les aspects iconiques et symboliques des cartes, qui correspondent respectivement aux aspects dénotatifs et connotatifs * Il montre comment les cartes peuvent être à la fois des images et des langages, en fonction du contexte et du but de leur utilisation

    1. Fabriquer du commun dans un monde fracturé, F. WORMS, D. SCHNAPPER, F. GEMENNE, B. LAVILLE, L.SCHMID

      Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [02:28:00][^2^][2] :

      Cette vidéo est une table ronde organisée par la Maison des Sciences de l'Homme Paris-Saclay sur le thème "Fabriquer du commun dans un monde fracturé". Elle réunit cinq intervenants de différentes disciplines (philosophie, sociologie, science politique, géographie, économie) qui réfléchissent aux enjeux du bien commun à différentes échelles (locale, nationale, européenne, mondiale) et dans différents domaines (environnement, démocratie, citoyenneté, culture, etc.). Ils analysent les causes et les conséquences des fractures sociales, politiques et écologiques qui menacent le vivre-ensemble, et proposent des pistes pour renouer avec l'idée et la pratique du bien commun.

      Points saillants : + [00:00:07][^3^][3] Introduction par Bernard Laville, président de la MSH Paris-Saclay * Présente l'esprit et le déroulement du cycle de rencontres sur les biens communs * Rappelle les intervenants et les thèmes des séances précédentes * Annonce le sujet et les invités de la table ronde finale + [00:14:10][^4^][4] Frédéric Worms, philosophe et directeur de l'ENS * Interroge la notion de bien commun du point de vue philosophique * Distingue le bien commun planétaire (lié à la survie de l'humanité) et le bien commun démocratique (lié à la vie en société) * Souligne les tensions et les paradoxes entre ces deux dimensions * Appelle à une réflexion sur les conditions et les modalités du bien commun + [00:27:25][^5^][5] Dominique Schnapper, sociologue et présidente du Conseil des sages de la laïcité * Aborde la question du bien commun du point de vue sociologique * Relève les difficultés à définir et à réaliser le bien commun dans les sociétés modernes * Insiste sur le rôle de la citoyenneté et de l'intérêt général comme fondements du bien commun * Plaide pour une conception pluraliste et dynamique du bien commun + [00:40:06][^6^][6] Lucile Schmid, vice-présidente de la Fabrique écologique * Traite du bien commun du point de vue écologique * Montre les limites et les contradictions des approches classiques du bien commun * Défend une vision plus radicale et plus globale du bien commun, fondée sur la justice environnementale * Propose des pistes pour repenser le bien commun à l'ère de l'Anthropocène + [00:54:39][^7^][7] François Gemenne, politologue et spécialiste des migrations * Aborde le bien commun du point de vue géopolitique * Analyse les enjeux et les défis du bien commun à l'échelle mondiale * Critique le manque de solidarité et de coopération internationale face aux crises globales * Appelle à une refondation du bien commun sur la base de l'habitabilité de la planète + [01:06:24][^8^][8] Questions du public et réponses des intervenants * Portent sur des sujets variés, tels que la démocratie participative, la responsabilité des acteurs, la régulation des biens communs, la place de la culture, etc. * Permettent d'approfondir et de nuancer certains points abordés par les intervenants * Témoignent de l'intérêt et de la diversité des perspectives sur le bien commun

      Résumé de la vidéo [01:10:00][^1^][1] - [02:28:00][^2^][2]:

      Cette vidéo est la deuxième partie d'une table ronde sur le thème "Fabriquer du commun dans un monde fracturé : échelle du bien commun". Elle réunit quatre intervenants : Dominique Schnapper, sociologue et présidente du conseil scientifique de la Maison des sciences de l'homme, Frédéric Worms, philosophe et directeur de l'École normale supérieure, François Gemenne, politologue et spécialiste des questions de géopolitique de l'environnement, et Lucile Schmid, vice-présidente de la Fondation européenne pour le climat. Ils abordent les enjeux du bien commun à différentes échelles : nationale, européenne, mondiale, et planétaire.

      Points saillants : + [01:10:00][^3^][3] Dominique Schnapper expose sa conception du bien commun comme un projet politique et démocratique * Elle distingue le bien commun de l'intérêt général, du bien public, et du bien-être * Elle souligne le rôle de la citoyenneté, de la délibération, et de la représentation dans la construction du bien commun * Elle analyse les défis actuels du bien commun face aux fractures sociales, culturelles, et territoriales + [01:32:00][^4^][4] Frédéric Worms propose une réflexion philosophique sur le bien commun comme un horizon de sens et de valeur * Il retrace l'histoire du concept de bien commun dans la pensée occidentale, de Platon à nos jours * Il montre comment le bien commun implique une relation entre les humains et le monde, entre le singulier et l'universel, entre le présent et l'avenir * Il appelle à une responsabilité collective et individuelle pour préserver le bien commun face aux menaces existentielles + [01:54:00][^5^][5] François Gemenne expose les enjeux du changement climatique comme un défi majeur pour le bien commun à l'échelle planétaire * Il critique la vision nationale et égoïste de la lutte contre le réchauffement global, qui néglige la responsabilité historique et la solidarité internationale * Il plaide pour une approche globale et coopérative, qui prenne en compte les impacts du changement climatique sur l'habitabilité de la planète et les migrations humaines * Il invite à repenser les notions de souveraineté, de frontières, et de droits de l'homme à la lumière de la communauté de destin des humains et des non-humains + [02:16:00][^6^][6] Lucile Schmid présente les initiatives de la Fondation européenne pour le climat en faveur du bien commun à l'échelle européenne * Elle rappelle le rôle pionnier et exemplaire de l'Union européenne dans la lutte contre le changement climatique et la promotion de la transition écologique * Elle évoque les projets soutenus par la Fondation, qui visent à renforcer la participation citoyenne, le dialogue social, et la coopération transnationale sur les questions climatiques * Elle insiste sur la nécessité de mobiliser les acteurs politiques, économiques, et sociaux pour faire de l'Europe un espace de bien commun

    1. Olivier ZAJEC, « Ce qui s’oppose coopère » : La guerre comme syllogisme éristique

      Résumé de la vidéo de [00:00:00][^1^][1] à [00:43:00][^2^][2] :

      Cette vidéo est une conférence du politologue Olivier Zajec sur la nature de la guerre et les concepts qui permettent de la comprendre. Il s'appuie sur les philosophies de Héraclite et d'Aristote pour analyser la guerre comme un syllogisme éristique, c'est-à-dire une forme de dialogue paradoxal qui vise à résoudre la contradiction entre deux propositions opposées.

      Points clés : + [00:02:55][^3^][3] La guerre selon Héraclite * La guerre est le principe générateur de toute chose * La guerre crée une harmonie des contraires qui s'opposent et coopèrent * Le Logos est le bien commun qui permet de relier les protagonistes de la lutte + [00:10:02][^4^][4] La guerre selon Aristote * La guerre n'a de sens qu'en vue de la paix * La guerre est un conflit de valeurs qui relève de la rhétorique * La guerre est un syllogisme qui part de deux prémices contradictoires et cherche un moyen terme + [00:20:14][^5^][5] La guerre comme syllogisme éristique * La guerre est une forme de dialogue qui vise à réduire la distance entre les sujets politiques * La guerre introduit un biais de force qui permet de mitiger la logique absolue du vrai et du faux * La guerre sécrète la paix en transformant la victoire militaire en succès politique

      Résumé de la vidéo de [00:21:00][^1^][1] à [00:43:00][^2^][2] :

      La vidéo est la deuxième partie d'une conférence d'Olivier Zajec sur la nature de la guerre comme syllogisme éristique. Il s'agit de montrer comment la guerre peut être comprise comme une forme de dialogue paradoxal qui permet de résoudre la contradiction entre deux acteurs politiques opposés. Il s'appuie sur les philosophies d'Héraclite et d'Aristote, ainsi que sur des exemples historiques et contemporains.

      Points forts : + [00:21:00][^3^][3] La guerre comme syllogisme éristique * Définition du syllogisme comme une inférence médiate qui part de deux propositions prémices et qui aboutit à une conclusion * Différence entre le syllogisme logique, qui suit la logique de vérité, et le syllogisme éristique, qui suit la logique de cohérence * Hypothèse selon laquelle la guerre fonctionne comme un syllogisme éristique, qui permet de trouver un moyen terme entre deux propositions contraires + [00:29:00][^4^][4] La différence entre le contraire et le contradictoire * Distinction entre les propositions contraires, qui sont compatibles avec un tiers terme, et les propositions contradictoires, qui s'excluent mutuellement * Exemples de controverses territoriales, comme les îles Kouriles ou le Koweït, qui illustrent la difficulté de trouver un moyen terme entre deux revendications opposées * Nécessité de prendre en compte le contexte des relations internationales, qui est un cadre inter-subjectif, où les propositions contiennent une part variable de vrai et de faux + [00:37:00][^5^][5] La guerre comme révélateur et catalyseur * Analyse de la guerre comme un signifier et un signifiant, qui manifeste et révèle les contours et les limitations de la dissociation entre les acteurs politiques * Rôle de la guerre comme un biais spécifique dans la négociation de la distance entre les sujets politiques, qui permet à la logique absolue du vrai et du faux d'être mitigée par une logique relative du fort et du faible * Exemple de la guerre de Trente Ans, qui montre comment la guerre a permis de sécréter la paix en faisant apparaître l'intérêt commun d'un règlement politique

    1. Jan-Cedric HANSEN, Conceptualisations cindyniques de la guerre

      Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [00:31:00][^2^][2] :

      Cette vidéo présente les conceptualisations cindyniques de la guerre, une approche développée par Georges-Yves Kerven pour appréhender la complexité et la vulnérabilité des situations de conflit. L'intervenant, Jan-Cedric Hansen, explique les notions clés des cindyniques, tels que l'organisme, l'hyperespace du danger, les déficits cindynogènes, et les applique à l'analyse des armées et des États en tant qu'organismes cindyniques. Il montre comment les cindyniques permettent d'identifier et de cartographier les vulnérabilités masquées, de les classer selon une taxonomie, et de les prévenir ou de les exploiter selon les buts de guerre.

      Points clés : + [00:01:11][^3^][3] La guerre comme phénomène de violence en action collective * Définition de la guerre selon Kerven : un ensemble de situations possibles contenu dans une situation d'ensemble * Nécessité de prendre en compte un complexe risque-conflit-développement + [00:03:12][^4^][4] Les cindyniques comme sciences du danger * Étymologie : du grec kundunô, je mets en danger * Objectif : appréhender la complexité des situations dangereuses * Méthodologie : définir l'organisme, le jeu d'interactions entre un contexte, des décideurs, des acteurs, des organisations + [00:05:07][^5^][5] L'armée comme organisme cindynique * Application des cindyniques à l'analyse de l'armée en tant qu'entité coordonnée, placée dans un environnement, un contexte et un milieu * Utilisation de l'hyperespace du danger, composé de cinq dimensions : téléologique, axiologique, déontologique, statistique, épistémique * Identification des déficits cindynogènes, sources de vulnérabilité, à chaque niveau : global, individuel, inter-individuel, organisationnel + [00:13:00][^6^][6] L'État comme organisme cindynique * Reproduction de la même démarche au niveau d'un État, en relation avec d'autres États, alliés ou adversaires * Prise en compte des cindyniques du premier ordre (les cinq dimensions) et du second ordre (les combinaisons de deux dimensions)

      Résumé de la vidéo [00:15:00][^1^][1] - [00:31:00][^2^][2] :

      Cette partie de la vidéo présente les concepts de cindynique, une approche qui permet d'appréhender la complexité et la vulnérabilité des situations de guerre. L'orateur explique comment les cindyniques définissent l'organisme, le milieu, le contexte et l'environnement, et comment ils utilisent l'hyperespace du danger pour analyser les dimensions téléologique, axiologique, déontologique, statistique et épistémique d'une situation. Il montre comment les cindyniques identifient les déficits systémiques, individuels, organisationnels et les dissonances qui peuvent générer des situations syndinogènes, c'est-à-dire de danger. Il illustre son propos avec des exemples tirés de l'histoire militaire et des conflits contemporains.

      Points clés : + [00:15:00][^3^][3] Les cindyniques, une science du danger * Une démarche pour appréhender la complexité * Un organisme, un ensemble d'éléments coordonnés * Un milieu, l'ensemble des éléments physiques ou matériels * Un contexte, l'ensemble des circonstances médiates ou immédiates * Un environnement, l'ensemble des conditions sociétales ou éthiques + [00:19:19][^4^][4] L'hyperespace du danger, un outil d'analyse * Cinq dimensions : téléologique, axiologique, déontologique, statistique, épistémique * Chaque dimension interroge un aspect de la situation : la finalité, les valeurs, les normes, les données, les modèles * Chaque dimension peut être cartographiée et quantifiée + [00:24:00][^5^][5] Les déficits syndinogènes, des sources de vulnérabilité * Quatre types de déficits : systémiques, individuels, organisationnels, dissonances * Chaque déficit correspond à un niveau : global, individuel, inter-individuel, organisationnel * Chaque déficit peut être prévenu ou corrigé par des mesures appropriées * La conjonction de plusieurs déficits peut entraîner une situation de tension critique * Exemples de vulnérabilités masquées au niveau systémique, individuel, organisationnel et inter-individuel

    1. Jerôme LANG, Computational Social Choice

      Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [01:04:00][^2^][2] :

      Cette vidéo présente le domaine de la décision collective computationnelle, qui étudie les méthodes et les problèmes liés à l'agrégation des préférences ou des croyances des agents. Le conférencier, Jérôme Lang, donne une introduction générale à la théorie du choix social, puis illustre quelques exemples de problèmes et d'applications dans ce domaine, tels que la démocratie liquide, le vote épistémique, le budget participatif, la manipulation stratégique, la délibération itérée et la diversité des comités.

      Points forts : + [00:00:10][^3^][3] La théorie du choix social * Science de la conception et de l'analyse des mécanismes de décision collective * Différents types d'informations à agréger : préférences, croyances, évaluations, etc. * Différents types de résultats : relations de préférence collective, alternatives gagnantes, ensembles de gagnants, etc. * Différents critères d'évaluation : équité, efficacité, robustesse, etc. + [00:08:14][^4^][4] La démocratie liquide * Un compromis entre la démocratie représentative et la démocratie directe * Les citoyens peuvent choisir de voter directement sur une question ou de déléguer leur vote à un pair de confiance * Les délégations peuvent être classées, cycliques ou conditionnelles * Les avantages et les inconvénients de la délégation en termes d'efficacité et de stratégie + [00:15:06][^5^][5] Le vote épistémique * L'agrégation des croyances sur la vérité du monde réel * Les règles de vote sont vues comme des estimateurs du maximum de vraisemblance * L'utilisation des approbations pour exprimer les croyances incertaines ou multiples * L'application au crowdsourcing et à l'annotation linguistique + [00:22:55][^6^][6] Le budget participatif * Un processus de décision collective sur l'allocation d'un budget public à des projets proposés par les citoyens * Les contraintes de coût et de faisibilité des projets * Les méthodes d'élicitation et d'agrégation des préférences des citoyens * Les critères d'optimalité et de diversité des ensembles de projets gagnants + [00:31:20][^7^][7] La manipulation stratégique * Le comportement des agents qui votent de manière insincère pour obtenir un meilleur résultat * Les théorèmes d'impossibilité et de possibilité sur l'existence de règles de vote non manipulables * Les aspects computationnels de la manipulation : complexité, heuristiques, approximation, etc. * Les modèles de manipulation probabiliste et bayésienne + [00:40:10][^8^][8] Le vote itéré * Un processus de décision collective où les agents peuvent changer leur vote en fonction des votes des autres * Les dynamiques et les équilibres du vote itéré * Les effets positifs et négatifs de la délibération sur le bien-être social et la diversité * Les extensions au vote itéré avec des préférences adaptatives ou des votes expressifs

    1. Benedict EASTAUGH, Social choice in infinite societies

      Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [01:05:00][^2^][2] :

      Cette vidéo présente une conférence de Benedict Eastaugh sur le choix social dans les sociétés infinies. Il explique le paradoxe de Condorcet, le théorème d'impossibilité d'Arrow et le théorème de possibilité de Fishburn. Il examine ensuite les questions de calculabilité et de constructivité liées à ces théorèmes, ainsi que les différentes façons de modéliser les sociétés infinies.

      Points forts : + [00:00:06][^3^][3] Le paradoxe de Condorcet * Un problème avec la règle de la majorité * Peut conduire à des préférences sociales non transitives * Même si les électeurs sont individuellement rationnels + [00:08:08][^4^][4] Le théorème d'impossibilité d'Arrow * Aucune fonction de bien-être social ne satisfait l'unanimité, l'indépendance et la non-dictature * Si le domaine est non restreint et qu'il y a au moins trois alternatives * Une tension entre la logique et l'équité + [00:13:01][^5^][5] Le théorème de possibilité de Fishburn * Il existe une fonction de bien-être social non dictatoriale qui satisfait l'unanimité et l'indépendance * Si le nombre d'électeurs est infini et qu'il y a au moins trois alternatives * Une échappatoire à l'impossibilité d'Arrow, mais non constructive + [00:20:00][^6^][6] La calculabilité et la constructivité * Les fonctions de bien-être social non dictatoriales sont-elles calculables ou correspondant à des règles ? * Quels sont les axiomes non constructifs nécessaires pour prouver le théorème de Fishburn ? * Utilisation de la logique inverse et de l'arithmétique du second ordre pour répondre à ces questions + [00:28:06][^7^][7] Les sociétés infinies * Trois types de modèles : continu, temporel et conditionnel * Avantages et inconvénients de chacun * Applications potentielles à la théorie du choix social et à l'éthique de la population

      Résumé de la vidéo [00:30:00][^1^][1] - [01:05:00][^2^][2] :

      Cette partie de la vidéo traite de la logique et de la modélisation des fonctions de bien-être social dans le cadre des sociétés infinies. L'orateur présente le langage et les systèmes axiomatiques de la seconde arithmétique d'ordre, qui permettent de formaliser de nombreux théorèmes mathématiques, y compris ceux de la théorie du choix social. Il explique comment la notion de calculabilité et de complexité est liée à la question de savoir si les fonctions de bien-être social sont constructives ou non. Il montre également comment les principes non constructifs, tels que l'axiome du choix, sont nécessaires ou non pour prouver certains résultats.

      Points forts : + [00:30:06][^3^][3] Le langage et les systèmes de la seconde arithmétique d'ordre * Un langage à deux sortes avec des nombres naturels et des ensembles de nombres naturels * Des structures avec un domaine à deux parties et des opérations arithmétiques * Des systèmes axiomatiques qui étendent le système de base RCA0 + [00:40:12][^4^][4] La notion de calculabilité et de complexité * Une fonction est calculable si elle peut être réalisée par un algorithme ou une machine de Turing * La hiérarchie arithmétique classe les ensembles et les fonctions selon leur degré de non calculabilité * La théorie de la preuve étudie la complexité des preuves mathématiques + [00:50:23][^5^][5] Les principes non constructifs et leur rôle dans la théorie du choix social * L'axiome du choix affirme l'existence d'un choix arbitraire dans tout ensemble d'ensembles non vides * Le théorème de la possibilité de Fishburn nécessite l'axiome du choix pour être prouvé * Le théorème de Kerman-Sondermann peut être prouvé sans l'axiome du choix, mais implique l'existence d'ultrafiltres non principaux

    1. Célia ZOLYNSKI, Du calcul du sujet à sa mise en pouvoir d'agir

      Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [01:10:00][^2^][2] :

      Cette vidéo présente la conférence de Célia Zolynski, professeur de droit du numérique à l'Université Paris 1, sur le thème "Du calcul du sujet à sa mise en pouvoir d'agir". Elle expose les enjeux de régulation des systèmes d'intelligence artificielle (IA) et les impacts potentiels de ces systèmes sur les droits et libertés fondamentaux des personnes. Elle propose de compléter l'approche actuelle du régulateur, qui consiste à protéger le sujet calculé par des obligations de transparence et de responsabilité, par une approche qui vise à mettre le sujet en pouvoir d'agir, en lui offrant des possibilités de paramétrage, de jouabilité et de curation des contenus et des services numériques.

      Points clés : + [00:00:00][^3^][3] Le contexte général de la régulation des systèmes d'IA * Les enjeux de protection des droits fondamentaux face aux impacts des systèmes d'IA * Les textes en cours de discussion au niveau européen et international * La notion de sujet calculé comme instrument de mesure des obligations imposées aux fournisseurs de systèmes d'IA + [00:19:45][^4^][4] L'approche complémentaire de la mise en pouvoir d'agir du sujet * Les limites de l'approche actuelle fondée sur la transparence et la responsabilité * Les pistes pour renforcer l'autonomie et la dignité du sujet face aux systèmes d'IA * Les exemples de paramétrage, de jouabilité et de curation des contenus et des services numériques + [00:44:45][^5^][5] Les questions et les échanges avec le public * Les modalités de mise en œuvre des obligations de transparence et d'accès aux données * Les difficultés de conciliation entre les différents textes et les différents niveaux de régulation * Les perspectives de recherche et de collaboration interdisciplinaire sur ces sujets

    1. Luc PELLISSIER, Amendement, consolidation, codification : le texte juridique, un objet calculatoire?

      Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [01:03:00][^2^][2] :

      Cette vidéo est une conférence de Luc PELLISSIER, informaticien et enseignant à l'université de Paris, sur le thème "Amendement, consolidation, codification : le texte juridique, un objet calculatoire ?". Il s'interroge sur la complexité du droit, la simplification par la codification, et la possibilité de modéliser le droit comme un système calculatoire.

      Points clés : + [00:01:15][^3^][3] La théorie de la complexité en informatique * C'est l'étude des problèmes qui sont plus ou moins difficiles à résoudre * Elle permet de classer les problèmes selon leur coût en temps ou en espace * Elle n'est pas vraiment utilisée dans la littérature juridique + [00:04:10][^4^][4] La codification du droit * C'est le processus de rassembler les dispositions sur un sujet donné dans un seul recueil * Elle vise à rendre le droit plus accessible, intelligible et cohérent * Elle a connu trois âges en France : créateur, consolidateur et abrogateur + [00:17:15][^5^][5] Les types de textes juridiques * Il y a les textes consolidés (les codes) qui sont lus mais qui n'ont pas de force juridique * Il y a les textes promulgués (les lois et les décrets) qui ont de la force juridique mais qui sont peu lus * Il y a un hiatus entre ces deux types de textes + [00:20:50][^6^][6] L'exemple de la rémunération des heures complémentaires * C'est un cas où le texte se modifie lui-même en fonction de la valeur du point indiciaire * C'est un changement de paradigme qui pose des questions de complexité et de contrôle démocratique * C'est un exemple de texte calculatoire + [00:23:00][^7^][7] La typologie des dispositions dans les textes promulgués * Il y a des dispositions modificatrices, transitoires, substantielles, résiduelles, etc. * Il y a des dispositions qui sont des programmes, des données, des métadonnées, etc. * Il y a des dispositions qui sont des fonctions, des variables, des constantes, etc.

      Résumé de la vidéo [00:25:00][^1^][1] - [01:03:00][^2^][2] :

      Cette partie de la vidéo présente le projet de recherche de Luc PELLISSIER, qui consiste à analyser le texte juridique comme un objet calculatoire. Il s'intéresse notamment à la complexité, à la codification et à la simplification du droit, ainsi qu'aux processus de modification des textes juridiques. Il propose une typologie des dispositions législatives et réglementaires selon leur nature et leur effet, et il illustre son approche avec l'exemple de la rémunération des heures complémentaires dans les universités françaises.

      Points clés : + [00:25:00][^3^][3] La théorie de la complexité en informatique théorique * Une branche qui étudie la difficulté des problèmes à résoudre * Peu de liens avec la notion de simplification du droit * Un objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi + [00:31:00][^4^][4] La codification du droit * Un processus qui consiste à rassembler les dispositions sur un sujet donné dans un seul recueil * Trois âges de la codification en France : créatrice, consolidatrice et abrogatrice * Des avantages et des inconvénients selon les points de vue des utilisateurs et des producteurs du droit + [00:42:00][^5^][5] La simplification du droit * Un terme ambigu qui peut recouvrir des notions différentes * Une distinction entre la simplification formelle et la simplification substantielle * Une question de lisibilité, de cohérence et de stabilité du droit + [00:49:00][^6^][6] Le texte juridique comme objet calculatoire * Une approche qui considère le texte juridique comme un système dynamique qui se modifie lui-même * Une typologie des dispositions selon qu'elles sont modificatrices, transitoires, substantielles ou résiduelles * Un exemple de la rémunération des heures complémentaires qui montre la complexité du système

    1. Juan Pablo CAICEDO - Paris IAS Ideas - Reimagining Urban Transportation

      https://www.youtube.com/watch?v=snaHY-vnB-M

      Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [00:58:00][^2^][2] :

      Cette vidéo présente le projet de corridor vert de la Septima, une avenue historique et stratégique de Bogota, en Colombie. Le projet vise à transformer cette avenue en un espace public de qualité, intégrant la mobilité durable, l'harmonie écologique et le sens du lieu. Le conférencier, Juan Pablo Caicedo, est le responsable du projet à la mairie de Bogota et il explique les principes, les objectifs, les défis et les opportunités de cette initiative.

      Points forts : + [00:03:05][^3^][3] Le contexte et les enjeux du projet * La Septima est une avenue emblématique de Bogota, qui relie le centre historique au nord de la ville * Elle est actuellement en mauvais état, congestionnée, polluée et peu sûre pour les usagers * Plusieurs tentatives de rénovation ont échoué au cours des 25 dernières années, faute de consensus et de vision + [00:10:10][^4^][4] La proposition du corridor vert * Il s'agit d'un projet participatif, qui intègre les besoins et les aspirations des citoyens * Il repose sur trois piliers : la mobilité durable, l'harmonie écologique et le sens du lieu * Il propose de réduire l'espace dédié aux voitures privées, de créer des pistes cyclables et des trottoirs élargis, de mettre en place un transport public électrique et de planter des arbres et des plantes + [00:21:00][^5^][5] La relation avec le concept de ville du quart d'heure * Le conférencier fait référence au concept développé par Carlos Moreno à Paris, qui vise à rapprocher les services et les activités des habitants * Il montre comment le corridor vert peut contribuer à cette vision, en facilitant les déplacements courts et longs, en offrant des espaces publics de qualité et en renforçant la biodiversité * Il souligne l'importance de la participation, de la solidarité et de l'écologie comme principes de la ville du quart d'heure

    1. Angelo TORRE - Paris IAS Ideas - Commons as local institutions

      Résumé de la vidéo [00:00:00][^1^][1] - [00:32:00][^2^][2] :

      Cette vidéo présente la conférence du professeur Angelo Torre sur les communs comme institutions locales dans l'Europe moderne. Il aborde les différentes approches et sources pour étudier les communs, ainsi que les aspects spatiaux, juridiques, rituels, religieux et redistributifs des hameaux qui les gèrent. Il propose d'utiliser des modèles générateurs pour analyser les tensions territoriales et les formes variées de gestion des communs dans différents contextes historiques et géographiques.

      Points forts : + [00:01:20][^3^][3] Les communs comme objet d'étude * Différentes approches : classique, néo-institutionnaliste, juridique, écologique-historique * Différentes sources : normatives, gestionnaires, administratives, judiciaires * Différentes classifications : administratives, émiques + [00:08:56][^4^][4] Les hameaux comme unité d'analyse * Origines médiévales et formes de peuplement * Rôle des confréries du Saint-Esprit et des oratoires * Résistance à la municipalisation des communs et des services + [00:19:03][^5^][5] Les formes de gestion des communs * Fin, partage, séparation, fédération des communs * Tensions entre le centre et la périphérie des communautés * Influence des facteurs micro et macro + [00:25:34][^6^][6] Les modèles générateurs comme outil d'analyse * Inspirés par l'anthropologue Fredrik Barth * Basés sur les séquences et les résultats des actions * Sensibles au contexte et aux choix des acteurs

  13. Jan 2024
    1. Die OPEC geht davon aus, dass sich die Nachfrage nach Öl in diesem Jahr um 2,25 Millionen Barrel pro Tag erhöhen wird. Für das kommende Jahr erwartet die OPEC eine Steigerung um 1,85 Millionen Barrel am Tag. Die Prognosen der OPEC liegen deutlich höher als die der IEA. Die USA haben in der zweiten Januarwoche mit mit 13,3 Millionen Barrel pro Tag einen neuen Rekord in der Ölproduktion aufgestellt. https://www.reuters.com/business/energy/oil-prices-edge-higher-opec-demand-estimate-while-cold-hits-us-output-2024-01-18/

  14. Nov 2023
    1. excessive expectations and reliance on CCUS
      • for: quote - Carbon Capture expectations - unfeasible

      • quote

        • If oil and natural gas consumption were to evolve as projected under today’s policy settings, this would require an inconceivable 32 billion tonnes of carbon captured for utilisation or storage by 2050,
          • including 23 billion tonnes via direct air capture to limit the temperature rise to 1.5 °C.
        • The necessary carbon capture technologies would require 26 000 terawatt hours of electricity generation to operate in 2050,
          • which is more than global electricity demand in 2022.
        • And it would require over USD 3.5 trillion in annual investments all the way from today through to mid-century, which is an amount equal to the entire industry’s annual average revenue in recent years.
      • for: IEA 2023 report - exec summary - Fossil Fuel industry, IEA 2023 report - exec summary - Oil and Gas industry

      • summary

        • this is the IEA summary of the position of the Oil and Gas industry and what they must do in order to transition to a net zero world by 2050 and avert 1.5 Deg C global mean temperature.
        • it contains a lot of useful information and statistics
  15. Oct 2023
    1. Die Internationale Energieagentur IEA hält eine Begrenzung der globalen Erhitzung aufgrund des schnellen Wachstums bei den erneuerbaren Energien für sehr schwierig, aber noch möglich. In ihrem Jahresbericht kommt sie zu dem Ergebnis, dass der Höhepunkt der Nachfrage nach Kohle, Gas und Öl bis 2030 erreicht werden wird. Die Energiepolitik der wichtigen Staaten ist aber bei der Umstellung auf Erneuerbare bei weitem nicht so ehrgeizig, als es nötig ist. https://www.liberation.fr/environnement/grace-aux-energies-bas-carbone-limiter-le-rechauffement-climatique-reste-possible-affirme-lagence-internationale-de-lenergie-20231024_YF7ZJA7WBFACRFIVCBRONJPKAA/

      World Energy Outlook 2023: https://origin.iea.org/reports/world-energy-outlook-2023

      Mehr zum World Energy Outlook 2023: https://hypothes.is/search?q=tag%3A%22report%3A%20World%20Energy%20Outlook%202023%22

    1. It should be noted that the third normative approach considers the global need for electricity asoutlined by the International Energy Agency (IEA) for different scenarios and develops an interim1.5DS within which ICT should not expand its current share of electricity. This electricity budgetuses the IEA trajectories for a 2°C scenario (2DS) and a below 2°C scenario (B2DS) to derive a 1.5°Ctrajectory for world electricity usage through doubling the difference between them and subtractingit from the 2DS as described in [IEA ETP]. This is an interim approach as IEA has not yet establisheda 1.5DS. The budget is then used to determine the amount of electricity that could be used by thesector if keeping its share at the current level. As the IEA is planning to include a specific 1.5DS, thetrajectories will be reviewed when the new IEA scenarios are published.

      This is the only mention of a "fair share" of global electricity use by the ICT sector

    Tags

    Annotators

    1. Die OPEC und Russland könnten sich bei einem Treffen am Wochenende in Wien dafür entscheiden, die ölproduktion zu kürzen, um auf die sinkenden Ölpreise zu reagieren. Für den Verfall der Preise sind vor allem Konjunkturerwartungen verantwortlich. Die International Energy Agency hat gerade ihre Prognose für den ölbedarf im laufenden Jahr um 10% nach oben gesetzt. Wegen der europäischen Sanktionen verkauft Russland höhere Mengen Öl an Indien zu ermäßigten Preisen, was sich dort negativ auf den Verkauf arabischen Öls auswirkt. https://www.nytimes.com/2023/06/02/business/oil-prices-opec-plus.html

  16. Sep 2023
  17. Jul 2023
    1. Die Verbrennung von Kohle erreichte 2022 ein neues Allzeithoch. Sie stieg gegenüber den Vorjahr um 3,4%. Aus einem neuen IEA-Bericht geht hervor, dass das deutliche Nachlassen der Nachfrage in Europa und den USA durch China, Indien und weitere sogenannte Schwellenländer mehr als ausgeglichen wurde. Die IEA prognostiziert ein Sinken der Nachfrage ab 2023. https://www.edie.net/coal-consumption-reached-an-all-time-high-in-2022-iea-confirms/

    1. Erneruerbare Energien wachsen weltweit deutlich schneller als von vielen erwartet. Ein neuer Bericht der Internatiionale Energiebehörde IEA stellt fest, dass die Erzeugungskapazität inzwischen bei 340 Gigawatt liegt. 2022 wurden 1.600Millionen Dollar in Erneuerbare investiert. Der Marktanteil von Elektroautos stieg auf 15%. berichte von anderen Institutionen bestätigen diese Trends. https://taz.de/Klimaneutralitaet-2050-technisch-moeglich/!5948817/

      IEA-Bericht: https://www.iea.org/reports/tracking-clean-energy-progress-2023

      Bericht des Rocky Montains Institute zur Energiewende: https://rmi.org/insight/x-change-electricity/

      Studie des World Resources Institute zu den 8 Ländern mit dem schnellsten Wachstum von Erneuerbaren: https://www.wri.org/insights/countries-scaling-renewable-energy-fastest

  18. Apr 2023
  19. Mar 2023
  20. Feb 2023
  21. Dec 2022
  22. Jun 2022
    1. Energy efficiency has never been more crucial! The time to unleashing its massive potential has come

      Will this conference debate rebound effects of efficiency? If not, it will not have the desirable net effect.

      My linked In comments were:

      Alessandro Blasi, will this conference address the rebound effect? In particular, Brockway et al. have done a 2021 meta-analysis of 33 research papers on rebound effects of energy efficiency efforts and conclude:

      "...economy-wide rebound effects may erode more than half of the expected energy savings from improved energy efficiency. We also find that many of the mechanisms driving rebound effects are overlooked by integrated assessment and global energy models. We therefore conclude that global energy scenarios may underestimate the future rate of growth of global energy demand."

      https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1364032121000769?via%3Dihub

      Unless psychological and sociological interventions are applied along with energy efficiency to mitigate rebound effects, you will likely and ironically lose huge efficiencies in the entire efficiency intervention itself.

      Also, as brought up by other commentators, there is a difference between efficiency and degrowth. Intelligent degrowth may work, especially applied to carbon intensive areas of the economy and can be offset by high growth in low carbon areas of the economy.

      Vaclav Smil is pessimistic about a green energy revolution replacing fossil fuels https://www.ft.com/content/71072c77-53b3-4efd-92ae-c92dc02f09ad, which opens up the door to serious consideration of degrowth, not just efficiency improvements. Perhaps the answer is in a combination of all of the above, including targeted degrowth.

      Technology moves quickly and unexpectedly. At the time of Smil's book release, there was no low carbon cement. Now there is a promising breakthrough: https://www.cnbc.com/2022/04/28/carbon-free-cement-breakthrough-dcvc-put-55-million-into-brimstone.html

      As researchers around the globe work feverishly to make low carbon breakthroughs, there is obviously no guarantee of when they will occur. In that case then, with only a few years to peak, it would seem the lowest risk pathway would be to prioritize the precautionary principle over a gambling pathway (such as relying on Negative Emissions Technology breakthroughs) and perhaps consider along with rebound effect conditioned efficiency improvements also include a strategy of at least trialing a temporary, intentional degrowth of high carbon industries / growth of low carbon industries.

  23. May 2022
  24. Mar 2021